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Le discours du Puy-en-Velay

Publié le 12 mars 2011 par Alex75
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Nicolas Sarkozy a prononcé récemment un discours, au Puy-en-Velay, un des points de départ du fameux pélerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, et de l'itinéraire de la Via Podiensis. Il y a fait allusion à l'héritage chrétien de la France, ses racines chrétiennes et les réactions politiques sont nombreuses. François Bayrou demande pourquoi l'Etat se mêlerait de choisir l'une de nos racines, Claude Bartolone considère que l'Etat remet en cause le socle laïc, sur laquelle la France repose depuis plus d'un siècle, et Marine Le Pen parle d'opérations électoralistes.

Le discours du Puy-en-Velay

La ficelle est grosse et les arrière-pensées transparentes. Sarkozy tente de marquer son futur adversaire potentiel du sceau des élites mondialisées. C'est aussi un versant du débat sur l'Islam (lié indirectement à l'immigration), dont certes on se demande en substance l'intérêt, étant donné qu'il a lieu tous les jours dans les médias ou lors des élections électorales. Mais ne voir que la ficelle serait aussi trompeur que de ne pas la voir. Après deux siècles de déchristianisation, dans une République qui donna une couleur si anti-cléricale à son concept de laïcité, et où les catholiques pratiquants se considèrent maintenant comme minoritaires, en évoquant de manière ostentatoire nos racines chrétiennes, Sarkozy rétablit aussi une sorte de hiérarchie culturelle - et non cultuelle -, à ses concitoyens, quelque soit leurs origines ou croyances et obédiences religieuses. A son accoutumée, Sarkozy tente de marquer une rupture. En 2007, il avait déjà joué sur cette corde en célébrant la mémoire de Jean-Paul II. Il prenait ainsi le contre-pied de Chirac et Jospin, inscrits dans l'ancien schéma historique d'une nation tellement chrétienne - et fille aînée de l'Eglise - qu'elle pouvait se rebeller contre sa mère.

C'est aussi un retour sémantiquement, aux grands principes d'assimilation, qui veut que les Français doivent s'assimiler, donc qu'ils fassent sienne, une culture, une histoire, forgée par l'héritage du christianisme. On se souvient que Charles de Gaulle avait déclaré - en privé -, c'est très bien qu'il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns, ils montrent que la France est ouverte et universelle. Mais la France est aussi et avant tout un pays européen, de culture greco-latine, et aux racines judéo-chrétiennes, sans quoi ce n'est plus la France. Dans d'autres pays européens également, notamment Outre-Rhin, la classe politique remet en cause le modèle “multikulti” des années 60, de l'époque des “travailleurs invités”, clamant que l'intégration et l'assimilation à l'allemande - en particulier des immigrés turcs de la 2e ou 3e génération -, est officiellement un échec. Sur le débat de la laïcité, Christine Boutin déclarait récemment que l'Islam doit aussi faire l'apprentissage de la loi de 1905, et du respect de son application.

Mais dans le même temps, dans le débat hexagonal, François Fillon explique que les règles de la laïcité à la française devront progressivement évoluer, pour tenir compte de certaines particularités inhérentes à la société française, et notamment des spécificités de l'Islam et de sa pratique. C'est ainsi une posture négociatrice, exactement à l'opposé du discours présidentiel sur les racines chrétiennes de la France. Mais entre les deux, il faudra choisir.

      J. D.


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