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“Le Québec n’a pas besoin d’immigration”, une conclusion exagérée et insidieuse. Partie 1

Par Shadlaw @rachadlaw
“Le Québec n’a pas besoin d’immigration”, une conclusion exagérée et insidieuse. Partie 1Mon texte est un regard critique sur le livre « Le remède imaginaire, pourquoi l'immigration ne sauvera pas le Québec» de Benoit Dubreuil et Guillaume Marois. Il est très long (8 pages) car le sujet et la teneur du livre l’exigent. Pour le moment, je n’en publierai qu’une partie (3 pages) pour ne pas vous écœurer et désolé pour des éventuelles coquilles, je m’endors.  
La lecture dans les journaux des titres comme «le Québec n’a pas besoin économiquement et démographiquement d’immigrants » m’a fait cligner les yeux comme la plupart des gens et surtout a piqué ma curiosité. Plus le temps avance, plus j’entends parler de deux sommités du monde scientifique québécois qui ont effectué un travail colossal, arguments en béton à l’appui, quelque chose qui est comparable à une bombe atomique. Cela a suffi pour me convaincre d’aller acheter le livre hier après le boulot. On peut dire sans risque de se tromper que les auteurs et leurs partenaires ont réussi la mise en marché de leur livre. Oui, je l’ai lu et ca m’a pris toute la nuit jusqu’à 2h du matin pour passer à travers ou presque. Je vais essayer le plus possible de me coller à des données scientifiques en citant textuellement des conclusions de recherches existantes, mais de temps en temps un peu d’analyses et d’expériences personnelles peuvent être mises à profit et surtout excusez mon style parfois coloré. A mon humble avis, il y a des fissures dans le béton armé et la bombe peut-être désamorcée, vous n’avez qu’à lire mon texte jusqu’au bout pour vous en convaincre. Pour commencer, je dois féliciter les auteurs pour les efforts de documentation et l’ampleur du travail abattu. Il me semble que le livre est une sorte de prolongement du mémoire de maîtrise du démographe Guillaume Marois, la démarche scientifique est fort louable. Ca nous change en effet des lieux communs et des affirmations gratuites sur l’immigration. Cependant sous le couvert de la science, on peut aussi tordre le coup à la réalité.Prière ne pas jeter la pierre au messager !J’ai trouvé intéressant et particulier la volonté des auteurs de se protéger contre des attaques ou critiques éventuelles dans l’avant propos du livre. Quelle ignominie pour des scientifiques que de se faire traiter de Xénophobes ! N’est-ce pas mieux de donner des munitions aux autres qui feront le sale boulot avec plaisir. L’avant-propos se résume en quelque chose comme : c’est la science, ce n’est pas l’émotion, ni du rêve et surtout ne nous faites pas dire ce que nous ne faisons qu’insinuer. Mieux, nos amis et collègues ont été convaincus de la pertinence des conclusions de nos travaux, vous aussi ?Une méthodologie pseudo-scientifique1- Une revue de littérature abondante mais utilisée de façon pernicieuse : -   Citation des conclusions pas très favorables à l’immigration de plusieurs études, amplification et exagération de leur portée scientifique; omission volontaire ou non des limites et des réserves que les auteurs de ces études ont soulevé par rapport aux résultats obtenus.-   Citation de quelques conclusions favorables de certaines études, et démolition systématique de ces conclusions, le plus souvent, par des méthodes très peu scientifiques comme des réflexions douteuses, la suspicion, des accusations à peine voilées, des insinuations et une bonne dose de mépris.Ils auraient pu se passer de la flèche à Mario Dumont : «Dumont a obtenu un baccalauréat en économie de l’Université Concordia…. Cela implique-t-il qu’il sache de quoi il parle ?»2- Nouveauté : la simulation d’un « Québec sans immigration », un exercice ayant une portée très limitée car comportant un biais majeur. J’y reviendrai plus en détail.Pour compléter le tableau, les auteurs essaient de faire passer le gouvernement et ses fonctionnaires pour des incompétents notoires, les journalistes pour des perroquets et les Québécois pour des moutons grégaires. Les auteurs semblent délibérément préférer voir le verre à moitié vide qu’à moitié plein. Le remède imaginaire cède le pas au danger imaginaire.Revenons au vrai sujet du livre. Je m’abstiendrai de vous parler des bénéfices de l’immigration autres que par rapport aux aspects démographiques et économiques. Ca m’aurait pris des centaines de pages et ce n’était pas clairement la finalité du présent livre.Les impacts démographiques de l’immigrationJe reconnais qu’une des affirmations des auteurs est indubitable parce la grande majorité des études existantes la confirment : SEULE l’immigration, dans les proportions actuellement ciblées, ne pourra empêcher le vieillissement de la population, dans un contexte de baisse accentuée de la fécondité des natifs. Elle ne fera que reporter l’échéance à plus tard. Aussi une meilleure fécondité des natifs est de loin meilleure que l’immigration pour modifier durablement la structure par âge de la population. Cependant lorsque l’immigration est combinée à une politique nataliste qui implique une légère augmentation de la fécondité des natifs, la conclusion peut être tout à fait différente. A moins de trouver une solution magique qui va contraindre les Québécoises à se remettre à procréer comme dans le bon vieux temps, cette dernière option me semble la plus réaliste. Cette possibilité avait déjà été soulevée dans les travaux de Ledent (1993) qui démontrent que l'immigration internationale peut avoir un impact sensible sur l'évolution démographique du Québec. Dans les scénarios retenus par cet auteur, la fécondité a un rôle accélérateur, tandis que l'immigration a un effet élévateur de la taille de la population qui en résulte. Malgré cette conclusion sur l’impact marginal de l’immigration sur la démographie, beaucoup de chercheurs reconnaissent les insuffisances des modèles utilisés pour évaluer cet impact parce qu’ils se limitent seulement à l’impact direct des entrées d’immigrants, donc ces modèles ne reflètent pas parfaitement la réalité.L’honnêteté intellectuelle devrait pousser les auteurs à souligner ses insuffisances.Selon un article de Tossou (1998) qui a fait sa thèse de doctorat sur le sujet, sous la direction de Norbert Robitaille et Marc Termote, l’effet direct à court terme induit par l’immigration est doublé par un effet indirect à moyen et long termes qui concerne la contribution des immigrants aux naissances enregistrées dans le pays hôte et la concentration géographique et ethnique de ces derniers. Très peu d’études abordent la question de la part des naissances dues aux immigrants. Celles-ci sont le plus souvent intégrées dans les statistiques nationales, laissant croire qu’elles relèvent uniquement des natifs. Cela conduit à une sous-estimation parfois importante de la proportion relative de cette population immigrée, et inversement une surestimation de la part de la population native. Mais on peut s’imaginer aisément que la contribution des immigrants aux naissances a été importante, surtout avec le changement observé dans leur structure ethnique en faveur des pays du tiers monde qui sont plus féconds et dont la part dans les flux entrants est croissante. Cette problématique est due aux données disponibles utilisées pour les estimations. Par exemple, la définition d’immigrant chez Statistique Canada équivaut à « né à l’étranger ». En général, la catégorie «né à l'étranger» masque énormément de variations. Ce qui pousse même certains chercheurs à admettre que les données qui se bornent à comparer les personnes nées au Canada et à l'étranger, sans préciser l'origine ethnique et la période d'immigration, n'ont guère de valeur analytique. Et pourtant, c'est la technique analytique de base utilisée jusqu’à maintenant par les démographes et la plus courante aussi dans la présentation de données publiées. Une synthèse d'études récentes sur l'immigration et l'intégration des immigrants au Canada dans la perspective de six disciplines a été réalisée par la Chaire des études canadiennes de l’université McGill. Elle soulignait également qu’ « Il serait utile d'avoir des données démographiques sur le comportement des enfants des immigrants, mais il est difficile de les obtenir à partir des données du recensement, à moins que l'on ajoute au questionnaire de recensement le lieu de naissance des parents. Pour en finir avec l’aspect méthodologique, rappelons qu’à part les statistiques descriptives, la principale méthode utilisée en démographie consiste à recourir à des modèles de simulation ou de régression afin de faire des prévisions quant aux résultats futurs de divers scénarios. Mais des projections ne sont pas nécessairement des prédictions, et il est rare que toutes choses soient égales par ailleurs, sauf dans nos rêves. Il est d’ailleurs fréquent de voir les résultats des projections de Statistique Canada et de l’Institut de statistique du Québec variés périodiquement. Et surtout les résultats obtenus par les simulations dépendent des données utilisées. En d’autres termes, si les données sont bancales, les résultats sont inévitablement imparfaits.Une simulation biaisée et inutileLes problèmes méthodologiques susmentionnés m’amènent à qualifier la simulation effectuée par les auteurs concernant un hypothétique Québec sans immigrants de complètement futile. L’idée est d’isoler les immigrants accueillis entre 1971 et 2006 et comparer la structure des âges ainsi obtenue avec celle actuelle qui inclut les immigrants. C’est évident que le million d’immigrants arrivé sur 35 ans ne transformera pas significativement la structure des âges, surtout si leurs enfants et petits enfants nés au Québec ne sont pas considérés comme immigrants. Imaginez un couple marocain venu au Québec et qui a fait 4 enfants au Québec. Dans cette simulation, le couple est isolé comme immigrant mais leurs 4 enfants nés ici sont comptés comme Québécois. Même chose pour mes voisins vietnamiens qui sont arrivés au Québec il y a plus de 20 ans avec 3 enfants mineurs, les enfants sont aujourd’hui des parents de 3 à 4 enfants pour un total de 10. Les 10 enfants sont considérés aussi comme des natifs. C’est tout à fait illusoire d’évaluer l’impact de l’immigration sur la démographie en s’arrêtant seulement à la première génération. Si on exclut les enfants de ce million d’immigrants du groupe des natifs, la structure des âges d’un hypothétique Québec sans immigrants serait probablement différente de celle proposée dans le livre. L’impact des immigrants pourrait encore se répercuter sur la troisième génération même si le niveau de fécondité de la filière immigrante risque de rejoindre celui des natifs à plus long terme.Selon une étude de Termote (1992), en 1990, 30% des naissances enregistrées sur les Îles de Montréal et Jésus étaient le fait de mères nées à l'étranger, qui ont un indice de fécondité près du double de celui de leurs consœurs nées au Canada. En outre, la moitié de l'augmentation de la natalité entre 1986 et 1990, et près de 40% de l'accroissement naturel de cette période, y sont dus à la population née à l'étranger. Imaginez donc la situation après 1990 où il y a une augmentation de l’immigration en provenance des pays en développement.Par ailleurs la faible différence entre les rapports de dépendance dans la simulation peut s’expliquer par la période de simulation qui n’est pas suffisamment longue pour révéler un impact significatif. Sur 35 ans, les immigrants ont juste le temps de vieillir et de passer du côté des 65 ans et plus (inactifs) alors que la majorité de leurs enfants sont probablement encore mineurs (inactifs). D’ailleurs rien ne prouve que la légère différence (0,43 vs 0,45) apparue en 2006 à la fin de la simulation ne puisse s’accentuer dans le futur.
Mon analyse critique du livre n’est pas finie, Il y aura une suite…..oups, je m’endors.Rachad Lawani
Un immigrant de pays en développement dont les auteurs semblent mépriser le système éducatif.

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LES COMMENTAIRES (1)

Par Binazo
posté le 10 avril à 01:33
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Excellente analyse !

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