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RANGO (Gore Verbinski - 2011)

Par Actarus682
http://www.cine-covershd.fr/gallerie/files/1/rango_612227_original.jpgSorti de la franchise Pirates des Caraïbes dont il assura la mise en scène des trois premiers opus (le 4ème volet ayant été confié au réalisateur Rob Marshall), Gore Verbinski nous revient avec un film d'animation dont la richesse scénaristique, l'inventivité de la mise en scène et la qualité des dialogues en font l'une des plus belles réussites cinématographiques sorties sur les écrans depuis le début de l'année. D'une beauté visuelle rivalisant avec celle des métrages des studios Pixar (le graphisme de Rango ayant été assuré par Industrial Light & Magic, la boîte à effets spéciaux de George Lucas), le film de Verbinski se démarque avant tout par ses multiples niveaux de lecture, la thématique de Rango recelant en effet des couches d'interpétation plus riches les unes que les autres. Rango est un caméléon domestique se faisant éjecter de la voiture de ses propriétaires suite à une embardée sur une route au milieu du désert. Cabotin, Rango cherche avant tout à exister en tentant de trouver un sens à sa vie. Son arrivée dans la petite ville de Dirt, vestige du Far-West peuplé d'animaux du désert, lui donnera l'occasion de s'affirmer et de construire sa propre histoire. http://simplywallpaper.net/pictures/2010/12/26/Rango-Wallpaper-4.jpg http://2.bp.blogspot.com/-XF6XA6EUwmM/TW1CKjP4-7I/AAAAAAAASDU/A-2-RziW-W8/s1600/rango2.jpg Le film constitue tout d'abord un vibrant hommage au western et à ses codes. Ces derniers sont ainsi repris par Verbinski dans des scènes plus jubilatoires les unes que les autres (duel, saloon, personnages aux mines patibulaires, poussière, etc...). Il s'agit ici de mettre l'accent sur deux scènes absolument fantastiques qui sortent véritablement du lot. La première marque la première entrée de Rango dans le saloon du village. Un ventilateur rouillé tourne au plafond. Le grincement de ce dernier ponctuera toute la scène, à l'image de ces sons persistants, répétitifs, plaintifs, se retrouvant dans nombre de scènes des westerns de Sergio Leone (le grincement de l'éolienne au début d'Il était une fois dans l'Ouest notamment). L'hommage est ici évident, et inscrit pleinement le film dans sa déférence au genre ultime du cinéma. La seconde scène totalement inattendue et pleine de sens marque la rencontre entre Rango et l'esprit de l'Ouest, ce dernier arborant les traits de l'homme sans nom en personne: Clint Eastwood. Le discours que tiendra ce dernier au personnage de Rango rejoindra l'une des idées forces du film: la fin d'un monde et la disparition des héros. http://simplywallpaper.net/pictures/2010/12/26/Rango-Wallpaper-34.jpg http://toonnation.net/wp-content/uploads/2010/06/Rango3.jpg Car Rango se fait en effet l'écho d'un constat amer et d'une triste réalité, celle d'un monde voulant aller toujours plus loin, toujours plus vite, en oubliant sur le bord du chemin des valeurs essentielles (la solidarité, l'humanité, l'entraide), laissant derrière elle la carcasse fumante d'une société qui prenait encore le temps, qui  n'avançait pas la tête dans le guidon, et qui comptait parmi ses membres des êtres qui ne regardaient pas uniquement leurs pieds en avançant dans la rue. Cette idée extrêmement forte du film se double d'une réflexion sur l'imaginaire et la nécessité pour toute société de se trouver des héros. La réplique de l'homme sans nom sera à ce titre significative: "aujourd'hui, les gens veulent mettre un nom sur tout". Ou cette séquence voyant le maire de Dirt asséner au serpent body hunter: "tu es le dernier hors-la-loi de ton espèce". La nécessité de l'imaginaire et des héros dans un monde qui n'en possède (presque) plus et qui broie peu à peu la nécessaire part de rêve se trouvant en chacun de nous, tel est le tour de force scénaristique de Rango. http://simplywallpaper.net/pictures/2011/01/07/Sunset-Rango-Wallpaper.jpg   http://simplywallpaper.net/pictures/2010/12/27/Rango-Wallpaper-21.jpg http://rango.cine.orange.fr/layout/images/photos/7.jpg Parcours initiatique, réflexion sur la société moderne, hommage au western, Rango est tout cela à la fois, porté par une narration sans faille qui ne faiblit jamais. Par ailleurs, le film est ponctué de références au 7ème art que le cinéphile se plaira à reconnaître: Apocalypse now, Star wars, Il était une fois dans l'Ouest, et même Young Mr Lincoln de John Ford, les clins d'oeil abondent sans jamais prendre le pas sur le sujet du film. Soulignons également la mise en scène inventive et de toute beauté de Gore Verbinski, qui signe avec Rango sans conteste son meilleur film. L'on pourra cependant reprocher au métrage un trop plein de thèmes abordés, le scénario étant par moment un peu trop riche dans ses prétentions certes louables, mais qui sur une durée d'1h40 révèlent une abondance un peu trop marquée. Cela n'enlève rien à la réussite de l'ensemble et au plaisir que l'on prend à suivre les aventures de ce caméléon qui symbolise, mine de rien, la survivance du rêve et de l'imagination comme rempart contre la sécheresse du monde. Du grand art.

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