Sous un titre que pour ma part je ne trouve pas des plus heureux, Nicolas Briançon adapte, met en scène et interprète superbement, aux côtés de la délicieuse Anne Charrier, Crébillon fils (La Nuit et Le Moment) et Jules Renard (Le Pain de Ménage) qui ne supportent cependant pas de la même manière la transposition contemporaine.
"La Nuit Et Le Moment" est une merveille, un petit bijou de la langue française du XVIIIème. Ce savoureux badinage amoureux, pourtant plus grave qu'il n'en a l'air, est une succession de longues phrases chargées d'imparfaits du subjonctif et autres tournures tombées de nos jours en désuétude qui régalent nos oreilles autant que le propos. Dans cet élégant jeu de séduction à l'érotisme latent situé au coeur de la chambre à coucher, Anne Charrier et Nicolas Briançon excellent. Elle nous charme, nous touche. Il nous séduit et nous conquiert. La langue de Crébillon perd malgré tout de sa superbe dans une adaptation et un phrasé trop moderne. C'est dommage. A ce sujet nous émettrons donc quelques réserves.
"Le Pain de Ménage", plus récent, accepte davantage les années 2000. C'est du bonheur de la fidélité, ou plus exactement de sa difficulté, dont il est question ici. Du temps qui passe et de son effet sur le couple aussi. Le soir venu, un homme et une femme mariés, apparemment heureux en amour, échangent pour mieux résister à la tentation de l'adultère. Il est charmeur, elle l'écoute avec un plaisir non feint. La question se pose. Qu'adviendra t-il s'ils franchissent le pas ? Et pourquoi le franchir, si leur couple va si bien ? Les deux interprètes sont à nouveau d'une justesse et d'une sincérité qui vont jusqu'à nous bouleverser dans ce texte des plus subtiles.
L'ensemble constitue un spectacle d'une grande finesse, d'une grande classe. C'est charmant, drôle, touchant, intelligent, techniquement parfait, esthétiquement réussi.
A voir, vraiment.
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