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Un chef-d’oeuvre poisseux : Soudain l’été...

Publié le 07 avril 2011 par Mmepastel
Un chef-d’oeuvre poisseux : Soudain l’été...

Un chef-d’oeuvre poisseux : Soudain l’été dernier.

J’ai revu avec la même émotion ce film de Joseph L. Mankievicz dimanche soir, lors de la soirée hommage d’Arte à Elizabeth Taylor. Ce film possède vraiment une force inouïe, une violence incroyable.

Ce qui est passionnant dans cette histoire (adaptée d’une pièce de Tennessee Williams, expert en passions humaines et en rapports pervers entre les êtres), c’est la rivalité de deux femmes. Surtout quand elles sont jouées par deux immenses actrices : Katharine Hepburn et Elizabeth Taylor. L’une essaie d’étouffer un secret, l’autre essaie de s’en délester, articulant leurs souffrances réciproques autour du fameux Sebastian, le fils/cousin adulé et solaire disparu dans des circonstances obscures ; il ne sera jamais montré à l’écran : son identité -sexuelle justement- est précisément ce qui fait problème, mais sera présent dans toutes les conversations.

Dans l’image que vous voyez ci-dessus, on voit toute la dramaturgie graphique et efficace du cinéaste : la jeune Catherine, assoupie innocemment sur le lit est surplombée par deux êtres menaçants : la mère prédatrice qui sait que Catherine a compris la vraie nature de son fils (et donc de son lien avec celui-ci) et le docteur Cukrowicz (dont les intentions sont bonnes) mais qui possède le pouvoir de lobotomiser les malades et qui se voit pressé de toutes parts pour le faire sur Catherine. 

Comme les jeunes tortues des Galapagos dévorées par des oiseaux prédateurs qu’évoquait Violette (Katharine Hepburn) lors de sa rencontre avec le neuro-chirurgien, Catherine apparaît donc comme une victime au-dessus de laquelle plane le danger. Cette violence de la nature est un thème récurrent du film : Catherine, dans l’hôpital psychiatrique, se retrouve à un moment, menacée par la foule des malades mentaux hommes ; sa beauté, sa féminité excitent le désir masculin : sur une passerelle, coincée, elle se fait agripper les chevilles. Voilà une scène où la violence du désir est montrée crument : les psychotiques n’incarnent-ils pas l’homme sans surmoi, sans garde-fou, livré sans retenue à ses pulsions ? Après elle est seulement dite (l’agression subie par Catherine dans une clairière, l’excitation des jeunes espagnols face à sa tenue de bain provocante), ou suggérée (Catherine suggère que Sebastian consommait les jeunes hommes sans circonvolutions inutiles). Violence qui se retournera finalement contre Sebastian dans la scène finale puisque, telle une jeune tortue face à ses prédateurs, il se fera lui aussi quasiment dévorer par les jeunes de la Cabeza de Lobo (=La tête de loup), affamés et pauvres, excités par cet américain ambigu et fortuné. La violence du désir sexuel est donc confondue avec la celle de la faim, c’est-à-dire avec des instincts et des pulsions naturels. C’est une vision sans appel de la nature humaine, qui n’a rien de plus civilisé que celle des oiseaux prédateurs.

Les deux actrices principales sont tout simplement extraordinaires.


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