Magazine Cinéma

[Critique DVD] Le voyage du directeur des ressources humaines

Par Gicquel

Si comme moi vous n’avez pas trop aimé « Le voyage de Tania », voici la séance de rattrapage . On part quasiment sur le même postulat, (le transport d’une défunte à sa dernière demeure) avec un traitement totalement différent, où le cinéma cette fois retrouve ses fondamentaux et le plaisir du spectateur.
Un directeur des relations humaines se voit dans l’obligation d’accompagner le corps d’une de ses employées dont il ignorait quasiment tout. Il part de Jérusalem très bougon, se retrouve tout aussi grognon en Roumanie où vit sa famille, avant de prendre conscience du peu d’humanité qui l’habitait.

[Critique DVD] Le voyage du directeur des ressources humaines

Un vague portrait , aucun souvenir , le DRH doit maintenant apprendre à connaître son ancienne employée

C’est la transformation de cet homme que Eran Riklis (« Les citronniers ») nous propose de suivre au fil de ce road-movie parsemé d’embûches comico-tragiques, dans un décor parfaitement dessiné, entre l’exubérance israélienne et la désolation glaciale de la Roumanie.
Il n’y a rien de systématique dans cette approche, le réalisateur adoptant chaque situation, chaque paysage à la nuance près, en peintre avisé de l’âme et des sentiments. Et dès lors tous ses personnages de premier ou second plan deviennent de jolis portraits, à commencer par le rôle-titre (Mark Ivanir )qui tout en se découvrant devra se réconcilier avec lui-même avant de retrouver qui sait sa petite famille qu’il a trop souvent délaissée.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

J’ai bien aimé aussi le rôle tenu par Rozina Cambos , en consule israélienne paumée dans son trou . Elle mène tout le monde à la baguette, à commencer par son époux qui auparavant n’était autre que son chauffeur( Julian Negulesco, heureux comme un pape dans ce rôle très pépère ). D’ailleurs les femmes tiennent le haut du pavé, à l’image de l’intraitable patronne de notre DRH, que joue royalement Gila Almagor . Avec elle, c’est donnant-donnant et toujours « peut mieux faire ».

[Critique DVD] Le voyage du directeur des ressources humaines

Le journaliste, dit " la fouine" à l'origine de la révélation de la mort de l'employée ( Guri Alfi )

C’est peut-être le seul reproche que j’adresserai au réalisateur qui depuis « Les citronniers » m’avait particulièrement marqué. Ici, le souffle créateur est plus discret, le regard social et politique moins acéré, mais pour la folie et le pittoresque de ce voyage initiatique, on peut embarquer sans réserve.

Le making of

Des coulisses aussi intéressantes à visiter que le film est à voir. Guri Alfi qui interprète le rôle du journaliste révélant la mort de l’employée (son surnom dans le film « la fouine », ce qui veut tout dire) ne cache pas ses sentiments vis-à-vis des conditions de tournage en Roumaine. «Le plus dérangeant, ce fut la sombre et lourde atmosphère postsoviétique qui y régnait. Sans vouloir dénigrer un pays, si tous ces gens pouvaient juste sourire, on serait chez Kusturica ».

Pour toute l’équipe les conditions climatiques (-20 degrés) demeurent un mauvais souvenir. «Il fallait me dégeler toutes les vingt minutes, comme la caméra » sourit au soleil américain Mark Ivanir. «Ce fut un moment unique d’harmonie entre le paysage, l’homme et la caméra » lui répond le réalisateur qui balaie d’un revers de manche et d’un grand sourire le fait que les comédiens à ce moment là, lui en voulaient beaucoup. «C’est leur problème ! »

[Critique DVD] Le voyage du directeur des ressources humaines

Un cercueil bien encombrant

Le romancier Anat Ben-Yehoshua , est venu sur le tournage et on le voit heureux comme un enfant. « Mais comme je ne voudrais pas qu’on me dise comment écrire, ils n’ont pas besoin de moi pour leur dire quoi filmer ».

Tous s’accordent sur la performance du jeune acteur français Noah Silver ,dont c’est le premier film. « Je n’ai pas trouvé un garçon roumain pour tenir le rôle du fils de la défunte » regrette le réalisateur. Et Guri Alfi de lui prédire une carrière à la DiCaprio.

Enfin il faut les voir à Locarno, en plein air, lors du festival où le public termina la projection sous la pluie. Et accorda au film, son grand prix !


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Gicquel 940 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines