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La ferme africaine…

Publié le 22 avril 2011 par La Fille Aux Chaussures

La ferme africaine…

J’avais étudié « Le Festin de Babette » du même auteur en classe de 2nde. Je n’en gardais pas un souvenir ému mais la collection Folio Deluxe qui embellit depuis quelques années ma bibliothèque, m’a poussée à lire l’ouvrage peut-être le plus connu de Karen Blixen.

C’est long. Très long. Plus de 500 pages interminables pour celles et ceux qui ne sont pas plus friands que ça d’anthropologie. Sur bien des points, j’ai eu l’impression de relire une resucée de « Moby Dick » à la sauce saga Africa. Point de romanesque ou de sentimentalisme ici mais plutôt un inventaire de la faune et de la flore kenyane, conséquence de l’époque (XIXè) et des origines danoises de l’auteure, pays au combien respectueux mais qui est un général peu connu pour ses soirées bonga bonga à la Berlusconi.

Vous vous dites sans doute, à la lecture de ces quelques lignes, notamment si vous n’êtes pas forcément scientifiques dans l’âme, que ce livre n’est pas fait pour vous. Que nenni car il y a dans cet ouvrage, bien d’autres intérêts. On est ici bien loin du concept de la négritude cher à Césaire et à Senghor… Nous assistons aux relations in vivo entre ceux que l’on appelle encore « les nègres » et les occidentaux au début du siècle dernier. Les premiers sont alors les esclaves des premiers mais aucune once de racisme ici. Leurs coutumes semblent forcément étranges aux « Blancs » mais tout nous est ici décrit avec une grande véracité, sans moquerie aucune. Pas de violence ni de rapports abusifs dans ces relations mais plutôt beaucoup de respect.

On  peut également être dérangé si on a comme moi, un petit coeur estampillé « 30 millions d’amis« , par les liens entre les animaux et les humains somme toute un peu… barbares. Mais là encore, c’était ainsi que cela se passait alors. Il faut savoir quelques fois savoir lire avec d’autres yeux que ceux du lecteur de 2011.

Une des autres forces du livre réside dans le féminisme de Karen Blixen. Pas un féminisme artificiel ou forcené mais plutôt un féminisme que je qualifierais « de terrain« . On se doute que ce ne fut pas facile pour une femme de cette époque de tenir une exploitation de cette ampleur et de réussir en même temps, à faire face aux autorités locales. Et pourtant, elle y arrive parfaitement, obtenant le respect de tous, sans jamais faire preuve de faiblesse et sans jamais utiliser non plus sa condition féminine comme circonstance atténuante.

Pour résumer, je ne placerai pas « La Ferme africaine » dans mon Panthéon personnel mais ce livre mérite d’être lu ne serait-ce que pour le fait qu’il appartienne aux grands classiques de la littérature.

Qui ne sait pas que La Ferme africaine est une grande histoire d’amour ? Mais, contrairement à ce que laisse supposer le superbe film de Sydney Pollack (Out of Africa), on sait moins que le plus grand amour de Karen Blixen est l’Afrique. Avant même Denys Finch Hatton, le chasseur d’éléphants, cet « homme au coeur pur » qui écoute inlassablement ses histoires, le coeur de Karen Blixen bat pour les splendeurs ocres du continent africain et la noblesse de ses habitants. Pour preuve, les denses descriptions dignes de la plus belle prose poétique et ces curieuses « Notes d’une émigrante » insérées en deuxième partie du roman, carnets d’impressions et de souvenirs qui nous plongent plus profondément encore dans l’âme africaine.
Karen Blixen a réellement « possédé une ferme en Afrique au pied du Ngong ».
 » Quand le souffle passait en sifflant au-dessus de ma tête, c’était le vent dans les grands arbres de la forêt, et non la pluie. Quand il rasait le sol, c’était le vent dans les buissons et les hautes herbes, mais ce n’était pas la pluie. Quand il bruissait et chuintait à hauteur d’homme, c’était le vent dans les champs de maïs. Il possédait si bien les sonorités de la pluie que l’on se faisait abuser sans cesse, cependant, on l’écoutait avec un plaisir certain, comme si un spectacle tant attendu apparaissait enfin sur la scène. Et ce n’était toujours pas la pluie. Mais lorsque la terre répondait à l’unisson d’un rugissement profond, luxuriant et croissant, lorsque le monde entier chantait autour de moi dans toutes les directions, au-dessus et au-dessous de moi, alors c’était bien la pluie. C’était comme de retrouver la mer après en avoir été longtemps privé, comme
l’étreinte d’un amant.  » Une nouvelle traduction de l’un des titres les plus populaires de la littérature du vingtième siècle, qui se veut fidèle à la musique de Karen Blixen, à sa voix, à son style, unique dans les lettres danoises, et lui rend enfin tout son éclat.
La ferme africaine de Karen Blixen – Ed. Gallimard – 10,50 euros.
Prochaine lecture : « Passe un ange noir » de Anne Bragance.

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