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Sarkozy découvre l'Internet gentil. Une volte-face parmi d'autres.

Publié le 28 avril 2011 par Juan
Sarkozy découvre l'Internet gentil. Une volte-face parmi d'autres.Il poursuit sa campagne, indifférent aux sondages présidentiels qui le donnent perdant dans tous les cas de figure. Il déploie une attention hors normes pour des sujets inattendus, comme, ce jeudi, la filière bois. Le chômage officiel est annoncé en baisse symbolique, mais le surendettement en hausse. Mercredi, il découvrait l'internet gentil. Quelques (jeunes) entrepreneurs politiquement débauchés pour un Conseil numérique chargé d'éclairer le gouvernement.
Ce dernier a bien besoin de lumière. Il semble tout aussi perdu.
Sarkozy, candidat Internet
Son destin ne passionne pas les foules. Mardi soir vers 23H, France 2 diffusait un portrait presque testamentaire et intime de Nicolas Sarkozy, «Un jour, un destin ». Un million et trois cent mille personnes seulement sont restées le regarder. 85% des téléspectateurs ce soir-là préférèrent un autre programme. Pour un « enfant de la télé » comme notre Monarque, c'est un désaveu cinglant et dur à avaler.
Nicolas Sarkozy file ce jeudi en Corrèze. Ne dites pas qu'il est candidat. Il va simplement parler de la filière bois... « Il est ravi d’y retourner, c’était dans l’air depuis un moment, on cherchait la bonne occasion », a confié un conseiller. Bernadette Chirac est du voyage. Il l'a rapatrié illico presto de ses vacances à Saint-Tropez et l'a fait revenir à Paris pour prendre l'Airbus présidentiel... Quel joli bilan carbone !
La veille, Nicolas Sarkozy a reconnu s'être trompé sur Hadopi, le dispositif anti-piratage numérique : « Je prends d'ailleurs ma part de l'erreur (...) L'intuition que j'avais, c'est qu'on ne pouvait pas (abandonner) les créateurs. Peut-être que la maladresse a été de donner le sentiment que vous étiez attaqués » Les créateurs apprécieront. Nicolas Sarkozy est en guerre larvée avec son propre ministre de la culture, Frédérique Mitterrand. L'éviction/nomination d'Olivier Py, le patron du théâtre de la Ville, en fut l'une des récentes illustrations. Pour l'heure, après avoir fustigé le Web, directement ou par suppôt interposé, le voici si conciliant que l'évidence s'impose. Le candidat flatte l'Internet.
Le Monarque « installait » d'ailleurs un Conseil national du numérique, un nouveau machin administratif de « dialogue » au sein de la filière. Il est chargé « d'éclairer le Gouvernement sur les questions touchant au numérique. » Quelle mission ! On nage en pleine monarchie. Le Palais se créé ses propres corps intermédiaires, sans se soucier de leurs représentativité. Sarkozy est même parvenu à séduire l'un des farouches opposants à Hadopi. Une ouverture toute numérique, à quelques mois d'un scrutin ! Bravo !
Comme souvent, le Monarque en personne a choisi les membres de ce « Medef du Net » et son fonctionnement. Pas question d'y voir trop de têtes critiques. Point de blogueurs ni de Mediapart ou autres sites d'information. Il fallait l'écouter, pendant ses 35 minutes d'intervention publique à l'Elysée. Il lisait surtout son texte. L'aventure numérique est un terrain qu'il maîtrise encore mal.
De l'actualité du moment, comme souvent, Sarkozy n'en a cure. Son propre gouvernement patauge en pleine contradiction.
Gouvernement contradictoire
Prenez Luc Chatel, le ministre de l'Education. Il y a deux ans, il n'avait pas de mots assez durs pour critiquer l'initiative de Ségolène Royal en région Poitou Charente d'offrir des pass-contraceptions dans les lycées. Scandale ! Lundi dernier, le même Luc Chatel était aux côtés de Jean-Paul Huchon, président de la région Île-de-France qui présentait les kits contraceptifs que sa région allait offrir... aux lycées. Allez comprendre ...
Pour qui sait attendre, les contradictions ou les tartufferies se dévoilent d'elles-mêmes. Ainsi sur la question de l'impôt de solidarité sur la Fortune. François Baroin a dû confirmer, mardi soir sur Canal+, que l'allègement de l'ISF serait effectif dès 2011. On n'allait pas gâcher une année pré-électorale ! En revanche, « tout le reste, c’est pour 2012 », c'est-à-dire la suppression du bouclier fiscal. Résumons-nous : pour ces heureux bénéficiaires de l'ISF, le cadeau est pour tout de suite, mais l'effort pour plus tard... Selon le gouvernement, l'ISF rapportera au moins 2,8 milliards d'euros. Pour mémoire, il comptait pour 4,1 milliards d'euros de recettes en 2010, soit 1,3 milliard d'euros de perte fiscale. Le bouclier fiscal se chiffrant à 700 millions d'euros (679 millions en 2009), le cadeau net est de 600 millions d'euros (et 1,3 milliards pour la seule année 2011 !). Et hop ! En ces temps de restrictions budgétaires, le gouvernement a décidément une curieuse conception du partage des efforts...
Il faut réduire le nombre de fonctionnaires. Que n'a-t-on entendu cette maxime depuis 2007 ? D'ailleurs, le nombre de titulaires aura bien été réduit de 100.000 pendant la mandature. En parallèle, le nombre de précaires en CDD a déjà augmenté de 100.000 depuis 2007. Mieux, si on ferme des classes, on va quand même embaucher des citoyens assesseurs pour un résultat plus que contestable.
En effet, 1.500 classes seront bel et bien supprimées à la rentrée prochaine dans les établissements primaires et secondaires, malgré 5.000 élèves supplémentaires attendus. Le ministère de l'Education nationale a dû confirmer l'information en début de semaine. La qualité n'est pas une question de moyens, nous répète-on. A l'inverse, le gouvernement envisage, pour des raisons aussi démagogiques qu'électorales, de doter les tribunaux correctionnels de citoyens assesseurs.
L'ancien Garde des Sceaux Robert Badinter exposait, mardi 26 avril, six arguments pour dénoncer l'entreprise : (1) c'est un coup médiatique, demandé par personne (ni parti, ni association, ni organisation professionnelle); (2) ces assesseurs (deux aux côtés de 3 magistrats) ne seront jamais majoritaires dans les décisions; (3) pour parvenir à ses fins, le gouvernement va au contraire réduire le pouvoir des jurys populaires en créant une procédure d'assises « allégée »; (4) le projet créé une justice à deux vitesses où seules les atteintes aux personnes seront soumises à ces tribunaux mixtes; en revanche, « les infractions aux conséquences les plus graves pour la société, délinquance organisée, financière, fiscale, environnementale, corruption, etc. demeureront l'apanage des seuls magistrats. » (5) C'est la preuve d'une défiance contre les magistrats professionnels; (6) enfin, la réforme va ralentir les jugements.

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