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Lettre ouverte à un ami parlementaire soucieux de l’accès aux soins

Publié le 06 mai 2011 par Santelog @santelog

Lettre ouverte à un ami parlementaire soucieux de l’accès aux soinsLes débats parlementaires autour de la proposition de loi du sénateur Jean-Pierre Fourcade nous donnent l’occasion de poser de salutaires questions relatives à l’accès aux soins et aux rapports qu’entretiennent les médecins libéraux avec la société.

Cette proposition de loi est présentée comme permettant d’apporter des correctifs à la loi HPST et de réconcilier les médecins libéraux avec le gouvernement.

Au sein des syndicats de médecins libéraux la focale est centrée sur la question des déclarations d’absence à laquelle ils sont farouchement opposés en dépit de l’attente légitime du Parlement et de la population d’une réponse à une demande de soins quel que soit le moment ou le lieu.

D’un côté, les syndicats de médecins libéraux utilisent cette mesure pour revenir sur la loi HPST dont les principes organisationnels irritent, de l’autre, députés et sénateurs, souhaitent répondre aux attentes de la population et envoyer un message fort de responsabilité aux représentants des médecins libéraux.

Bien que cette mesure demeure difficilement applicable et ait très peu de chances d’être appliquée, la supprimer reviendrait à bafouer les intérêts de la population.

Remplacer cette mesure symbolique par un engagement à trouver une solution dans la convention médicale serait un marché de dupes : la convention médicale n’a pas répondu au moindre défi depuis des décennies, qu’il s’agisse de l’accès aux soins, de la démographie médicale et de l’organisation moderne des soins. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la loi d’organisation que constitue la loi HPST s’est avérée incontournable.

La convention médicale n’a qu’un objet, dont elle ne s’acquitte qu’imparfaitement : les arbitrages tarifaires. Ainsi, la convention n’a pas su juguler – des esprits provocateurs diraient même qu’elle l’a provoqué – la crise du secteur chirurgical et obstétrical et des retards organisés de tarif pour certains. Pour rappel, le tarif de la prothèse de hanche est inchangé depuis quinze ans.

Pour autant, fixer le tarif (même imparfaitement) est nécessaire. La convention 2011 remplira cet objectif. En revanche, ce qui concerne l’organisation des soins relèvera de déclarations de principe dans son préambule. Relire les conventions médicales successives suffit pour s’en convaincre et prendre la mesure du fossé entre la fiction du récit conventionnel et la réalité de la dégradation de nos indicateurs sanitaires.

Les syndicats de médecins libéraux se sont enfermés dans une posture de refus de tout engagement, de toute responsabilité. La surenchère corporatiste entretenue par la compétition électorale, les pousse à ne chercher dans toute négociation que des augmentations de tarifs sans contrepartie.

Apporter une réponse à la population nécessite de pouvoir s’appuyer sur les professionnels de terrain.

Bien loin des postures syndicales et des calculs afférents, les professionnels de terrain s’organisent. Dans la plupart des secteurs, une réponse s’est structurée entre les professionnels au fil du temps. Il est légitime de parier sur leur sens des responsabilités : ils ne souhaitent pas voir leurs patients rester sans réponse.

Le principe républicain d’une réponse aux demandes de soins doit être assuré. Partant de là, il convient de ne pas décevoir ceux qui font, c’est-à-dire les professionnels de terrain.

Mettre en place une réponse professionnelle locale tout en s’appuyant sur les tours de garde de permanence des soins, relève du bon sens et doit faire l’objet d’une communication auprès de la population.

Ce n’est qu’en cas d’échec de cette organisation qu’il conviendra pour la puissance publique de suppléer à ce défaut de réponse aux demandes de soins par des mesures appropriées et coordonnées par les ARS dont c’est aussi la mission.

Enfin, la parole publique permet de garantir des principes d’action et des lignes de conduite.

Pour conserver la confiance de tous, elle doit gagner en cohérence. La suppression sans un mot d’explication aux médecins des secteurs ruraux investis dans la permanence des soins de la disposition fiscale qui leur était favorable est problématique. Il s’agissait d’un débat technique certes, mais pour les médecins généralistes qui s’investissent dans la permanence des soins en faisant en sorte de répondre aux demandes de soins de la population, c’était avant tout un signal négatif (en même temps qu’une augmentation significative du poids de leur fiscalité).

Dans le contexte de l’incompréhension et de la multiplication des départs des médecins généralistes ruraux notamment, il convient de veiller à ne pas décourager les acteurs de terrain et les bonnes volontés.

De même, l’adjonction par amendement d’un article 22 à la proposition de loi qui permet aux complémentaires santé d’imposer les acteurs de santé de leur choix à leurs adhérents, créerait des marchés captifs de malades à qui seraient imposés leurs prestataires de soins.

Pour l’heure, sauver l’accès aux soins nécessite de mettre en place une nouvelle contractualisation, forte des principes républicains, d’une cohérence et d’une visibilité de long terme, qui mobilise les ARS et les professionnels de terrain volontaires. C’est une voie d’avenir prometteuse qu’il convient d’emprunter sans délai.

Source : Pour un nouveau système de santé.
Contact : Martial Olivier-Koehret, médecin généraliste - [email protected]

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