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Taxi clando et...

Publié le 07 mai 2011 par Bababe

cocotier Sénégal

Taxi clando et...

   Un petit événement  familial  décida  Diaawel de se rendre  à  Ndawkaari où  elle hésitait et désirait aller à la fois.  Est-ce parce que ce voyage a démarré dans un tel contexte qu’il fut suivi de bien de contrastes…
D'abord la déception due à la panne de l'appareil photo de Diaawel lors d’une cérémonie de mariage où le traditionnel prenait exceptionnellement le dessus sur la modernité ou est-ce pour éviter de resservir un sujet sur  le mariage d’une nièce, ou est-ce simplement parce qu’il y a eu déjà un texte entier sur celle-ci.   Mystère !

Toujours est-il que Diaawel a eu un  pincement au cœur pour avoir manqué une photo de la mariée accompagnée de sa tendre mère adoptive, et de quelques unes de ses cousines.

En tout cas ce fut l’occasion pour l’œil de Diaawell, dégagé des images des cérémonies familiales, de s’intéresser à celles de  l’extérieur.   

Ainsi, la traversée d’un nouveau quartier, véritable foret de bâtiments en rangs très serrés, dont les hauteurs ont déjà dépassé de loin les longs filaos et cocotiers qui peuplaient il n'y a pas encore très longtemps ce lieu, retint son attention. Tout comme les légendaires baobabs, décapités pour les besoins de cette révolution du béton.

 Ce n'est guère l'absence des propriétaires à l'extérieur de leur pays ou de leur continent, qui  donne à ce quartier l'allure d'une cité fantôme, mais plutôt la destruction totale des arbres.  Même si la  vie humaine  y est aussi bruyante que les  bêlements obsédants des adorés moutons blancs, qui eux se comportent comme s'ils voulaient changer de continents, cette absence de toute vie végétale  y reste très saisissante.


Changer de continent, un jeune taximan ne semble pas y penser. Il paraît si appliqué et si concentré  sur ce qui reste de sa R4 squelettique à qui il consacre toute son ingéniosité,  qu’il ne donne pas l’impression de se laisser divertir par des rêves inaccessibles. Il a trop à faire pour leur accorder une place.
Au portrait d'un grand marabout collé en haut du pare- brise de la voiture trentenaire, il ajoute juste un début de prière tout en s’appuyant sur ses forces jeunes qu'il tient hardiment à transférer au vieux véhicule. Véhicule qu’il bichonne presque.

 En effet, telle une pirogue, la R4 traverse sans difficulté une grande mare d'eau, témoin des inondations du dernier hivernage,  laissant l'odeur de l'essence se noyer dans celle plus incommodantes des eaux nauséabondes.
Pendant ce temps, une 4X4 qui sent encore l'odeur des mines de Zouerate, rebrousse chemin pour éviter cette désagréable traversée.


Ce qu'un cheval pas du tout bichonné, tirant une lourde charrette, ne peut se permettre.

 Blessé par le mors, l’animal penche sa tête pour soulager sa plaie qui lui fait baver du sang. Ce qui le fait un peu traîner,  et déclencher les coups de fouets de son cocher, un gamin d'à
peine 10 ans.  S'il n'était pas debout, ce gamin serait perdu au milieu de sa charge de sacs de ciment.

 On éprouve de la peine pour l'animal qui souffre, mais quelque chose vous retient pour reprocher au garçon sa cruauté.

Si seulement cet enfant n'était pas devenu adulte trop tôt !

Si seulement le cheval était une cible virtuelle de jeux vidéo de gamins penchés sur leur play station !

 L'état de son t-shirt l'exclut de ces gamins, et  révèle sa condition. L'usure y a presque effacé l'image d’un président qui l'ornait, et  ne laisse plus à ce dernier qu'un œil, et au drapeau, une pâle couleur.

Au milieu de la mare, le cheval refuse d'avancer. Ce qui lui vaut de nouveaux coups de son jeune maître à qui une dame crie qu'il sera roué d’autant de coups le jour du jugement dernier. Comme s'il n'avait rien entendu, le garçon continua de fouetter le cheval pour qu'il avance.

 Peut-être parce que lui sait que si le cheval n'avance pas, son retard lui vaudra des coups beaucoup plus immédiats que ceux auxquels fait allusion la dame.

Peut-être parce qu'il est déjà blasé par le nombre de coups que la vie lui a infligés prématurément.

Le cheval  frappé d’un coup de fouet violent,  avança brutalement dans la mare, éclaboussant au passage, les vêtements de la dame.

Enervée, celle-ci proféra contre l’animal et son jeune maître un de ces jurons spontanés qui rejaillit sur les parents. Et le garçon de répliquer : « Que Mame Yalla t’emporte sur le champ là où Il a emmené ma mère ! »

 

Prise au dépourvue, la dame lança au garçon : « danga hamadi ! » (tu es insolent).

Dans sa voix, il y avait  moins d’arrogance, même si on n’y détectait aucune compassion. Par contre on y décelait une sorte de crainte superstitieuse imputable à la mort soudaine que le garçon lui avait souhaitée.

Le garçon et son cheval étaient déjà loin de la mare et commençaient déjà à soulever de la poussière. Ils ne risquaient plus que de légères brimades de la part de sveltes élégantes, gênées d’être remaquillées  par cette poussière.

 Pareilles aux joyeuses vagues  étalant leur spectacle à la vue de tous, il faut dire qu’on peut rarement éviter ces ravissantes silhouettes de jeunes filles ou femmes qui décorent de leur élégance réputée, toutes les rues des quartiers  populaires ou résidentiels.


* Remarque : dans les maisons ensevelies sous les eaux infectes, d’impressionnants et magnifiques roseaux ont poussé.  Signe d’espoir et de générosité certainement, mais aussi signe de pouvoir de cette nature que nous devrions respecter.

Doyen sur une idée de Safi


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