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Arabes : Besoin de milliards

Publié le 27 mai 2011 par Jcharmelot

Les « révolutions » arabes sont en passe d’apparaître pour ce qu’elles ont été. Des explosions de colère de sociétés qui ont le sentiment que le progrés les a oublié et que des dirigeants obsolètes en sont responsables.

   De simples citoyens en Tunisie et en Egypte sont descendues dans les rues et ont défié les forces de l’ordre pour améliorer leur sort et celui de leurs enfants. Les foules ont demandé plus de liberté et le droit de s’exprimer, mais elles ont aussi et surtout réclamé un avenir: c’est à dire des emplois, et le droit de gagner décemment leur vie. Leur rage, bien réelle, dirigée contre des élites corrompues et incompétentes a été soutenue par des institutions militaires qui ont vu leur intérêt dans un changement de régime.

   Les pays riches ont bien compris ce nouveau défi: si les nouveaux pouvoirs nés de ces révoltes ne tiennent pas rapidement leurs promesses d’un avenir meilleur, les peuples –et surtout les millions de pauvres et de chômeurs– se soulèveront de nouveau. Et il n’y aura plus de tyrans emblématiques à blâmer et à chasser, et des questions fondamentales seront alors posées. Le déséquilibre des échanges Nord-Sud, mais aussi l’injustice systèmique d’une économie mondiale fondée sur le profit, et qui ne se soucie guère de l’équité. De nouvelles violences, plus désespérées, et des vagues migratoires incontrôlées sont à craindre.

   Les monarchies du Golfe, dont les coffres ont été renfloués grace aux prix élevé du pétrole, ont promis des milliards de dollars. Une première tranche de 14 milliards, entre l’Arabie Saoudite et le Qatar, a déjà été débloquée. Et les grandes puissances du G8 ont également assuré qu’elles allaient soutenir l’économie de l’Egypte et de la Tunisie, dont une des principales ressources, le tourisme, a été tarie au moins pour l’année en cours. En tout, les engagements pris pour le moment par la communauté internationale s’élèvent à 40 milliards de dollars.

   Un débat est d’ores et déjà ouvert entre les experts pour savoir comment cet argent promis aux nouveaux pouvoirs au Caire et à Tunis va être utilisé. L’espoir est qu’une jeunesse entreprenante va rapidement démontrer sa capacité à développer de nouveaux secteurs économiques à même de créer des emplois. La crainte est que ces fonds soient dissipés dans les réseaux d’une économie archaïque. Et il est vrai que dans ces deux pays d’Afrique du nord les finances publiques reste opaques, le système des crédits bancaires à peine développé, et l’économie parallèle est florissante. Par dessus tout, un système fiscal incapable d’opérer une redistribution des richesses et des subventions qui font office d’amortisseurs sociaux forment un piège dans lequel les meilleurs intentions peuvent tomber.

   Il a été souvent noté que les « révolutions » arabes n’avaient pas d’idéologies, et c’est bien pour cela que ce ne sont pas des « révolutions ». Les organisateurs de ces mouvements n’ont jamais évoqué ni même envisagé le système économique et social qui devait remplacer l’ordre ancien. Il est temps que les Tunisiens et les Egyptiens s’inventent un modèle autochtone de croissance, pour éviter de reproduire des schémas d’assistanat ou de rentes qui marqueraient la fin de leurs velléités d’autonomie.


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