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« Paroles de Lecteurs » (11/22) : Tigre en papier : idoles et momies (suite)

Publié le 07 juin 2011 par Sheumas

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   Car toute liaison à caractère sentimental ou sensuel est immédiatement jugée suspecte, envahissante et celui qu’ils appellent le grand Timonier, relayé par le dénommé Gédéon, interdit les roucoulades, les coups de foudre et les canons de l’esthétique féminine, nivellement par le bas oblige, (rééducation culturelle des Maos, chasse à l’artiste... quand on a opté pour « la Cause » on « taille dans la petite chinoise » pour parodier le titre du beau roman de Dai Sijie à propos des beautés des romans de Balzac rentrés dans la clandestinité au moment de la révolution culturelle). Un membre honorable de la Cause évitera toute émotion esthétique et consacrera l’essentiel de son temps de son énergie intellectuelle à, selon la délicate expression, « enculer les mouches ». Le style de Rolin est lyrique et en même temps trempé dans cette impatience masculine de la spéculation activiste quand la machine à stencils a chauffé toute la nuit au milieu des tasses de café froid et des mégots écrasés. Autre époque !

   La fille de Treize aux côtés du narrateur plonge avec lui dans le Temps. Et c’est le Temps qui sert de « tapis de sol » aux héros de « Tigre en papier » : et à l’exception de Marie, ils ont tous fait les frais et payé l’addition comme à la fin du Temps retrouvé au moment du fameux bal des têtes, lorsque le narrateur retrouve la société vieillissante qu’il a perdue de vue depuis plus de vingt ans. Comme l’écrit avec cynisme le narrateur, le temps diffuse de la « radioactivité » sur les êtres au point de ravager ceux que la mort a épargnés, hommes et femmes. Rolin n’y va pas par quatre chemins... Il transforme les plus nobles, les plus gracieux en grotesques silhouettes, même le narrateur ne peut plus que se lamenter sur le visage romantique et sauvage de « l’ange des révolutions » désormais évanoui. A ses côtés, Marie qui croise les jambes et fait crisser sa jupe lui tend le miroir de ce que furent pour lui Judith et Chloé, mais comme il l’écrit, « pas touche ! ».

   La fille de Treize est tellement éloignée de lui, elle incarne la modernité, internet, portable, SMS, désinvolture gracieuse, enfant gâtée, ignorance de toutes les références culturelles du vieil homme de lettres qui découvre avec horreur qu’il ressemble à Daladier « un faux-dur qui a cané devant Hitler à Munich, enfin un type à qui on n’a pas envie de ressembler »... C’est pour ça qu’il à la fille de Treize : « Ce qui m’intéresse en vous, c’est la profondeur du futur... Je ne suis que sarcasme pour le passé »

Relisons quelques traits de ce sarcasme...

(p67-68)

   J’en ai fini de cette première partie consacrée aux autres auteurs, j’entre à présent dans la partie qui concerne mes livres, et, par souci d’efficacité, je la traiterai de façon chronologique. J’ai choisi de ne pas consacrer de développement à la partie qui recueille les « essais » parus tout au long de ces années aux éditions Ellipses et qui s’attachent notamment à parcourir l’œuvre de Hugo. Peut-être aurons-nous le temps d’y revenir au moment de l’échange que j’essaierai de ménager après cet exposé.


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