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Moi, Jennifer Strange, dernière tueuse de Dragons - Jasper Fforde

Par Emmyne

519y4WJwJDL__SL500_AA300_Depuis que Jennifer Strange, 15 ans, a été choisie pour tuer le dernier dragon, elle est la personnalité la plus célèbre de tout le pays. Armée de son épée Exhorbitus, elle décide d'aller d'abord discuter avec la créature mythique. Car les raisons de sa mission sont bien moins nobles qu'elle ne le pensait...Devenue une célébrité malgré elle, elle commence à douter de sa mission.

- Fleuve Noir - Collection Territoires -

Ne pas se fier à cette quatrième de couverture, encore moins à l'illustration. Le maître mot de ce roman du maître du roman fantaisiste, c'est humour. Fantaisie, pas fantasy.

Bien-sûr l'univers est à la magie et il y a un dragon, de son petit nom Maltcassion, à pourfendre. Mais cet univers là développe un monde alliant réalité urbaine, économique et politique à l'usage de la sorcellerie.

Dans les faits, la magie de ce roman est une activité professionnelle en déclin. Pas de combat épique, de duel à l'épée ou à la baguette. Si l'enjeu est en effet la disparition du dernier dragon et à travers lui le récit d'histoires anciennes, les conséquences en sont essentiellement financières et stratégiques.

La jeune héroïne de ce roman travaille pour une association de magiciens, une société de services : tapis volants pour livrer les repas, lévitation pour travaux et réparations sans désordre ni saleté, prophétie pour le contrôle qualité en usine..., il s'agit de reconquérir un marché que la population néglige par préjugé sur ces pratiques au profit de la technologie. Ce ne sera qu'à la moitié de ce roman que Jennifer Strange devient Tueuse de dragons, titre honorifique qui intéresse de près les pouvoirs en place : depuis quatre siècles, des dragons vivent dans une immense réserve. Seule la Tueuse de dragons peut y pénétrer. La loi stipule qu'à la mort de l'un d'eux, les barrières magiques ne sont plus actives, les terres de la bête peuvent alors appartenir au premier à en revendiquer une parcelle. Une prédiction circule, relayée par les médias. La mort de Maltcassion est annoncée pour le dimanche suivant. Une foule avide se précipite, les spéculateurs manipulent, les rois préparent une invasion, cette réserve étant une frontière. Dans cette deuxième partie, le ton devient plus grave.

Ainsi, ce roman aborde de sérieuses thématiques contemporaines : le pouvoir économique, le jeu des médias, l'aspect frénétique et mercantile sur les foules, la sauvegarde de l'environnement et des espèces, la course à la richesse au détriment d'une culture ancestrale, la popularité et le merchandising. Comment tout se mêle.

Roman jeunesse, l'auteur déroule subtilement le sujet des choix ( pressions pour tuer ou non le dragon, pourquoi ), celui de la quête identitaire : placée par un orphelinat, si Jennifer Strange ne recherche pas ses parents, en tant qu " Enfant Trouvé " elle n'a pas le statut de citoyen libre mais celui de serf qui se traduit par un bénévolat imposé jusqu'à ses vingt ans. 

A la fois original par le traitement, classique par le fond, ce roman, absolument réjouissant, d'un imaginaire narquois servi par un humour déjanté et décapant, avec des personnages délirants tout en dérision, renouvelle et mélange les genres pour le plus grand plaisir de ses lecteurs.

" A une époque, j'ai été célèbre. On a vu ma tête sur des T-Shirts, des badges, des tasses à thé et des posters. J'ai fait la une des journaux, je suis passée à la télé, et j'ai même été invitée au Yogi Baird Show. Le Quotidien des Palourdes m'a proclamée L'adolescente la plus remarquable de l'année et j'ai été élue Femme de l'année par Mollusque-Dimanche. On a deux fois essayé de me tuer, on m'a menacée de la prison, j'ai reçu seize demandes en mariage et j'ai été déclarée hors la loi par le roi Snodd. Tout cela, et plus encore, et en moins d'une semaine. "

" Le foyer de l'ordre sacré des Bienheureuses du Homard avait naguère été un sombre et humide château médiéval mais, après une couche de peinture et l'ajout de quelques coussins épars, c'était devenu un sombre et humide couvent. Il dominait la Wye, ce qui était agréable, et s'élevait juste au bord de la zone démilitarisée, ce qui ne l'était pas. "

"- Exhorbitus, a dit le vieil homme d'une voix grave et respectueuse. L'épée du Tueur de Dragons. Seul lui-même et son apprenti ont le droit de la toucher. Q'une main non autorisée y pose un seul doigt et pouf !

- Pouf ? ai-je demandé.

- Pouf, a confirmé le vieillard.

- Quark, a dit le quarkon qui comprenait les informations importantes lorsqu'il les entendait. [...]

- Pourquoi s'appelle-t-elle Exhorbitus ?

- Sans doute parce qu'elle a coûté très cher. "

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La couverture VO me paraît plus pertinente et surtout bien moins ciblée.

The_Last_Dragonslayer_by_Jasper_Fforde

- 295 pages - Traduit de l'anglais par Michel Pagel -

- Présentation de la collection Territoires ICI -

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