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Interview: Absynthe Minded

Publié le 18 juin 2011 par Nuagenoir


Interview: Absynthe Minded
Absynthe Minded
Papillons de Nuit 2011, Saint-Laurent de Cuves
11/06/2011
Après être arrivés une heure en retard parce qu'on n'était pas très doués, on a fini par l'avoir, notre interview d'Absynthe Minded. Ce quintette belge dont la pop-rock, jazzy à souhait, connaît des sommets de finesse sur leur quatrième album, nous a gentiment reçu malgré notre impardonnable contretemps. Ils buvaient un coup en face des loges, sous un soleil normand, où l'on a pu causer avec Bert Ostyn, chanteur-guitariste et Renaud Ghilbert, violoniste, tous deux très bavards et détendus. Faute d'avoir pensé à prendre une photo d'eux, on en a emprunté une – il s'agit des deux à droite. Propos recueillis par Jimmy et Laura.
Est-ce un plaisir de tourner en France ?(Ils réfléchissent.)C'est une question à deux balles ?Renaud : Non non, c'est pas une question à deux balles, pas du tout. D'abord, ça a été très dur de pouvoir tourner en France, de se faire connaître en France, donc je peux te dire qu'on en profite et qu'on en jouit chaque minute passée ici. C'était un travail de longue haleine et on n'y est pas du tout encore. On a eu la chance d'avoir un single, Envoi, qui a tourné pendant l'été et on est reconnaissants envers les gens qui font notre promotion et qui nous encouragent.
Justement, il y a un an, avec votre quatrième album, vous aviez pour objectif de conquérir l'Europe. J'aimerais connaître votre bilan.Renaud : Le bilan, c'est qu'on fait une petite tournée européenne début octobre, où l'on va quand même passer par la France, l'Espagne, l'Italie, la Suisse, l'Autriche, et peut-être l'Angleterre. Donc ça commence un petit peu à grossir.
Il y a bon public à l'étranger ?Renaud : Écoute, ça c'est la question à deux balles ! (Rires.) Du public, il y en a toujours, pour la musique de merde comme pour la bonne musique. Il y a des gens qui aiment Chantal Goya ou Mireille Mathieu, et il y a des gens qui aiment Gainsbourg. Il y a toujours un public. Maintenant, peut-être que le public d'Absynthe Minded est plus difficile à trouver, parce que c'est peut-être une musique qui nécessite un bagage, une éducation musicale.Bert : J'en suis pas sûr !Renaud : Moi j'en suis sûr. Je connais beaucoup de gens, dans mon entourage, qui sont fans d'une chanson ou deux, mais pas de l'album, parce que c'est très éclectique. Pour être fan d'Absynthe Minded, il faut avoir une certaine oreille musicale, je pense. (À Bert) Si tu n'est pas d'accord, tu peux le dire.Bert : Je sais pas.
Vous faites cent dates par an et vous sortez pas mal d'album ; c'est pas trop fatigant ?Bert : Cent dates par an ? C'est notre métier. Il y a des gens qui préfèrent jouer les informaticiens. Disons que nous, la musique, c'est notre truc.Renaud : C'est notre vie !Bert : On en joue depuis qu'on est très jeunes. Moi, je ne me vois pas derrière un ordinateur. Déjà, je ne porte pas de lunettes !
Pourquoi votre quatrième album est-il éponyme ? C'est bizarre, pour un quatrième album.Bert : Parce que tu ne peux faire ça qu'une fois dans ta carrière.Oui. Mais il y a des artistes qui le font plusieurs fois.Bert : Qui ?Les Crystal Castles, par exemple.Bert : Crystal Castles ? Vraiment ?Ils ont fait deux albums qui s'appellent Crystal Castles.Renaud : Qui ça ?Bert (à Renaud) : Crystal Castles. C'est un peu electro. Mais, c'était le moment pour nous. Notre quatrième disque, c'est un peu le résumé de tout ce qu'on est.
Vous sentez que vous avez abouti à quelque chose ?Bert : Oui. Disons qu'il y a les mêmes membres dans le groupe depuis sa création (ndlr. En 1999 !). On est cinq et on n'a jamais changé de batteur, de violoniste ou de chanteur, donc pour nous, c'était un moyen de mettre le cachet définitif : « Ça, c'est Absynthe Minded. » C'est sur la pochette, c'est sur le CD.Renaud (avec une voix aigüe) : C'est nouuus !Bert : C'est huit années de travail, et tu le sens dans l'album, je pense.C'est l'album dont vous êtes le plus fiers ?Bert et Renaud : Non.Le prochain ?Bert : Ah oui ! On dit ça à chaque fois. (Rires.)Renaud : Il faut !Bert : Moi j'aime bien le premier, j'aime bien le deuxième, il n'y a pas d'album dont je suis le plus fier.Vous êtes fiers de tous vos albums.Bert : Absolument, c'est un fil qu'on essaie de poursuivre. C'est un travail qui dure depuis dix ans, et chaque album a sa place dans la collection Absynthe Minded.
Vous avez un peu changé de style, quand même.Bert : On n'a jamais vraiment changé de style, on a toujours été éclectique. Depuis le premier album jusqu'au dernier, et le prochain sera aussi comme ça.Le dernier, je le trouve un peu plus jazzy, quand même.Bert : Il est chaud, il est très chaud, il a été bien enregistré.Renaud : C'était un superbe studio, à Paris.Bert : Quand j'étais là pour le mix, c'était super aussi. Il y avait des musiciens manouches en train d'enregistrer. Pour cet album, on avait trouvé ce qu'il y a de mieux. C'est un bon disque parce que tu sens que tout le monde s'amuse. Tout le monde aime jouer de son instrument, il y a beaucoup de moment très chaleureux.Renaud : C'est très live, aussi, parce qu'on a beaucoup enregistré dans une pièce, ensemble.Oui, c'était pas des prises de son particulières.Renaud : Pas pour tous les morceaux. On va dire que la majorité étaient live.
Qu'est-ce que vous pensez de tous ces nouveaux groupes, issus de pays francophones, qui chantent en anglais alors qu'ils ne manient pas forcément la langue ?Bert : Je pense qu'ils feraient mieux de chanter en français. Mais je comprends, parce que l'anglais, c'est la langue internationale. C'est très clair quand t'es Belge : tu ne veux pas rester dans ce petit territoire. Et l'anglais, c'est la langue du rock 'n' roll. Serge Gainsbourg, à l'époque, il était avant-gardiste, parce qu'il utilisait beaucoup de mots anglais.
Vous pensez qu'il y a une particularité dans le rock belge ?Bert : Non.Renaud : Oui. (Rires.) Moi si.Bert : Moi j'aime beaucoup quelques groupes belges, mais c'est personnel.Des exemples de groupes ?Bert : J'aime Deus, Dead Man Ray, Kiss My Jazz, mais je ne suis pas sûr que tu connais ça. Ou Zita Swoon. Ce sont des talents, mais il n'y a pas vraiment de scène belge, je trouve. C'est un petit pays, tout le monde se connaît, et on veut tous jouer en dehors de la Belgique. C'est quelque chose de très important pour les groupes Belges ; ils parlent beaucoup de traverser les frontières. C'est très important parce qu'on est un petit pays, c'est même divisé en deux parties. Quand on va sortir notre prochain album, dans quelques temps, on va faire un club-tour (ndlr. tournée des clubs) en Belgique, et ça va être cinq, six dates, quelque chose comme ça.C'est plus à l'international ?Bert : Oui, c'est ça.Renaud : Chaque groupe belge est différent. Quand tu parles d'une scène belge, ça veut dire qu'il y a un son belge, et ça, je ne trouve pas.Bert : Je pense que beaucoup de musiciens, chez nous, sont assez ouverts aux différents genres. Aux Pays-Bas, c'est plutôt commercial. Il y a par exemple une chanteuse qui s'appelle Anouk, qui peut chanter très bien ; mais elle a un style très américanisé, très pop, très clair. En Belgique, c'est pas comme ça. On essaie d'être originaux, parce que tu dois être original quand tu veux faire quelque chose à l'étranger. Tu peux être le numéro un en Belgique, mais tu ne peux pas vivre de ça.
Ça ne vous dérange pas d'être signés chez une major, maintenant ? (ndlr. AZ, d'Universal.)Bert : Pas du tout. J'ai beaucoup de respect pour les maisons de disques, aujourd'hui, parce que c'est très dur. On peut faire tout nous-même, on l'a déjà fait : on a sorti trois albums en auto-production en Belgique, et même le dernier était sorti en Belgique avant de sortir en France, avant qu'AZ ne rachète l'album. Quand ont veut attaquer un pays comme la France, c'est très important d'avoir une maison de disques, parce que c'est un grand pays. Tu ne peux pas tout faire toi-même.
Les musiciens étaient pressés – ils avaient une session acoustique à faire – donc on s'est dit au revoir et on s'est remerciés. Nous, on a filé au concert de Jon Spencer Blues Explosion.


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