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Les décors renversant de l’Aubette

Publié le 28 juin 2011 par Peregrinationsculturelles

L’Aubette est l’un des bâtiments emblématiques de Strasbourg. Construite par Jacques-François Blondel en 1778 pour abriter un corps de caserne, elle borde tout un côté de la principale place strasbourgeoise, la place Kleber. En 1922, les architectes André et Paul Horn décident de réaménager l’aile droite en un complexe de loisir. Pour cela, ils font appel à des artistes alors au sommet de leur renommée et de leur recherche esthétique au sein du courant De Stijl : Theo Van Doesburg, Hans Arp et Sophie Taeuber-Arp.

Les décors renversant de l’Aubette

Sous la direction de Theo Van Doesburg, ils se partagent les espaces à aménager : ciné-dancing, salle des fêtes, salle de billard, bar, ect, afin de créer une œuvre d’art totale. Rien n’est laissé au hasard, jusqu’aux poignées de portes ou à la typographie conçue spécialement pour le lieu. Les formes géométriques dominent, les murs et les plafonds sont quadrillés et couverts d’aplats de couleurs, à la manière des tableaux de Mondrian.

Ces espaces sont à la pointe de l’avant-garde de leur temps, présentant des formes que l’on retrouve dans les réalisations du Bauhaus ou plus tard dans les aménagements des Cités radieuses du Corbusier.

Lors de l’inauguration en 1928, les décors de l’Aubette sont unanimement salués par la critique et par la scène artistique. Malheureusement ceux-ci ne correspondent pas vraiment au public du lieu, et seront petit à petit remaniés jusqu’à disparaître complètement sous les aménagements ultérieurs, moins de dix ans après leur réalisation. Le contexte économique des années 30 aura eu raison du complexe culturel, qui n’a jamais réellement connu le succès attendu.

Les décors renversant de l’Aubette

A partir des années 1970, la ville de Strasbourg s’intéresse à ce lieu et prend conscience de l’importance pour l’Histoire de l’Art des aménagements réalisés par le trio d’artistes. Des sondages sont réalisés afin de connaître l’état des décors sous les aménagements existants. En 1985, décision est prise de restaurer le monument à partir des restes trouvés, de photos anciennes et des nombreuses études, esquisses et plans réalisés par les artistes et conservés au Centre Pompidou à Paris.

Une partie de l’entresol, l’escalier et le premier étage, constitué de la salle des fêtes, du Foyer-bar et du Ciné-dancing a été rouvert à la visite en 2006, presque 80 ans après leur réalisation. Leur gestion est rattachée aux Musées de Strasbourg.

Plusieurs panneaux présentent aux visiteurs l’histoire du lieu et la vie des trois artistes. Dans chaque espace, un écran discret présente un diaporama de plans et de photos anciennes, ainsi qu’un court texte de présentation. Un petit espace est aménagé en haut de l’escalier où il est possible de consulter une douzaine de fiches succinctes, concernant les courants artistiques des années 1920, la réalisation des décors, ou les étapes de leur restauration. Les informations sont précises, mais quelques fois trop concises. Il manquerait quelques ouvrages en consultation pour les visiteurs désirant assouvir leur curiosité.

Les décors renversant de l’Aubette

La restauration est d’une grande qualité, l’impression que les décors n’ont pas bougé depuis les années 30 est réelle, et l’on s’attend à voir un film de Buster Keaton apparaître sur l’écran du ciné-dancing. Les peintures murales sont plus que des décors et l’on se sent plongé au cœur d’un tableau abstrait.

L’Aubette, aujourd’hui classée Monument Historique, accueille périodiquement des conférences ou des installations, afin de faire redécouvrir aux strasbourgeois une œuvre d’art unique et atypique, à qui l’on donne une deuxième chance d’être appréciée, valorisée et conservée.

Les plus :

  • Une restauration réussie pour une œuvre d’art totale réalisée par des artistes phares des années 1920

  • Des éléments d’interprétation discrets et accessibles

Les moins :

  • Le manque d’informations approfondies, par exemple un ouvrage complet en consultation

  • Un seul étage sur les trois ouverts en 1928 a été réhabilité, et peu d’informations sont disponibles sur ceux qui ont à tout jamais disparus

Infos pratiques :

Entrée gratuite, du mercredi au samedi, de 14h à 18h.

http://www.musees.strasbourg.eu

Visite virtuelle : http://www.musees.strasbourg.eu/index.php?page=aubette-visite-virtuelle

Par C.M.


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