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Sujet école de guerre 2011

Publié le 29 juin 2011 par Egea

Un correspondant m’envoie ce message et je l'en remercie : j’en conclus qu’il s’agit du sujet du jour de l’école de guerre. A défaut, ce serait une excellente préparation.

Sujet école de guerre 2011
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Avec l’instrument militaire, vous ne pouvez pas tout faire. Mais sans l’instrument militaire, vous ne pouvez pas tout faire.

Raymond Aron

Que pensez-vous de cette opinion ?

1/ Le sujet est en d’apparence classique : il témoigne à la fois d’un enracinement mili tout en laissant la place à la culture générale. D’emblée, on pressent que la difficulté consistera à conserver l’égale distance entre le « tout mili » et le « tout culture gé ». Et, de la part des candidats militaires, de ne pas verser dans le tout mili (car un tel sujet, donné à Science Po ou HEC, devrait forcer les candidats à ne pas être trop culture gé). Ainsi, il ne s’agit pas d’une colle de tactique ou de science militaire…..

2/ Deuxième piège apparent, classique, celui du plan qui suivrait l’intitulé trop fidèlement, avec une première partie « avec », une deuxième « sans ». Les lecteurs habituels d’égéa verront là un plan en deux plans que j’aime à recommander : mais la transformation malhabile en plan en 3 parties avec « I avec » « II Sans » « III il faut conjuguer une action globale » paraitrait bien pauvre, me semble-t-il : je crains toutefois que beaucoup de candidats l’auront choisie. Elle n’est pas rédhibitoire mais permettra rarement de briller : on espère au mieux un 12 ou un 13, et on peut choir très vite en dessous de la moyenne.

3/ Le sujet évoque un certain nombre de thèmes qu’il faut relever, par exemple : approche globale, bien sûr, mais il faut tirer au-delà : guerre irrégulière. Actions ONUsiennes (peace keeping, making, building, nation ou state building). Processus de Bonn, Réforme du secteur de la sécurité. Action de l’Etat, efficacité publique, monopole de la violence légitime. Populations. Contre insurrection/ contreterrorisme. Réseaux, info ops. Guerre et économie. SMIP.

4/ Il faut également considérer les cadres géographiques et historiques : qu’on cite Aron et probablement son « paix et guerre entre les nations », qui date de 1964 (de mémoire) suggère que le problème n’est pas nouveau : il faudra donc évoquer la permanence des questions, et leur contingence actuelle. On citera ce SG de l’ONU qui affirmait, à propos de l’intervention au Congo dans les années 1950 : « ce n’est pas un job pour des militaires mais seuls des militaires peuvent le faire ». Cela ouvre une autre perspective : quelles qualités les militaires possèdent-ils qui font leur emploi inévitable ? Géographiquement, on a donc l’Afrique de la décolonisation, mais aussi les Balkans ou l’Irak/Afghanistan post 11 septembre 2011 : là encore, des conditions fort différentes qui présentent pourtant des similitudes.

5/ Enfin, on évoquera aussi le caractère multiple de l’action militaire, qui n’est pas seulement une boite noire (comme le suggère Aron) mais un outil de plus en plus complexe, devant jouer non seulement l’interarmées (Terre, air et mer) mais aussi l’intégration de fonctions nouvelles ou plus prégnantes (multinationalisation, interopérabilité, forces spéciales, psy ops, communication, … ) qui doivent être vues comme des adaptations à ces nouvelles conditions. Voilà ce que vous auriez pu recueillir dans la phase de recherche initiale. Touffu, riche,… c’est la difficulté des sujets classiques et donc « faciles » où chacun aura forcément qq chose à dire. Il faudra donc être assez ample pour couvrir l’ensemble des aperçus, et en même temps tenir le sujet pour « démontrer ».

6/ La technique de composition vous impose ici de construire peu à peu le plan, pour sentir une idée maîtresse/problématique que vous allez préciser pour, ensuite, redonner une articulation très logique au plan. Je rappelle un de mes dadas : une « problématique » est toujours au singulier, c’est LA question qui reprend tous les problèmes soulevés : la question centrale, en fait. Donc, si vous la tournez sous la forme interrogative, ce n’est qu’une SEULE question. Bref, une intro où l’on lit à un moment trois ou quatre questions qui se succèdent n’est pas « carrée », car elle suggère que l’auteur n’a pas su identifier le nœud du problème.

7/ Voici les principales articulations qui me viennent à l’esprit :

  • L’action publique a évolué (Etats, ONU, ONG, mondialisation, terrorisme, FMN, émergents, …)
  • La forme des conflits a évolué : le primat nucléaire rend la guerre « conventionnelle" impossible, suprématie technologique, asymétrie des réponses, guerre au sein des populations, …
  • L’outil militaire a dû s’adapter à cette double évolution
  • Cela permet d’identifier les services qu’il offre, notamment dans la défense d’intérêts distants : sélectivité des cibles, liens avec la gouvernance, maîtrise de la violence, action dans les situations chaotiques, …
  • Pose toutefois la question des buts de l’action politique, qui a plusieurs outils envisageables : militaires, diplo, formation, justice, économique, …
  • Mais aussi de leur mise en œuvre, forcément dépendante des conditions précédemment évoquées, qui n’affectent pas seulement le fait militaire, mais l’ensemble des champs d’action de l’action politique.

8/ On pourrait en tirer une conclusion brillante : « l’action militaire est la continuation de la politique par d’autres moyens, même si ce n’est pas le seul moyen ». La référence clausewitzienne, en conclusion, montre une vraie culture, mais aussi de montrer qu’il y a une certaine permanence de la question, malgré l’adaptation des réponses. Du coup, on en tire la problématique : « comment faire que l’action militaire continue de rendre les services voulus par l’autorité politique, alors que les conditions classiques de son emploi ont profondément changé ? »

9/ Le plan (en trois parties : si ! si !) se déduit de notre travail préliminaire :

  1. L’environnement de l’action militaire a été profondément altéré par rapport au temps de la guerre froide d’où parlait Aron. (A/ Action publique B/ Forme des conflits)
  2. L’action militaire s’est en conséquence profondément transformée, montrant ainsi sa qualité cruciale d’adaptation. (A/ Les manifestations de cette adaptation B/ Ses ressorts = les qualités militaires)
  3. Comme cette double évolution n’est pas suffisante il faut préciser les buts politiques pour que l’action militaire contribue à sa juste à l’efficacité globale à. (A/ Des buts politiques interrogés dans l’ensemble des champs d’action B/ La conjonction des efficacités).

Bien évidemment, il ne s’agit pas ici d’un « corrigé » mais d’une proposition de traitement du sujet. des voies alternatives existent : vous pouvez me les proposer.

O. Kempf


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