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Vers le retour des maisons de correction ?

Publié le 02 juillet 2011 par Alex75

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A l'Assemblée nationale, les députés ont entamé l'examen du projet de loi sur la justice, prévoyant notamment la refonte de l'ordonnance de l'été 1945 sur la justice des mineurs, incluant la création d'un tribunal correctionnel, pour les récidivistes de plus de seize ans, et les délits passibles de plus de trois ans de prison. Mais les critiques sont nombreuses, notamment à gauche, chez les centristes, mais aussi chez les professionnels de l'enfance. Cette approche représente “une rupture avec toute notre histoire pénale“, a ainsi déclaré, en début de semaine, le porte-parole des députés PS. Mais à droite, on entend dire que le projet de texte, ne va pas assez loin. Cependant, la querelle ne date pas d'hier. Elle oppose depuis des années, deux camps se faisant face, sans se convaincre, sans s'écouter même. Il est difficile de tendre à l'objectivité, tant le sujet est récupéré, tout débat se transformant en une bataille de chiffonniers, à coups d'arguments schématiques et de chiffres tronqués.

Vers le retour des maisons de correction ?   Vers le retour des maisons de correction ?

D'un côté, on trouve ainsi les partisans de la justice pour enfants, telle qu'elle fonctionne depuis la célèbre ordonnance de 1945. De l'autre, ceux qui veulent la supprimer. Ceux qui considèrent que les juges pour enfants sont irremplaçables, les seuls à tenir en compte de l'évolution du mineur, de ses antécédents familiaux et autres, et ceux qui ne supportent plus que l'on trouve toutes les excuses du monde, à des gamins violents, multirécidivistes, pathologiques, qui sortent souvent sans encombre des bureaux d'un magistrat pour enfants, pour le moins compréhensif. On trouve d'un côté, ceux qui souhaitent rééduquer, et de l'autre, ceux qui vous rappelent que les jeunes garçons ont toujours été violents, que c'est le propre de l'adolescence, la faute à la puberté, à la testotérone et à la pauvreté. On se souvient dans les années 50 - 60, des “blousons noirs“, expression apparue durant l'été 1959, dans un article de France-Soir.

Vers le retour des maisons de correction ?  

Cette désignation s'impose alors, comme synonyme de “jeunes voyous”, en évoquant le caractère organisé de leurs bandes, caractérisées par leur taille plus ou moins importante, et par leur violence, des asociaux se battant à coups de chaînes de vélo ou de moto, sévissant particulièrement autour des portes de Paris, défendant leurs territoires urbains, et opérant des descentes dans des bals ou des fêtes. Mais l'on trouvera ceux qui vous expliquent que les jeunes d'aujourd'hui, ne sont pas ceux d'hier, que la délinquance a connu un virage, un tournant dans sa nature, au cours des années 1980-90. Il est vrai que l'on trouve souvent, toutes formes de compassions exprimées, d'un côté, lorsque ses délinquants viennent de familles immigrées, alors qu'en face, on trouve ceux qui réclament des sévérités, pour des jeunes qui n'ont aucune reconnaissance, pour la France qui a accueilli les leurs. Mais jusqu'à présent, la gauche a toujours gagné, idéologiquement. Soutenue qu'elle est par les lois et les conventions internationales, que les gouvernements successifs ont signé à tours de bras, soignant leur image humaniste.

Et le conseil constitutionnel veille à leur respect, même si Sarkozy insiste, soutenu par Claude Guéant, ministre de l'intérieur et surtout par les classes populaires de droite comme de gauche, qui en sont les premières victimes. On parle du retour aux anciennes maisons de correction, qui naquirent d'un traité du 10 avril 1869, sous la forme de “colonies pénitentiaires agricoles“, s'agissant essentiellement de maisons privées à la campagne, jusqu'à leur disparition en 45. A savoir, le principe d'une institution destinée à réinsérer des mineurs posant des problèmes de discipline et de petite délinquance. Au XIXe et XXe siècle, l'importance accordée par la IIIe République à l'éducation et à la protection de l'enfant, les premiers travaux de psychologie sur la jeunesse délinquante et la constitution dans les tribunaux de défense des enfants feront évoluer la législation et l'approche de la question, dès l'entre-deux-guerres. A la libération, les anciennes maisons de correction seront remplacées par des centres pénitentiers pour mineurs difficiles, à ciel ouvert, comparable à celui de la dernière scène du film ” Les 400 coups“, de François Truffaut, dont le jeune Jean-Pierre Léaud tente de s'enfuir, poursuivi par un éducateur.

Vers le retour des maisons de correction ?

Depuis près de vingt-cinq ans, nous ne cessons d'expérimenter les politiques les plus diverses, l'éducation surveillée devenant protection judiciaire de la jeunesse, et l'on ne parle plus de maisons, mais de centres d'observation ou de centres de rééducation. En 1997, on voit apparaître des centres d'éducation renforcée. Mais rassurons-nous, cette dernière polémique politicienne n'y changera rien, même si l'humanisme de l'après-guerre a parfois atteint ses limites. On rassurera, mais personne n'ignore que la querelle est largement vaine, car les deux camps sont dans une impasse. La problématique est profonde, complexe. Mais l'on ne réouvrira pas le pénitentier de Cayenne, pour les plus violents d'entre eux, les plus irrécupérables. Des centres pénitentiers fermés en récupéreront quelques-uns, mais “c'est l'absence de solution sur le court terme“, qui confère à cette querelle, son caractère désespéré et désespérant…

   J. D.


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