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DSK-Tristane Banon: les leçons du silence des personnalités et des médias

Publié le 20 juillet 2011 par Copeau @Contrepoints
DSK-Tristane Banon: les leçons du silence des personnalités et des médias

Tristane Banon

A la suite des interrogatoires de Tristane Banon ou de sa mère, Anne Mansouret, menés par la police judiciaire après les accusations de tentative de viol contre Dominique Strauss-Kahn, des faits troublants se font jour. Selon Tristane Banon, une dizaine de personnalités auraient ainsi été averties de ses déboires avec DSK et auraient au final gardé le silence.

Au Parti Socialiste, Aurélie Filipetti a reconnu ainsi avoir été mise au courant de l’affaire et a déclaré avoir conseillé de porter plainte. Cependant, elle a fermement démenti certaines des accusations de Tristane Banon ou d’Anne Mansouret :

« J’ai effectivement entendu parler de cette affaire à l’époque par l’intermédiaire de l’avocat Emmanuel Pierrat, mais je n’ai jamais eu de contact direct avec Tristane Banon, affirme Mme Filippetti. J’ai dû dire à sa mère que si sa fille avait été victime, elle devait déposer plainte. Je ne crois pas avoir dit que DSK pouvait être dangereux pour les femmes, et je ne me souviens pas avoir adressé de mail à Mme Mansouret. »

François Hollande, candidat aux primaires socialistes, aurait lui aussi été au courant selon les dernières déclarations de Tristane Banon. L’écrivain de 32 ans a déclaré aux enquêteurs s’être confié à François Hollande, quand celui-ci l’avait appelé après avoir été mis au courant des agissements de DSK. Si François Hollande a reconnu qu’Anne Mansouret l’avait contacté pour parler de l’affaire, en mentionnant Dominique Strauss-Kahn, il soutient « n’avoir pas souvenir » d’avoir parlé à la jeune femme et déclare qu’il n’avait pas à se comporter en juge :

« Anne Mansouret, que je connaissais, avait souhaité me parler d’un sujet personnel, à savoir que sa fille avait eu un incident avec Dominique Strauss-Kahn, a déclaré M. Hollande au Monde. Elle ne m’avait donné aucun détail, ni demandé quoi que ce soit, et je lui avais répondu que la meilleure solution était que si sa fille avait eu un problème, le mieux était qu’elle en parle à la police. Elle avait souhaité que j’appelle sa fille pour la réconforter, mais je n’ai pas souvenir de l’avoir fait, j’étais même gêné qu’on vienne me parler de cette histoire. Le PS n’avait pas à se comporter en juge, et d’ailleurs, il n’y a eu aucune demande d’enquête interne. »

Auraient aussi été informés, à en croire Tristane Banon, Patrick Poivre d’Arvoir ou le journaliste Philippe Vandel dans les médias. Ce dernier a confirmé que la jeune femme lui avait révélé les faits et a fait état de « pressions terribles » sur son entourage pour que l’affaire soit étouffée:

« Tristane m’avait narré cette histoire début 2003, je pense deux semaines après les faits, explique M. Vandel. Elle était très convaincante. Je l’avais vue avec mon rédacteur en chef, nous lui avions dit que nous ferions un article en cas de dépôt de plainte. Je me souviens qu’ensuite, son avocate, qu’elle avait volontairement recrutée à droite, s’était désistée. Son éditeur avait aussi subi des pressions terribles, et c’en est resté là. »

L’enquête confirmera ce qui s’est réellement passé. Cependant, les bribes qui ont filtré à ce jour donnent à réfléchir sur la loi du silence qui semble régner au sommet de l’État, des partis politiques et dans la presse sur les abus sexuels de certains. Une loi du silence qui va bien au-delà de la simple protection de la vie privée que revendiquent les médias. La presse pouvait s’interdire de révéler que François Mitterrand avait une fille illégitime. Pas qu’il volait les contribuables en la logeant aux frais des français. Les journalistes pouvaient choisir de ne pas parler de relations extra-conjugales, pas d’accusations sérieuses de crimes.

Il est temps que la presse française quitte sa position servile vis-à-vis du pouvoir et remplisse enfin vraiment son rôle, en particulier sur ces questions. Comme l’écrivait le New York Times:

« Countless Franco-American differences of culture have been highlighted by the DSK case — in the judicial system, the press, attitudes to public figures’ private lives, sex and the gravity of a rape charge — but a very fundamental one lies in the relation to authority. French deference to power — with the accompanying conspiracy theories — has encountered the hard-knuckled application of US law as applied equally to anyone accused of a serious crime.

« There are plenty of facts, incidents and complaints — never fully investigated by the French press — to suggest that the serious charges against Strauss-Kahn are not ‘absurd’ and that a young African woman’s voice raised against violent abuse by the powerful should have its day in court. »

Que nos lecteurs se rassurent en tout cas, si la presse française reste dans sa soumission au pouvoir, nous ne tomberons pas dans ce travers et entendons bien les dépasser.


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