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Récit de Voyage : le « Japlish »

Publié le 24 juillet 2011 par Nicolas Koenig

Récit de Voyage : le « Japlish »

Au fil des siècles, les Japonais ont incorporé dans leur langue de nombreux mots et expressions importés de l’étranger. Les mots étrangers provinrent d’abord de Chine, puis, après l’ouverture du Japon aux influences occidentales à l’ère Meiji, d’occident (français et anglais principalement). L’adoption des mots chinois par les japonais correspond à une période de développement culturel, alors que l’adoption des mots d’origine occidentale correspond à une période récente d’essor économique, politique et technologique. Suite à l’effondrement total du Japon en 1945, le pays est passé sous influence américaine, dont il n’a pas encore réussi à se séparer… Ainsi, de nos jours, le vocabulaire importé au Japon de l’étranger est majoritairement d’origine américaine. L’utilisation de l’anglais à la sauce japonaise est aujourd’hui commune au Japon. Elle est activement véhiculée par les media, publicitaires en tête. En effet, les caractères du syllabaire katakana sont couramment utilisés pour la mise en valeur des informations : l’usage de vocables américains assure un plus grand impact visuel auprès des consommateurs et apportent un effet « fashion » qui fait fureur.

Récit de Voyage : le « Japlish »
L’aspect le plus décrié de cette américanisation de langue japonaise, bien que le plus amusant, est l’usage de mots mal orthographiés (les fautes reposant souvent sur la confusion par les Japonais entre les lettres L et R qui se prononcent de la même façon) et un usage (très) approximatif de l’anglais. Dans l’exemple ci-contre, on lit « creaner » au lieu de « cleaner », bien que le titre en katakana soit correct (kuri-na-). Autre exemple, dans un menu d’un restaurant de Tokyo, on pouvait lire « fresh garbages » au lieu de « fresh cabbages ».

Récit de Voyage : le « Japlish »
L’élaboration d’expressions, slogans à usage publicitaire et à effet de mode, titres de chansons, etc. est aussi très touchée par ce phénomène. Dans ce cas, l’anglais et francais ne sont utilisés que pour leur valeur sonore ou visuelle (quelques exemples : « all of your base are belong to us »", ou « is forbidden to steal hotel towels please. If you are not a person to do such thing is please not to read notis »"., voire pour « antrer pousser la porte », ou encore « perfums de créateurs », photo prise dans le quartier de Shibuya), au détriment de toute considération de sens ou de grammaire. Certaines expressions sont même rentrées dans les registres officiels, comme la célèbre Golden Week, qui désigne une semaine de congé nationale au début du mois de mai chaque année.

Au-delà du contenu purement publicitaire et souvent humoristique de cette fusion anglo-franco-japonaise, on pourrait y voir une représentation du malaise ou des difficultés qu’éprouvent les japonais à exprimer leurs sentiments et leurs opinions personnelles en société, leur incapacité à sortir des sentiers battus face l’oppressant conformisme nippon. En dehors de cette utilisation commerciale de l’anglais ou du français, la plupart des japonais est incapable de parler un anglais ou un français correct. Souvent, ils le com- prennent plus ou moins, mais n’arrivent pas à s’exprimer : trop différentes de leur culture, ils n’arrivent pas à penser dans ses langues et à exprimer leurs nombreuses idées avec un nombre de mots réduit, comme ils le feraient dans leur langue maternelle. De ce fait, la société japonaise est souvent considérée comme hautement xénophobe et nationaliste, voire fermée, ce qui en réalité est totalement faux. Pour peu que l’on arrive à se faire comprendre, les japonais sont si aimables et serviables auprès des gaijin (étrangers), que cela en deviendrait presque gênant…


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