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Les Poupées Russes. Le dernier livre de Siri Husvedt, Un été...

Publié le 03 septembre 2011 par Mmepastel
Les Poupées Russes.
Le dernier livre de Siri Husvedt, Un été...

Les Poupées Russes.

Le dernier livre de Siri Husvedt, Un été sans les hommes, est comme d’habitude chez l’auteure, extrêmement sophistiqué, admirablement construit (malgré le fouillis apparent), richement lesté de références littéraires et philosophiques multiples. À la différence des autres toutefois, il se distingue par une place plus grande faite à l’humour, la légèreté. Elle entrouvre les portes cette fois, l’air circule. C’est aussi ce qui le rend attachant, agréable à lire, car on ne sait pas trop où elle nous emmène avec sa galerie de personnages.

Il y a bien-sûr Mia, l’héroïne-narratrice, qui après une escapade extra-conjugale de son mari a “pété les plombs” comme on dit jusqu’à se retrouver internée et qui essaie de se retrouver, de se reconstruire en passant un été dans une maison louée auprès de sa mère et de toutes ses amies de la maison de retraite. Poétesse, elle entreprend de donner des cours d’écriture à quelques adolescentes du coin. Dans son voisinage, il y a aussi une mère, ses deux jeunes enfants, dont la petite Flora et leur père instable.

Vous l’aurez compris, Siri Hustvedt s’attaque à la question de l’identité, et plus particulièrement, l’identité féminine. Pour cela, bonne pédagogue, elle a pris soin d’habiter sa fiction d’une myriade de femmes de tous les âges pour illustrer les différentes étapes d’une vie. Car Mia, qui, son moi en morceaux, en s’intéressant aux autres femmes de son entourage, va recomposer le sien. Grâce à l’empathie, la solidarité. En comprenant les broderies licencieuses et cachées d’une vieille dame, elle entrevoit la sexualité brimée des femmes d’une autre époque ; en observant la petite fille de la voisine qui se cache sous une perruque, elle retrouve le désir de jeu de l’enfance, le besoin de protection ; en assistant aux rivalités cruelles entre adolescentes, elle se remémore la sienne. Etc…

Ainsi, toutes ces femmes, petites filles, adolescentes, mères, grands-mères, portent en elles les éléments d’un puzzle qui vont l’aider à se retrouver, face à l’homme de sa vie qui l’a questionnée et fragilisée en la propulsant dans le rôle ancestral de l’épouse-délaissée-pour-une-plus-jeune. Comme si, Mia, remplie de mots, en écoutant ceux des autres, s’en emplissait encore jusqu’à tous les contenir, pour jouer encore à les agencer. Comme si Mia, telle une Poupée Russe, contenait déjà toutes ces femmes, leurs souffrances, l’éternel combat de leur statut face à celui de l’homme.

Un été sans les hommes est donc un livre féministe comme son titre pouvait le laisser suggérer, mais ce n’est qu’une parenthèse ; ce n’est pas un féminisme niais, binaire et belliqueux, c’est une parenthèse initiatique qui ne prône pas le divorce d’avec les hommes. La fin du livre, happy end tamisé, est d’ailleurs très ambiguë et laisse la question en suspens. À chacune de se tricoter une identité féminine sans s’écraser ou se laisser bafouer, sachant que l’identité-même est sans cesse mouvante, jamais figée, et qu’il faut faire avec.

darksilenceinsuburbia:

Raquel Aparicio. Madriz.


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