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Crise ou Justice: Sarkozy joue à cache-cache

Publié le 08 septembre 2011 par Letombe
Crise ou Justice: Sarkozy joue à cache-cache

Il nous reste 241 jours avant l'élection présidentielle. A l'Elysée, on nous raconte une histoire. Celle d'un Monarque attaché à faire son job jusqu'à la dernière minute, désintéressé de sa survie électorale, tout occupé à son devoir de « justice » et d' «autorité », si tenace qu'il vaincra, demain bien sûr, le chômage, comme il a vaincu le dictateur Kadhafi. Ce n'est qu'une histoire. Quelques journalistes la démontent jour après jour. D'autres s'en amusent.
Jeudi 8 septembre, Nicolas Sarkozy prend l'avion pour aller inaugurer un train. Il ne montera qu'à Dijon dans le nouveau TGV Rhin-Rhône. Il a aussi interdit aux élus locaux toute prise de parole lors de cette célébration.
Le narcissisme se loge dans ces petits détails.
Sarkozy arrose
Sarkozy a sans doute retourné Dominique de Villepin. Son ancien ennemi ne parle que pour vendre son livre. L'attaque est plus douce, la critique très terne. Il soutient même la règle d'or de son ancien ennemi. Dans l'attente du nouveau procès Clearstream, le Monarque lui avait confié quelques missions d'approche en Tunisie et en Libye cet été. Une façon de flatter et de valoriser l'ancien premier ministre pour mieux le neutraliser en vue du scrutin de 2012. A quoi bon cette nième diplomatie parallèle si ce n'est pour s'accommoder le récalcitrant ?
A l'inverse, un ancien proche du Monarque s'est presque fait « licencier » une seconde fois de Sarkofrance. Il a été viré de l'Elysée l'an dernier, suite à l'affaire des rumeurs d'adultère au sein du couple Carla/Nicolas. Puis confortablement placardisé dans un fauteuil au Conseil économique et social et un mandat facilement acquis de conseiller de Paris. Pierre Charon a quand même été « suspendu » pour dissidence de l'UMP ce mercredi. Il maintient sa candidature aux prochaines sénatoriales, en Ile-de-France. Contre sa rivale Chantal Jouanno, le cuistre lâcha l'une de ses formules qui affectionnent et qui ne gênaient personne à l'UMP quand il faisait partie du premier cercle sarkozyen: « Qu'elle soit sur les tatamis ou au lit, elle est tête de liste. Elle sera donc élue ! »
Mais le licenciement reste doux. Pierre Charon n'est que « suspendu », pas encore exclu. Sarkozy a l'habitude de virer des préfets pour moins que cela. Charon a des secrets. « A-t-il quitté l’Élysée de Sarkozy en piquant la clé de la force de frappe nucléaire et tente-t-on de la lui reprendre sans dommage ? » s'interroge Bruno Roger-Petit.
Sarkozy a des états d'âmes
Nicolas Sarkozy s'exprime peu... mais parle beaucoup. Chaque jour, une salves d'articles et commentaires, qu'il y est eu déplacement ou pas, nous décryptent, citations à l'appui, les états d'âme du candidat. Ceux de la semaine sont particulièrement croustillants :
« Quand on fait la guerre, on ne s'occupe pas de la prochaine élection». La boutade a beaucoup fait rire. Elle émane d'un conseiller anonyme de Nicolas Sarkozy, Brice Hortefeux. 
Sarkozy aurait donc des sujets plus graves à traiter que sa candidature. Mardi, le Monarque n'était même pas là pour défendre son plan de rigueur. Même Charles Jaigu, l'accrédité du Figaro à l'Elysée, n'y croit pas une seconde: « On connaît l'adage: n'en parler jamais, y penser toujours ». D'ailleurs les confidences sur l'état d'esprit du Monarque se multiplient dans les médias. Dans le Parisien, Sarkozy se félicite des sondages: «J’ai retrouvé mon étiage, je suis passé de 19 à 25% ». Il « grignote lentement des points ». « Je ne veux pas être favori. Je veux faire mon travail, laisser les autres batailler » aurait-il lâché.
Au Figaro, on confie que pour notre Monarque, « les nominations ou les affaires (...) ne sont que des clapotis dans un seau d'eau». Les juges qui enquêtent sur le financement de sa campagne en 2007, les rétrocommissions des ventes d'armes dans l'affaire Karachi, les menaces de mort contre un journaliste, l'espionnage d'un autre, seront ravis de l'apprendre.  Ces scandales qui s'accumulent sont aggravés par une politique fiscale qui préserve au mieux les plus riches. A l'Elysée, ses sondeurs lui conseillent d'axer sa campagne sur la « justice » et « l'autorité ».
Le candidat Sarkozy aura beaucoup d'effort à fournir....
Quelle justice ?
Mercredi soir, Michèle Alliot-Marie, ancienne ministre de Nicolas Sarkozy débarquée pour incompétence diplomatique et conflits d'intérêt,  s'exprimait dans le Grand Journal de Canal+. En juillet 2010, elle était Garde des Sceaux, quand quelques barbouzes mandatés par l'Elysée espionnèrent le journaliste Gérard Davet. MAM bafouilla une excuse: « Je suis mal placée pour en parler. La justice se prononcera. Il faut lui laisser faire son travail. »
La justice est au coeur des déboires de Ziad Takieddine. Cet homme d'affaires si proche du premier cercle sarkozyen risque un contrôle fiscal. Un porte-parole de Bercy a expliqué qu' « Un contrôle fiscal est bien en cours depuis octobre 2010, soit bien avant que n'éclate la polémique ». En juillet dernier, Mediapart avait publié ses déclarations d'impôts depuis 2002, après avoir révélé qu'il avait reçu quelques 200 millions d'euros de commissions occultes grâce au gouvernement d'Edouard Balladur, validées par son ministre du budget Nicolas Sarkozy. Mardi, le site d'information a accusé « des faits de corruption au plus haut niveau de l'Etat et des versements d'argent à François Léotard ». Et il publie le contrat de vente de frégates à l'Arabie Saoudite, « dont toutes les dispositions financières ont été validées par le ministre du budget d'alors, Nicolas Sarkozy, prévoyait le paiement de l'équivalent de 213 millions d'euros de commissions à M. Takieddine et ses partenaires ». Cette fois-ci, l'information sort dans les « grands médias ».
En Libye, une ONG trop curieuse ont retrouvé des documents quelque peu compromettants pour les diplomaties occidentales. En France, on feint l'innocence. « Sarkozy le Libyen », comme l'a baptisé une journaliste britannique du Guardian, ne veut pas qu'on ternisse sa victoire en Libye. La guerre gagnée là-bas est son trophée, l'unique, un exemple de sa « ténacité ». Vendredi dernier dans les Vosges, il l'a rappelé. Il se battra contre le chômage avec la même ténacité qu'en Libye. La comparaison est crétine. Qui compte-t-il bombarder cette fois-ci ? Les chômeurs ou pôle emploi ?
Sarkozy se couche
Nous l'écrivions le weekend dernier. C'est désormais quasi-officiel. Sarkozy s'est couché. Bravache en août, il avait promis un Congrès pour faire voter sa (fausse) règle d'or et « piéger » la gauche. Mais il a compris qu'il courrait à l'échec. Il ne prendra pas le risque de déstabiliser un plus les marchés déjà pas convaincus par sa politique économique. Les élus d'opposition ne suivront pas. Sarkozy a joué avec le feu, en voulant instrumentaliser ce sujet à des fins électorales.
En Sarkofrance, il faut habiller une défaite en victoire, quitte à réécrire l'histoire. Ainsi, Sarkozy reste « déterminé », nous a-t-on rapidement expliqué. « La détermination du président sur la règle d'or est intacte ». Valérie Pécresse a complété l'argumentaire de défaite: « Nous sommes dans une démarche qui consiste à faire adopter la règle d'or par la voix classique qui est celle du Congrès (...) Mais cette décision dépend du président de la République, la convocation du Congrès, il attendra le moment venu ».
Mercredi après-midi, Nicolas Sarkozy a pris sur son temps pour convier les députés dépités de son camp à l'Elysée. Il fallait les convaincre, à quelques heures du vote final. Qui a parlé d'« autorité » en Sarkofrance ? Le soir, ils n'étaient pas nombreux dans l'hémicycle: 163 voix pour et 97 voix contre. Sur 577 députés... Quelle « autorité » !
A l'Assemblée, les députés ont donc voté le plan d'aide à la Grèce (15 milliards de prêts à faire dans les prochaines mois). Le risque de déstabilisation de la zone euro et des banques françaises est trop grand. L'UMP a aussi adopté le plan de « micro-rigueur maxi-injustice » de Fillon/Sarkozy, à savoir: le doublement de la taxation des mutuelles solidaires (un milliard d'euros de recettes espérées, dès cette année, soit +3,5% pour la quasi-totalité des mutuelles), la fin du bénéfice mondial consolidé, la hausse de la CSG sur les revenus de remplacement (600 millions d'euros), la temporaire taxation de 3% des revenus supérieurs à 500.000 euros annuels (pour 2012), un léger relèvement de 1,2 points des prélèvements sociaux sur les revenus du capital, la taxe de 2% sur les nuitées d'hôtels supérieures à 200 euros (en échange du relèvement de la TVA sur les entrées des parcs à thèmes), et, entre autres, la fameuse « taxe soda ».
A l'Elysée, il fallait aussi calmer l'inquiétude sociale. Le pouvoir d'achat a pris un coup cette année. Les loyers flambent, et l'on fait mine de le découvrir cette année: +24% en 10 ans, alors que le revenus des locataires a stagné. Et les impayés augmentent. Par ailleurs, le gouvernement craint d'augmenter le gaz. Le 1er juillet dernier, un gel des tarifs avait été décidé. Il devrait être prolongé. Au grand dam de GDF-Suez qui espérait répercuter la hausse du prix de l'énergie. Son PDG, Gérard Mestrallet, a estimé à 340 millions d'euros la perte pour son groupe sur le seul 4ème trimestre. Le gouvernement est pris au piège: Nicolas Sarkozy a trahi ses promesses, en acceptant la privatisation de GDF. Mais il refuse à l'entreprise la liberté commerciale. Quelle cohérence ? Aucune.
Plus que 241 jours avant le Grand Vote.
Ami sarkozyste, où es-tu ?


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