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Le choc des contrastes

Publié le 12 septembre 2011 par H16

Aujourd’hui, j’ai décidé de vous proposer quelques réflexions décousues, mais sans crêpes au sucre. C’est la crise, que voulez-vous. Et comme vous allez le constater, il va y avoir du contraste.

Commençons doucement.

Enfin, doucement, c’est façon de parler. Etant donné que la situation est, soyons franc, catastrophique, commencer sur du velours représente un vrai challenge que je ne relèverai pas. Je vais donc me borner à reprendre quelques éléments (déjà présents dans mon précédent billet).

Ce lundi risque donc d’être agité si l’on en croit les rumeurs de plus en plus insistantes concernant Moody’s et les banques françaises : l’agence de notation avait précédemment placé les établissement bancaires du pays sous observation négative et se préparerait — gasp, horreur, déhanchements et fourchettes en plastique — à dégrader leurs notes.

Pour ceux qui lisent les journaux traditionnels, c’est (un peu ?) la grosse surprise. Pour ceux qui écoutent Trichet, Lagarde ou Baroin, c’est encore plus fort de café et ça sent même une nouvelle opération fourbe de la perfide Albion et des vils Amerloques pour torpiller les fleurons de la Banque Fraônçaise.

Pour ceux qui se tiennent vraiment au courant, apprendre que Moody’s va dégrader la SoGé, la BNP et le Crédit Agricole est plutôt un soulagement : enfin, il était temps et peut-être cette petite claque va-t-elle réveiller les établissements qui ont eu, pourtant, tout le temps de se débarrasser des actifs pourris qu’ils avaient gobés comme des smarties pendant les années fastes.

Lagarde, c'est youpi.
Et pour le contraste, regardons ce que fait, justement, Christine Lagarde : elle arrondit les angles qu’elle avait pourtant taillés à la hache quelques jours avant, dans de grands mouvements amples et souples qu’une ex-championne de nage et de pipeau gouvernemental maîtrise parfaitement.
Nous avons donc d’un côté le FMI qui a dit « Oh, gosh, il faudrait 200 milliards de recapitalisation vite vite pour vos banques, là, elles puent un peu », puis, quelques jours plus tard « Oh, gosh, on a des différents sur nos méthodes de calcul ». Et de l’autre, on découvre Moody’s qui nous explique que finalement, oui, nos banques, elles puent un peu.

Vous voulez un autre contraste ? Tenez, prenez la Grèce, qui sait que son heure est venue. Oui, elle n’a plus un rond. Oui, son état gratte les fonds de tiroir pour payer les salaires et a abandonné toute velléité de faire croire qu’il va trouver une solution. Tant et si bien que les Allemands, bientôt suivis des Néerlandais, planifient déjà leurs petite opération « Bye Bye Papandreou ». Ils ont compris qu’ils ne reverraient pas leur argent, que ce pays est foutu (comme un autre qui ne perd rien pour attendre, du reste) et qu’il valait mieux arrêter les frais.

Choc des contrastes, le gouvernement grec rassemble ses dernières énergies et dégote … une nouvelle taxe immobilière. L’Acropole s’écroule, les dirigeants grecs achètent du plâtre et un petit transistor pour travailler en musique. Car pour eux, cette taxe, « C’est la seule mesure qui puisse être mise en oeuvre immédiatement et produire des résultats rapides car elle ne dépend pas du mécanisme de collecte des recettes fiscales. » Parce que, comprenez-vous, diminuer immédiatement les dépenses d’un état obèse … Ce n’est pas possible.

On pourrait croire que l’Europe, malade d’un trop plein de Grèce, aurait la présence d’esprit de se recentrer sur son action intérieure et éviter d’éparpiller ses deniers à droite et à gauche. Rassurez-vous, il n’en est rien : on trouvera bien 38 milliards de dollar à la Libye. Qui a déjà coûté un pont à la Fraônce, éternelle et merveilleuse république qui n’a jamais fricoté avec les dictateurs et qui n’a pas du tout lancé une invasion terrestre pour récupérer une partie du pétrole qui sera produit prochainement par le nouveau gouvernement.

Mais au-dessus de ces bisbilles, de ces batailles de chiffre et de ces chicaneries de gamins, deux têtes se lèvent, fières et hautes, pour nous indiquer la voie à suivre en faisant bouger leurs lèvres et en émettant des sons.

La première tête, bien sûr, c’est celle de Jacattali. Il s’agit d’un bon client pour ce présent blog. Comme il pense très fort avec toutes ses neurones (mais vraiment très fort), il produit régulièrement des petites volutes de fumée que des journaux reproduisent religieusement. L’odeur complexe d’encens et de naphtaline que ses textes produisent a en effet un fort pouvoir anesthésiant sur les réflexions des politiciens qui les lisent et qui n’ont pas, il est vrai, toutes les capacités requises pour encaisser ce genre de vapeurs hallucinogènes.

La crise, Attali y a pensé. A de multiples reprises. La crise, il l’a vue venir. Il l’avait prophétisée. Il en a décrit, le premier, les symptômes et les causes. Il a aussi expliqué pourquoi c’était pas comme ça qu’il fallait faire. Il a tout capté, Jacques. Alors Jacques, dans un dernier sursaut, nous détaille un scénario, celui du pire.

Et comme une horloge arrêtée qui indique obstinément l’heure exacte deux fois par jour, le scénario du pire qu’il nous livre n’est pas dénué de fondement. Résumé, cela donne ceci :

  1. La Grèce fait faillite. Les banques prêteuses sont dans un gros caca chaud.
  2. Zut, les européens tergiversent et refusent de créer les Eurobonds. Qu’ils sont cons, ces européens !
  3. La Grèce est abandonnée à son sort. C’est très triste.
  4. Les autres pays qui se sont gavés de dette sont à leur tour dans un caca. Tiède.
  5. La France les rejoint. Oh. La piscine de caca s’agrandit.
  6. Les banques françaises barbotent dans le caca à leur tour.
  7. La BCE, paniquée, hélitreuille quelques banques hors du caca.
  8. L’Allemagne, qui paye pour le fioul et les pilotes de l’hélitreuillage, fait sécession de l’Euro.
  9. Explosion de l’Euro, mais les banques anglo-saxonnes, aussi mouillées que les autres, rejoignent la piscine de caca.
  10. Effondrement complet du système financier. Distribution de caca pour tous.

Comme on peut le voir, c’est, à quelques détails prêts, presque réaliste. Pour rappel, les Eurobonds seront créés bien avant que les sprinklers à caca se mettent en marche, et ces bons ne nous sauveront pas d’une inflation galopante.

Mais notre Grand Homme arrive tout de même, dans les dernières lignes de son scénario, à nous dévoiler le fond de sa pensée : pour éviter que ces 10 points arrivent, il suffit … de faire travailler le Parlement Européen sur une Constitution. Et zou, en voiture Simone pour le fédéralisme et le gouvernement global.  Au moins, la vision est claire : puisque plein d’états foutent un bordel indescriptible, ajoutons une couche solide et bien épaisse … d’état. Après tout, ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, et nous ne sommes pas encore morts de nos états pléthoriques et obèses.

Violence du contraste, mais toujours sur le registre du n’importe quoi déguisé en pot de chambre : Ségolène Royal nous présente son Contrat avec la Nation.  Je suis surpris de ne pas trouver de clause de non-concurrence dans son magnifique torchon communicationnel (trop anti-démocratique, je suppose), mais je regrette qu’une clause de dédit n’y soit pas : chaque euro de déficit ou de dette supplémentaire créé par la présidente ou les membres du gouvernement devrait être retenu sur leurs salaires et indemnités, par exemple. Rigueur budgétaire immédiate.

Royal : la champagnitude attitude

D’un côté, la France nous offre donc des Penseurs en Roue Libre, compulsifs d’un méta-gouvernement mondial, dont la solution n’est qu’une amplification monstrueuse des recettes déjà appliquées et dont on a pu mesurer la terrible efficacité. Et de l’autre, la classe politique nous offre du Clown À Roulette Qualité Las Vegas, dont les solutions se bornent à répéter de façon mécanique des mots-clefs comme des mantras d’exorciste, pendant qu’une tempête se déchaîne. C’est impressionnant.

Mais faisons-nous une raison. Tout ne va pas si mal.
Il pourrait y avoir une guerre thermonucléaire en plus.


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