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Rouge majeur de Denis Labayle. Le peintre Nicolas de Staël au cœur d'un roman

Par Mango
Rouge majeur de Denis Labayle. Le peintre Nicolas de Staël au cœur d'un romanRouge majeur de Denis Labayle
(Editions Dialogues, mai 2011, 215 pages)
Rouge est le dernier tableau de Nicolas de Staël, celui qu’il n’a pas terminé quand il s’est défenestré à Antibes où était son atelier, le 16 mars 1955.
Ce tableau, c’est «Le Concert». Onze jours avant son suicide, le peintre avait été bouleversé par la musique d’Anton Webern,  au théâtre Marigny, à Paris. Il n’avait alors eu de cesse de tenter de  reproduire sur sa très grande toile l’émotion artistique qui l’avait envahi.
C’est à partir de ces faits réels que le roman de Denis Labayle est organisé.
Il imagine que huit ans après son débarquement en Normandie, un jeune journaliste américain retourne en France avec l’espoir d’y retrouver une femme qu’il a aimée pendant la guerre. En réalité il est envoyé par son journal auprès du peintre devenu célèbre pour connaître l’influence des femmes sur son œuvre.
Les deux hommes se rencontrent au concert, sympathisent et vont vivre ensemble dans l’atelier du peintre les dix derniers jours de sa vie. Ils ne se comprennent pas, ne s’aiment pas vraiment et ne sont ensemble que par intérêt, nécessité et curiosité pour l’un et par peur de la solitude pour l’autre.
L’Américain retrouve la femme qu’il aime et qui quittera tout pour lui. Entre temps il vole un tableau du peintre qui, lui, à l’inverse,  perd à la fois son inspiration, croit-il,  et plus sûrement encore sa maîtresse dont il est fou, celle du «Grand nu bleu», le modèle pour qui il a abandonné femme et enfants. Il est dans une solitude totale, avec ses seuls tableaux, ses souvenirs d’enfance traumatisants et son insatisfaction chronique quant à son talent. Son dernier geste demeure une énorme interrogation face à une œuvre inachevée. Il avait 41ans.
J’ai aimé tout ce qui évoque la réalité du peintre, les allusions à sa vie, à ses tableaux, à ses amours, bref, j’aspire à une biographie. L’enrobage du roman m’a beaucoup moins convaincue.
Rouge majeur de Denis Labayle. Le peintre Nicolas de Staël au cœur d'un roman
"L'artiste doit répudier la toile terminée le plus tôt possible, afin qu'elle ne serve pas de modèle à la suivante. Ma peinture se situe comme ma vie, dans un espace étroit entre l'ordre et le chaos. Je fuis le stable, le simple, toujours trompeur. Il y a quelque chose de mort dans le parfait défini. L'art doit être recherche, aventure, instabilité. Une toile réussie est une toile sui bouscule l'esprit jusqu'au vertige. Sans vertige, pas de génie. Comment pourrais-je atteindre le hasard en m'entourant de certitudes?  Chez moi, tout est déchirure. J'aime le chaos ordonné."
"Plus la toile est grande, plus le regard la transperce. Et moi, je n'ai de réels élans qu'en grand format." (lettre à Jacques Dubourg, 26 novembre 1954)
Rouge majeur de Denis Labayle. Le peintre Nicolas de Staël au cœur d'un roman
Les couleurs
"Velasquez utilisait  vingt-sept noirs différents... Et moi, des gris, j'en ai dénombré près de cent.
Le bleu, c'est une aspiration  vers l'inconnu. J'ai toujours aimé cette apparition de l'infini sur terre. Quand tu fixes un ciel bleu,tu vois la réalité abstraite en mouvement. Mais pour cette nouvelle toile, je cherche autre chose. Le rouge me fascine autant qu'il m'inquiète. Je l'ai longtemps tenu à l'écart ou utilisé par touches, avec parcimonie. Mais depuis quelque temps, cette couleur m'envahit. Pour Le Concert, le rouge s'impose comme une évidence. J'ai rendez-vous avec lui et je crois que je vais m'y rendre."
"Je dois peindre les notes d'une nouvelle symphonie et je ne suis pas sûr de cet effet figuratif. Plus l'orchestre prend forme, plus j'hésite. Ces instruments m'emprisonnent. Je dois les dépasser,mais jusqu'où aller pour les rendre à la fois visinles  et parfaitement audibles.... Je marche comme un funambule dur le fil des émotions."
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Rouge majeur de Denis Labayle (Editions Dialogues, mai 2011, 215 pages)

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