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Genève, berceau de l’utopie

Publié le 20 septembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Congrès de philosophie à Genève. Pour les bâtisseurs d’utopies, les libéraux sont trop modestes et pessimistes sur la nature de l’Homme. Et en deviennent impardonnables.

Par Guy Sorman, depuis Genève, Suisse

Genève, berceau de l’utopie
À Genève, un Congrès de philosophie, ce qui est devenu, en notre temps, l’art d’énoncer des banalités dans un langage compliqué. Je découvre, sans vraiment m’étonner, un front uni contre le libéralisme : celui-ci est forcément qualifié d’ultra, alors que mes interlocuteurs altermondialistes, marxistes, écologistes et trotskystes sont évidemment modérés.

Pour eux, le libéralisme est l’idéologie du grand capital et le masque de la spéculation. Est-il bien nécessaire d’expliquer que les libéraux sont avant tout les fondateurs de la démocratie et soutiennent l’économie de marché parce qu’elle arrache les hommes à la pauvreté de masse ? Ce ne sont là que des faits et la réalité ne passionne pas ces philosophes, à Genève surtout, berceau des utopies, celle de Calvin et de Jean-Jacques Rousseau.

L’hostilité contre le libéralisme vient, je crois, de l’idée – un postulat mais empirique – que les libéraux se font de l’Homme : ni bon, ni mauvais et souvent les deux à la fois. Les libéraux se demandent donc, depuis trois siècles, comment une société peut-elle fonctionner civilement, sachant qu’elle est bâtie avec le « bois tordu de l’humanité » (Kant) ? La démocratie et l’économie de marché constituent notre réponse.

En face, les bâtisseurs d’utopies estiment que l’Homme est naturellement bon, qu’il a été corrompu et pourrait renouer avec la Vertu si les conditions, voire la contrainte, l’y conduisaient. Vertu et Homme nouveau, combien de crimes commis au nom de ce Bien-là ? Les libéraux étant plus modestes et plus pessimistes en deviennent impardonnables.

J’observe à Genève aussi, c’est récurrent dans tout colloque et débat en France, combien les antilibéraux n’écoutent jamais les objections, ne s’intéressent pas à une autre vision du monde que la leur. Surtout pas de dialogue : tel est le front commun des utopistes, tandis que les libéraux ont la faiblesse de croire que l’Autre, peut-être, détient aussi une part de vérité. Tout débat est impossible entre les libéraux qui sont des laïcs de la pensée et tous les théologiens de la société parfaite. Grattez les Verts et les antimondialistes, Robespierre et Savonarole sont juste en-dessous : seules les institutions de la démocratie nous en protègent.

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