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Ce n'est pas une façon de dire adieu

Publié le 24 février 2008 par Maxime Jobin
Ce n'est pas une façon de dire adieu

Commentaire
Au nombre de citations que j'ai transcrites de ce livre, on peut voir que j'ai vraiment adoré. Ce n'est pas une façon de dire adieu est le genre de roman à travers lequel on peut voguer, en riant et en pleurant, mais aussi en s'assoyant confortablement et en acceptant les effluves de mots et de sons qui en ressortent. Léger, mais oh combien passionnant : Stéfani Meunier sait comment peindre le quotidien pour le rendre coloré, attrayant, obsédant. On y raconte la vie de trois personnes, deux New Yorkais et un citoyen du monde, dont la rencontre changera tout. Dans un petit appartement de Brooklyn, avec leur chien Lennon, leur musique et leurs anecdotes, ils vivront l'amitié et l'amour. Mais un voyage sèmera le doute et le vide dans leur vie. Il y aura des adieux, plutôt des fuites. Quelque chose qui ne ressemble pas à une façon de dire adieu.
Il n'y a pas qu'un seul narrateur, mais bien trois co-narrateurs. Chaque chapitre est le reflet de la vision d'un personnage concernant un moment de leur vie commune. On comprend ainsi mieux leur relation, leurs bonheurs, leurs altercations.
Franchement, ce petit bouquin québécois est un bijou et il serrait vraiment dommage pour un lecteur passionné de ne pas sauter, main sur la couverture, dans les pages de ce livre. Que vous soyez français, africain, américain, québécois... cela n'a pas d'importance. Stéfani Meunier raconte une histoire universelle, une histoire de rencontres et de relations humaines, une histoire d'amour et de mélancolie. L'histoire de notre vie à tous quoi.
Synopsis
" New York, les années 1970. Une ville qui est encore le centre du monde, mais qui commence à douter d'elle-même. La guerre du Vietnam s'enlise, et si l'engouement pour le rock'n roll ne se dément pas, il vient maintenant d'Angleterre, où l'ombre des Beatles plane encore sur le monde de la musique. Sean est musicien. Pour le plaisir de faire de la musique, pour cette merveilleuse camaraderie de la scène, pour l'amour de cette vie d'errance entre Montréal, sa ville natale, et les innombrables bleds où il doit jouer. Quand il revient à New York, il vit chez son ami Ralf, qui a un appartement à Brooklyn et un chien qui s'appelle Lennon. Les seules attaches qui donnent à Sean le sentiment d'être chez lui quelque part. Pendant que Sean est en tournée, Ralf fait la connaissance d'Héloïse. C'est le bonheur, tout de suite, un voyage en Bretagne, des soupers où se conjuguent amour et amitié. Et, tout à coup, le précaire équilibre ne tient plus. Dans ce second roman, Stéfani Meunier se révèle plus que jamais une magicienne des atmosphères. En quelques traits aussi sûrs que retenus, elle sait donner un relief extraordinaire au quotidien de ses personnages. Un regard capté en passant, quelques accords de musique, les paroles d'une chanson aimée qui nous montent aux lèvres, et voilà que notre coeur chavire en même temps que celui des personnages. "
" C'était une vieille balle de tennis couverte de bave séchée, de poils et de poussière, qui était invariablement sous le sofa, et que cette pauvre bête n'était pas capable d'atteindre, malgré le superbe museau dont la nature l'avait pourvu dans le but, justement, d'aller chercher les balles sous le sofa."
" Dieu que c'était beau, la jeunesse. C'est dommage qu'on ait réussi à l'éliminer pendant les années qui ont suivis"
" Peut-être que si je m'étais assise cinq minutes pour prendre le temps de réfléchir un peu, je n'en étais pas certaine, mais je crois que j'aurais eu de la peine. Peut-être. Mais je ne me suis pas assise."
" Ma mère ne m'envoyait jamais dans ma chambre. Pour me punir, elle m'envoyait jouer dehors."
"[...] j'étais avec Héloïse depuis quelques semaines et je m'étonnais chaque jour de voir que c'était moi qui avais obtenu le rôle de l'homme le plus heureux du monde."
" Elle m'a eu à l'usure, ça c'est certain. Pendant les semaines qui ont suivi, je ne pouvais rien faire sans tomber sur une publicité. J'ai trouvé le Mexique dans le réfrigérateur, Cuba dans une casserole, l'Afrique collée sur le miroir de la salle de bains, l'Irlande pliée dans une paire de bas. [...] C'est la France qui m'a fait craquer. [...] Elle avait des bouts de dépliants collés partout sur le corps. Le mot France, découpé, en lettres rouges, juste au dessus du pubis. Et, en bleu, BRE sur le sein droit et TAGNE sur le sein gauche. J'ai posé ma tête entre la Bretagne et j'ai soupiré. "Va pour la Bretagne." Elle est montée sur le lit et elle a sauté comme une folle, comme une petite fille, en riant, "On part en voyage, on part en voyage", des photos de mer et de rochers et de bateaux tombaient en tournoyant au-dessus du lit."
" Nous ne pourrions plus écouter Ralf nous préparer à souper en essayant de lire les odeurs qui venaient jusqu'à nous. Ragoût, paella, crevettes au pernod, pot-au-feu, pain, poulet, poires au vin. C'était fini. C'est là que la douleur a fait de moi sa résidence permanente."
" Que même les liens les plus forts pouvaient se distendre si on ne les resserrait pas régulièrement."
Note : Ce livre est nominé au Prix littéraire des collégiens 2008. Bien que je sois jury de ce prix, cet article ne réflète en rien l'opinion des autres jurys. Je n'écris pas en tant que jury, mais bien en tant que lecteur. Mon choix final restera secret jusqu'au dévoilement du gagnant.
" Je suis devenu une roche. [...] Ça ne s'est pas fait comme ça. Ça demande de l'entraînement, être une roche. Ça a pris des mois. De pleurs, de rage, d'actions inutiles pour ne pas penser. Puis de repos. De contemplation. Des mois. Je n'avais plus aucun contact avec le reste de l'humanité et je n'avais pas l'intention d'en avoir avant un bon moment, moment que je ne prévoyais pas, que je n'anticipais pas non plus et que j'aurais été bien en peine de dater, même approximativement."
" Il n'y a rien de pire que la solitude à deux, je crois bien, puisque l'absence du regard de l'autre est toujours là pour vous le rappeler. Vous êtes seul."

" Parfois je me dit que j'aimerais bien tomber sur Bob, le patron du Cactus Club, et lui dire que son île n'était pas pire qu'une autre, pas pire que n'importe quel lieu, en fait. Que ce n'était pas parce que j'en étais parti et que je n'y étais pas retourné que j'avais accompli quelque chose de mieux, de plus que ses clients. [...] Je crois même que j'ai fait bien pire. Parce que je me suis arrangé pour ne rien avoir à oublier. Et, toute ma vie, j'ai traîné mon île avec moi."


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