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Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Publié le 04 octobre 2011 par Busuainn_ezilebay @BusuaInn_Ezile
Cet article est une traduction de :
Ghana and Côte d’Ivoire: Changing Places, paru dans la revue internationale de politique de développement
Markus Eberhardt et Francis TealTraduction de Isabelle Guinebault.p. 37-54

Résumé

Français Depuis leur indépendance, le Ghana et la Côte d’Ivoire ont eu une trajectoire économique radicalement différente. A partir de 1970, l’économie du Ghana a connu un effondrement durable tel qu’en 1983, le niveau du PIB réel par habitant du pays avait chuté d’environ 40 %, sa monnaie ne valait plus rien et sa troisième tentative de gouvernement démocratique s’était soldée par un quatrième coup d’Etat en quinze ans. A l’inverse, la Côte d’Ivoire avait joui d’une croissance plus ou moins ininterrompue telle qu’en 1980 le PIB réel par habitant était deux fois supérieur à celui des années 1960. Cependant, on a assisté à un remarquable renversement de la situation à partir du milieu des années 1980. En effet, dès 1983 le Ghana a connu une reprise durable, tandis que la Côté d’Ivoire a subi d’importantes pertes de revenus, son premier coup d’Etat en 1999 et la descente vers la guerre civile et l’agitation ethnique. Pourtant l’un des pays africains les moins florissants, le Ghana en est devenu l’un des plus prospères, échangeant sa place avec la Côte d’Ivoire, plongée dans une violente guerre civile et dont l’économie est passée d’une croissance rapide à la stagnation. Cet article a pour objet de décrire et d’expliciter cet incroyable renversement des tendances.

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Mots-clés géographiques :

Afrique subsaharienne, Côte d'Ivoire, Ghana

Mots-clés thématiques :

colonial | colonisation, agriculture, commerce, croissance, exportations, politiques agricoles, histoire économique | du développementHaut de page

Plan

1. Introduction2. Les modèles de croissance du Ghana et de la Côte d’Ivoire3. Revenus, épargne et exportations du Ghana et de la Côte d’Ivoire4. Les exportations et leurs prix5. Coups d’Etat et guerre civile : causes et conséquences6. Echecs communs7. Vue d’ensemble du développement en AfriqueHaut de page

Texte intégral

PDF 1,3M Signaler ce documentLes auteurs tiennent à remercier Christoph Lakner pour son inestimable contribution aux recherches nécessaires à cet article, ainsi que le comité de rédaction pour ses précieux commentaires. Ils restent seuls responsables des éventuelles erreurs.

1. Introduction

1 Ces dernières années, un scepticisme croissant s’est fait sentir quant à la pertinence des régressions transversales réalisées dans tous les pays du monde pour connaître les variables à l’origine de leurs différents taux de croissance. En effet, d’aucuns avancent que trop d’éléments diffèrent pour que de telles macro-comparaisons présentent un intérêt. A l’inverse, une tradition plus ancienne cherche à comparer des pays aussi similaires que possible par certains aspects, quoique très différents par d’autres. Il vaut particulièrement la peine de comparer le Ghana et la Côte d’Ivoire. En effet, ces deux pays voisins, situés sur la côte ouest africaine et dotés, au moment de leur indépendance, de certaines structures économiques semblables, ont cependant par la suite adopté des politiques économiques radicalement différentes. Que peut nous enseigner la comparaison des résultats de ces politiques économiques ? Cette question, certes pas nouvelle (cf. Foster et Zolberg 1971 ; Eshag et Richards, 1967), est au centre du présent article. Nous tenterons également de replacer la réponse à cette question dans le contexte africain global, au moment où ces pays célèbrent le 50e anniversaire de leur indépendance. A bien des égards, les différentes politiques économiques adoptées par le Ghana et la Côte d’Ivoire reflètent des différences persistantes d’opinion sur la nature des politiques capables de résoudre le problème « africain ». Ce problème est simple : au cours des cinquante dernières années, l’écart entre l’Afrique et le reste du monde en développement s’est régulièrement creusé (Collier 2007). Pourquoi un tel processus ? Que faire pour l’inverser ? Telles sont les principales questions que les politiques de développement doivent affronter.
  • 1 Pour la période allant de 1956 à 2001, Patrick McGowan a identifié 11 complots, 6 coups d’Etat rat (...)
2 Chacun connaît le fameux pari entre Kwame Nkrumah et Félix Houphouët-Boigny, respectivement premier ministre du Ghana et président de la Côte d’Ivoire, pour savoir lequel des deux pays connaîtrait une prospérité durable. Au moment de sa mort en 1972, Nkrumah semblait clairement être le perdant ;  à la mort de Houphouët-Boigny en 1993, ce n’était plus le cas. Entre 1960 et 1980, la Côte d’Ivoire a connu une croissance plus ou moins ininterrompue telle qu’en 1980 son produit intérieur brut (PIB) réel par habitant était deux fois supérieur à celui des années 1960. A l’inverse, le PIB du Ghana a considérablement baissé depuis les années 1970 jusqu’en 1983 lorsque le pays se trouva en faillite, avec une monnaie qui ne valait plus rien, une économie en ruines et une troisième tentative de gouvernement démocratique qui s’était soldée par un quatrième coup d’Etat en quinze ans. Or, depuis le milieu des années 1980 on assiste à un remarquable renversement de la situation : dès 1983 le Ghana a connu une reprise durable, tandis que la Côté d’Ivoire a subi d’importantes pertes de revenus, son premier coup d’Etat en 1999 et la descente vers la guerre civile et l’agitation ethnique1. Pourtant l’un des pays africains les moins florissants, le Ghana en est devenu l’un des plus prospères, échangeant sa place avec la Côte d’Ivoire plongée dans une violente guerre civile et dont l’économie est passée d’une croissance rapide à la stagnation. Comment expliquer cet incroyable retournement de la situation ?
3 Cet article est construit autour de la réponse à cette question. Dans la section suivante, nous présentons de façon quelque peu schématique l’histoire économique récente de ces deux pays. Nous exposons ensuite dans les sections 3 et 4 en quoi le commerce et les politiques fiscales sont essentiels à la compréhension de la nature du processus de croissance dans chaque pays. Dans la section 5 nous examinons une question malheureusement centrale de l’histoire économique récente de l’Afrique, à savoir les causes et les conséquences des coups d’Etat et des guerres civiles, et soulignons la diversité des résultats politiques entre les deux pays. Dans la section 6, nous nous concentrons sur ce que nous nommerons un échec commun, c’est-à-dire le fait que durant cinquante années d’indépendance, les politiques des deux pays ont échoué à les transformer d’économies caractérisées par de petites entreprises peu productives en économies capables de maintenir le niveau de revenu auquel tout Africain aspire. Enfin, nous conclurons cet article par une réflexion générale sur le développement en Afrique.

2. Les modèles de croissance du Ghana et de la Côte d’Ivoire

4Si leurs ressources naturelles et leur situation géographique sont similaires, le Ghana et la Côte d’Ivoire diffèrent par leur contexte politique et institutionnel. Certaines de ces différences sont liées à des questions de culture politique et d’autres aux institutions économiques qui fournissent le cadre nécessaire aux prises de décision. Les rôles respectifs de la géographie, des maladies, des institutions et des politiques dans la détermination des résultats à travers les pays ont été largement débattus. Par exemple, William Easterly et Ross Levine (2003) avancent que ce sont les institutions et non les politiques qui sont importantes. L’un des problèmes que rencontrent les analyses inter-pays est que l’Afrique est le continent où tous ces aspects ont été perçus comme nuisibles aux perspectives de croissance des pays. Comme les aspects géographiques du Ghana et de la Côte d’Ivoire ne diffèrent que légèrement, nous pouvons ne plus les considérer comme les sources des énormes différences dans les modèles de croissance que nous décrirons plus loin. Cela nous laisse les institutions et les politiques. Les deux institutions sur lesquelles nous allons nous concentrer présentent à la fois des aspects politiques et économiques. Les régimes politiques de ces deux pays ont suivi des trajectoires très différentes. Le Ghana est en effet passé d’un Etat multipartite ouvert dans les années 1950 à un Etat monopartite sous Nkrumah, puis, après des périodes de pouvoir civil interrompues par des dictatures militaires, les années 1990 ont vu l’apparition d’une nouvelle structure démocratique multipartite efficace. Dans le cas de la Côte d’Ivoire, le passage s’est fait d’une longue période d’Etat monopartite sous la houlette de Félix Houphouët-Boigny à la descente vers le conflit et la guerre civile. Quant à leur structure économique, les deux pays diffèrent principalement en ce que le Ghana est doté d’une banque centrale indépendante tandis que la Côte d’Ivoire, en tant que membre de l’union monétaire régionale de la Communauté financière africaine (CFA) francophone, n’en a pas. Après avoir décrit leurs modèles de croissance fort distincts, nous étudierons comment ces différences dans les structures politiques et économiques des deux pays influencent leurs résultats économiques respectifs.5Le graphique 1 montre l’évolution du PIB par habitant dans les deux pays. Pour chacun d’eux sont présentées deux séries utilisant une définition différente du PIB. La première est une série à prix constants donnée par les « Indicateurs du développement dans le monde » de la Banque mondiale ; elle mesure pour chaque pays le PIB en unités comparables dans le temps. Tout en étant exprimés en prix constants en USD de 2000, ces chiffres sont équivalents aux unités de devise locale à prix constants. La seconde série utilise la série d’indices-chaînes de la Penn World Table version 6.1, qui cherche à mesurer le PIB par habitant en prix internationaux constants entre les pays. L’utilisation de cette dernière série pour mesurer les changements dans le temps peut poser des problèmes, mais le graphique 1 montre les deux séries de données pour la période la plus longue possible. Les données de la Penn World Table sont censées assurer que les chiffres du PIB sont comparables entre les pays grâce à l’utilisation des prix mesurés en « parité de pouvoir d’achat » (PPA). On notera que, notamment pour le Ghana, les deux séries montrent une évolution très différente des niveaux de PIB durant la période considérée, et par là même du taux de croissance. Ceci est probablement dû aux distorsions créées par l’utilisation de prix PPA pendant une période dans les années 1970 où la devise du Ghana était largement surévaluée. Si nous limitons la comparaison entre les deux pays à la période des années 1960 et à la période la plus tardive – 2000 –pour laquelle nous disposons de données comparables, nous voyons qu’en termes de PPA la Côte d’Ivoire est plus riche, avec en 2000 un revenu par habitant de 2000 USD contre environ 1400 USD pour le Ghana. Cet écart est légèrement plus étroit que celui dans les années 1960. Ces différences doivent être considérées dans le contexte des changements spectaculaires survenus entre 1980 et 2000 dans la répartition mondiale des revenus, tels que les montre le graphique 2. En 1980, le revenu du Ghana était inférieur au niveau moyen de revenu de l’Afrique subsaharienne, et ceux de la Côte d’Ivoire nettement supérieurs ; en 2000, les deux pays étaient plus proches de la moyenne.
6 Si, pendant ces vingt années, le niveau de revenu de l’Afrique subsaharienne a à peine augmenté, celui de la Chine a été multiplié par huit, et l’Asie du Sud, qui en 1980 était plus pauvre que l’Afrique, est devenue bien plus riche qu’elle. Ces moyennes régionales cachent évidemment de nombreuses disparités, mais dans ses grandes lignes il s’agit d’un scénario plutôt classique : l’incapacité des économies africaines à participer à la période de croissance sans précédent commençant dans les années 1980 est sous-jacente à l’incapacité à long terme du Ghana et de la Côte d’Ivoire à faire évoluer durablement le niveau de vie de leurs populations. Tout en étant plutôt représentative du continent africain, cette incapacité des deux pays à participer à la croissance mondiale est le principal élément de leurs trajectoires économiques durant cette période qui demande une explication approfondie.Graphique 1 – PIB par habitant du Ghana et de la Côte d’IvoireGraphique 1 – PIB par habitant du Ghana et de la Côte d’Ivoire
Agrandir Original (png, 97k)Source : Penn World Table version 6.1, disponible sur http://pwt.econ.upenn.edu/​php_site/​pwt_index.php.Graphique 2 – PIB par habitant par région, en 1980 et en 2000 (en USD PPA de 1996)aGraphique 2 – PIB par habitant par région, en 1980 et en 2000 (en USD PPA de 1996)<sup alt=a" />a">">a">">a" title="Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles" />a">">a">">a" title="Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles" />a">">
Agrandir Original (png, 32k)Source : Penn World Table version 6.1.a Les revenus sont pondérés en fonction de la population.
b Hormis l’Afrique du Sud.
7Jusqu’à présent, nous nous sommes concentrés sur les données Penn comparables au niveau international. Si nous nous concentrons sur la série en prix constants, qui offre une meilleure mesure de l’évolution des revenus dans les pays, nous voyons que pour la période allant de 1970 à 1983, le revenu du Ghana a considérablement baissé, de près de la moitié. Il en allait de même pour la Côte d’Ivoire entre 1980 et 1995. La crise en Côte d’Ivoire est souvent attribuée à la récession mondiale qui a débuté à cette époque. Or, pendant la même période, l’économie du Ghana croissait fortement ; cette explication n’est donc pas suffisante.

3. Revenus, épargne et exportations du Ghana et de la Côte d’Ivoire

8 Comment expliquer les évolutions considérables, voire spectaculaires, du PIB par habitant ? Pour répondre à ce type de questions, les économistes utilisent l’approche standard du modèle de croissance de Solow. Ce modèle considère que – contrairement à ce que l’on pourrait croire – l’investissement n’affecte pas la croissance économique à long terme, mais détermine le niveau de revenu à long terme. Le taux de croissance à long terme dépend du niveau de « progrès technique », une expression dévoilant l’ignorance des économistes quant aux facteurs qui déterminent réellement la croissance. C’est un modèle à un seul secteur, qui ne fait donc pas de distinction entre les secteurs agricole et industriel. Or, le principal objectif des politiques gouvernementales tant du Ghana que de la Côte d’Ivoire a été de modifier la composition de la production globale de manière à élever la part du secteur manufacturier ; nous devons donc aller au-delà du simple cadre de Solow pour tâcher de saisir les facteurs qui soutiennent la tendance générale de la croissance. Mais auparavant il convient d’étudier en quoi le simple cadre de Solow peut expliquer les tendances observées.9Le graphique 3 montre les niveaux du PIB en prix constants en USD de 2000 et les taux d’épargne nationaux pour chacun des pays. Il ne faut pas s’attendre à ce que le niveau du PIB et celui du taux d’épargne soient en étroite corrélation à court terme. Le modèle de Solow cherche à prédire la relation à long terme entre le niveau de revenu et le taux d’épargne, prenant ainsi en compte le progrès technique sous-jacent. Dans les deux pays, le taux d’épargne brut a suivi une tendance baissière à partir des années 1960 ; au Ghana, la tendance du PIB était nettement à la baisse jusqu’au milieu des années 1980, tandis qu’en Côte d’Ivoire il est en baisse depuis 1980. Aussi un modèle prédisant que des taux d’épargne plus faibles causeront à long terme des niveaux de revenu plus faibles concorde-t-il en gros avec nos observations. Cependant, il y a de surprenantes disparités entre les taux d’épargne et la croissance qui nécessitent plus de recherches. La croissance rapide du Ghana à partir de 1983 ne s’explique pas par l’augmentation du taux d’épargne, qui est resté stable pendant cette période. De même, la croissance rapide de la Côte d’Ivoire entre 1960 et 1980 ne s’explique pas par l’augmentation du taux d’épargne.Graphique 3 – Niveaux du PIB et taux d’épargne au Ghana et en Côte d’IvoireGraphique 3 – Niveaux du PIB et taux d’épargne au Ghana et en Côte d’Ivoire
Agrandir Original (png, 89k)Source : Penn World Table version 6.1.Graphique 4 – PIB et exportations au Ghana et en Côte d’Ivoire (en USD constants de 2000)Graphique 4 – PIB et exportations au Ghana et en Côte d’Ivoire (en USD constants de 2000)
Agrandir Original (png, 94k)Source : Penn World Table version 6.1.10 Si le PIB et l’investissement semblent bien avoir une corrélation, aussi ténue soit-elle, en quoi cela sert-il notre compréhension du processus de croissance sous-jacent de ces économies ? Pour répondre à cette question, nous devons nous distancier du modèle de Solow et soulever une question plus essentielle : qu’est-ce qui détermine le taux d’investissement dans l’économie ? Le cadre de Solow lui-même ne peut expliquer le moteur de l’investissement, pas plus qu’il ne nous renseigne sur les facteurs à long terme de la croissance, qui se retrouvent tous résumés par l’expression « progrès technique ». Toutefois, de nombreux signes laissent suggérer que dans ces économies le taux d’investissement est lié au commerce.
11 Le graphique 4 présente les niveaux de PIB (en prix constants) et les séries d’exportations par habitant en prix constants extraits des Indicateurs du développement dans le monde. Dans le cas du Ghana, la similitude entre le PIB et les exportations est saisissante. Quant à la Côte d’Ivoire, elle semble avoir connu une forte augmentation de ses exportations au milieu des années 1990 alors que ses revenus chutaient. Le franc CFA a été dévalué en janvier 1994 ; les conséquences de cette dévaluation sur les choix politiques du gouvernement de l’époque sont discutées dans la section 5.
12 Nous observons dans ces économies une étroite corrélation entre les exportations et les revenus, bien plus étroite que celle observée entre les taux d’épargne et les revenus. Et cela ne vaut pas que pour la période commençant en 1960. Depuis le début du xxe siècle, la croissance des exportations et du commerce a été essentielle au succès des économies africaines. Allan McPhee (1971) a décrit cette transformation des économies des pays de l’Afrique de l’Ouest britannique. Elle trouve son origine dans l’adoption de nouvelles cultures par les paysans d’Afrique de l’Ouest et dans la réduction des coûts de transport grâce aux investissements dans les chemins de fer et les routes ; ainsi, les exportations du Ghana étaient passées dans les années 1930 de moins de 50 USD par habitant à plus de 150 USD, en USD de 1995 (Teal 2002). Les exportations de l’Afrique de l’Ouest, et même de l’Afrique en général, se composaient de produits primaires incluant des cultures agricoles telles que le cacao, le café, l’huile de palme et le coton ainsi que des ressources naturelles, dont le bois, important pour les deux pays, et également l’or dans le cas du Ghana. On entend fréquemment dire que c’est la nature même des exportations africaines qui explique la nature de leurs problèmes. Selon l’analyse de Paul Collier, Anke Hoeffler et Dominic Rohner (2009), la proportion des exportations de matières premières dans le PIB est une variable qui peut accroître la probabilité de guerre civile dans un pays. C’est là une vision nouvelle des problèmes posés par la structure des exportations africaines. Une vision plus ancienne voit un lien entre ces problèmes et la détérioration des conditions commerciales relatives à ces produits, qui en outre manquent du potentiel de croissance des biens manufacturiers. Cette ancienne vision nous occupera dans la section qui suit, avant que nous abordions dans la section 5 les sources de conflit dans ces pays.

4. Les exportations et leurs prix

13 Qu’en est-il alors de la production des cultures d’exportation et alimentaires pendant cette période ? En ce qui concerne le cacao, nous pouvons faire une comparaison directe entre les deux pays car tous deux sont d’importants producteurs mondiaux de cacao depuis les années 1960. Les tendances des exportations telles que représentées dans le graphique 4 sont dominées par un nombre relativement restreint de produits agricoles et autres produits de base. Le cacao est de loin le produit le plus important des exportations agricoles du Ghana, suivi du bois et de l’or, autres sources majeures de recettes d’exportation pour le pays. Concernant la Côte d’Ivoire, les principaux produits de base exportés sont le cacao, le café, le coton et le bois. Aucun des deux pays n’a été capable de faire une place significative aux biens manufacturiers sur son marché d’exportation. Les exportations de produits manufacturiers du Ghana ne représentent par exemple qu’une part négligeable du PIB  pendant quasiment toute cette période, avec moins de 1 USD par habitant.
14 Le graphique 5 compare les cultures d’exportation et alimentaires des deux pays. Les graphiques 6 et 7 indiquent les prix des principaux produits agricoles d’exportation, en faisant la distinction entre le prix mondial, le prix qu’auraient perçu les paysans sans imposition nationale directe ou indirecte, et le prix qu’ils ont effectivement perçu.Graphique 5 – Volumes des cultures d’exportation et alimentaires au Ghana et en Côte d’IvoireGraphique 5 – Volumes des cultures d’exportation et alimentaires au Ghana et en Côte d’Ivoire
Agrandir Original (png, 116k)Graphique 6 – Prix du cacao au Ghana et en Côte d’IvoireGraphique 6 – Prix du cacao au Ghana et en Côte d’Ivoire
Agrandir Original (png, 101k)Source des graphiques 5 à 7 : Anderson et Valenzuela (2008). Les jeux de données intègrent les données sur la production et les prix disponibles sur  http://go.worldbank.org/​U32NJLFN10.Graphique 7 – Prix du café et du coton en Côte d’IvoireGraphique 7 – Prix du café et du coton en Côte d’Ivoire
Agrandir Original (png, 102k)15 Le graphique 5 montre les volumes par habitant. Si ceux-ci ne représentent pas une mesure de la productivité, ils nous permettent de voir la rapidité de la croissance de la production par rapport à la population. Il existe des différences frappantes entre les deux pays. En effet, malgré la reprise de la production de cacao, qui avait atteint son niveau plancher au milieu des années 1980, en 2005 le Ghana n’avait pas retrouvé son niveau de production par habitant de 1960 ; à l’inverse, le volume de production alimentaire par habitant était légèrement supérieur à celui de 1960. Quant à la Côte d’Ivoire, son volume de production alimentaire par habitant est demeuré constant et la composition de ses exportations est passée du café au cacao et, surtout, au coton. Le dessin que tracent la croissance et le déclin des cultures d’exportation de la Côte d’Ivoire ne reflète pas aussi bien l’évolution de son PIB que ne le fait le cacao pour la croissance économique du Ghana. Cela est dû aux diverses méthodes d’imposition des cultures.
16 Le travail d’Anderson et de Valenzuela (2008) nous a permis de comparer les prix internationaux et les prix perçus par les producteurs pour un large éventail de produits primaires. Comme chacun le sait, le modèle de protection de l’agriculture dans le monde veut que les pays pauvres africains imposent leurs producteurs de produits primaires (cf. Bauer 1954 ; Bates 1981) tandis que les économies riches de l’Europe et des Etats-Unis offrent aux leurs d’importantes subventions (OCDE 1987). Les graphiques 6 et 7 nous permettent de décrire l’ampleur de ces impôts et de comprendre pourquoi l’effondrement des prix mondiaux dans les années 1980 a mené à la chute des revenus en Côte d’Ivoire, mais pas au Ghana.
17 Dans ces graphiques, le prix à la frontière est censé décrire le prix mondial du produit en question. Même sans être imposé, le prix au producteur resterait inférieur au prix mondial car il faudrait y ajouter les coûts de transport et d’autres frais. Le prix que le paysan percevrait en l’absence d’imposition est représenté par le prix au producteur sans distorsion. La différence entre ce prix sans distorsion et le prix effectivement perçu par le paysan est à la mesure de la taxe imposée au paysan. Le graphique 6 montre clairement l’importance de ces taxes pour les deux pays. Cependant, leur méthode de taxation était différente, et cela a entraîné des conséquences considérables sur la façon dont la croissance a réagi face aux modifications des prix mondiaux.
  • 2 Francis Teal (1986) explique comment le régime monétaire ghanéen a entraîné un taux d’imposition b (...)
18 Au Ghana, la taxation était effectuée par le biais d’un office de commercialisation, qui fixait les prix des produits dans la monnaie nationale, le cedi. Après le coup d’Etat de 1981, le taux de change du pays était largement surévalué et l’inflation nationale galopante, mais sans que le taux de change officiel ne bouge ; il s’ensuivit une chute persistante du prix réel aux producteurs ghanéens de cacao au cours d’une période marquée par une augmentation rapide des prix mondiaux (voir graphique 6). A l’inverse, le régime d’imposition de la Côte d’Ivoire, également mis en œuvre par un office de commercialisation (appelé Caisse de stabilisation et de soutien des prix des productions agricoles), suivait un régime de taux de change où il était impossible de séparer le taux officiel du taux du marché noir, de sorte que le prix aux producteurs a augmenté en même temps que les prix mondiaux2. Cependant, après 1980 les prix mondiaux ont commencé à baisser, et le régime monétaire de la Côte d’Ivoire, combiné à un taux de change fixe, a entraîné la baisse des prix aux producteurs. En revanche, les prix aux producteurs ont augmenté au Ghana alors que les prix mondiaux baissaient ; cela s’explique par le fait que les réformes du régime de taux de change du pays ont dévalué la monnaie afin d’annuler l’excès du taux du marché noir sur le taux officiel, ce qui a entraîné un taux d’imposition moindre pour les paysans.
19 L’office de commercialisation du cacao du Ghana et la caisse de stabilisation de la Côte d’Ivoire avaient tous deux pour objectif de stabiliser les prix aux producteurs. Dans son étude sur la création des offices de commercialisation dans les pays de l’Afrique de l’Ouest britannique, Peter Thomas Bauer (1954) a avancé que ces institutions joueraient le rôle de percepteurs pour le compte du gouvernement. Cela a été vrai pendant une période prolongée au Ghana. Cependant, la surévaluation de la monnaie dans les années 1980 a créé une forme d’imposition différente, selon laquelle les profits générés par l’augmentation des prix mondiaux réels revenaient aux détenteurs des rares licences d’importation. Ces licences permettaient à leurs propriétaires de tirer parti de la différence entre le taux de change officiel et celui du marché noir, qui pouvait être jusqu’à trois fois plus important. Elles étaient gérées par le régime militaire qui contrôlait le pays. La violence du premier coup d’Etat de Jerry Rawlings, après lequel plusieurs dirigeants furent exécutés, témoignait de l’indignation publique devant la vénalité et la corruption devenues emblématiques du régime militaire. Si P. T. Bauer avait manifestement  raison de croire que ces institutions serviraient à taxer les paysans, il faut noter que, dans le cas de la Côte d’Ivoire, la caisse a effectivement permis de stabiliser les prix et la baisse des prix aux producteurs a été bien moindre que celle des prix mondiaux d’après 1980. C’est ce degré de stabilisation qui explique pourquoi, malgré la baisse rapide des prix mondiaux, la croissance de la production du pays a ralenti sans toutefois chuter.

5. Coups d’Etat et guerre civile : causes et conséquences

20 Le Ghana et la Côte d’Ivoire ont tous deux connu des coups d’Etat et, depuis 2002, la Côte d’Ivoire est embourbée dans une guerre civile. Pour Augustin Kwasi Fosu (2001), l’instabilité politique engendre des coûts importants, ce que semblent confirmer l’expérience de la Côte d’Ivoire après le coup d’Etat de 1999 de même que l’histoire économique du Ghana entre 1966 et 1983. Les deux pays présentent toutefois des différences essentielles à cet égard. Le Ghana a en effet connu une série de coups d’Etat après celui de 1966 qui renversa Kwame Nkrumah ; or, ces coups d’Etat n’ont pas fait plonger le pays dans la guerre civile. En fait, le deuxième coup d’Etat de Jerry Rawlings en 1981 a marqué le début d’une période de croissance soutenue. Comment expliquer ces différentes trajectoires – du coup d’Etat à la croissance dans un cas, à la guerre civile dans l’autre ?
  • 3 Douglas Rimmer (1992) en fait le récit détaillé.
21 Pour répondre brièvement, il semble que ce soient les choix politiques qui expliquent ces résultats différents. Le coup d’Etat de 1971 au Ghana a conduit à des politiques visant à accroître les impôts des paysans ainsi que la part des revenus des dirigeants – qui à l’époque étaient les militaires. C’est pourquoi Jerry Rawlings, après ses deux coups d’Etat de la fin des années 1970, ne pouvait qu’alléger les impôts ou voir l’économie continuer à s’effondrer. Ce sont les choix politiques du gouvernement Rawlings qui ont permis une sortie progressive du bourbier dans lequel les politiques précédentes avaient plongé l’économie du pays3. Grâce à la poursuite de politiques menant à la croissance, dont notamment l’allègement des taux d’imposition sur le secteur agricole, les revenus des deux secteurs public et privé pouvaient augmenter.
22 Les options politiques se présentant au gouvernement ivoirien dans les années 1980 étaient très différentes. Comme les prix réels des exportations déclinaient, les recettes fiscales du gouvernement étaient en chute et avec elles les revenus réels disponibles pour le secteur public. Les discussions politiques de l’époque se concentraient sur les problèmes soulevés par le taux de change fixe imposé par l’adhésion à l’union monétaire de l’Afrique de l’Ouest francophone, taux qui a d’ailleurs été dévalué au lendemain de la mort de Houphouët-Boigny en janvier 1994. Nous avons remarqué plus haut que pendant cette période les exportations ont augmenté, ce qui était probablement une réaction à cette dévaluation. Toutefois, pour augmenter les prix aux producteurs, ce qui aurait constitué le fondement d’une croissance rapide, il aurait fallu réduire l’assiette des impôts et, par là, les recettes des pouvoirs publics. Les législateurs se trouvaient donc face à un choix cornélien entre stimuler les exportations ou favoriser les intérêts du secteur public, c’est-à-dire leurs propres revenus.
  • 4 Paul Collier (2009, chapitre 7) en offre un exemple récent.
23 Comme cela ressort clairement des récits sur l’entrée de la Côte d’Ivoire dans la guerre civile4, l’habileté et la volonté avec lesquelles les dirigeants politiques ont exploité l’hostilité ethnique ont grandement contribué aux événements ayant mené au conflit. Cependant, la seule raison des facteurs ethniques n’est pas suffisante. L’hostilité ethnique et la suspicion sont des caractéristiques communes à presque toutes les sociétés africaines. Pour expliquer nos observations, il nous faut comprendre quand et pourquoi les dirigeants politiques exploitent ces facteurs dans certaines circonstances et dans d’autres choisissent de ne pas le faire ou ne peuvent pas le faire.
  • 5 Sur la période entre ces deux événements, voir Hutchful (1997).
  • 6 « Le gouvernement du Parti national du peuple (PNP), dirigé par le Dr Hilla Limann, reçut le pouvo (...)
24 Les conséquences des coups d’Etat ghanéen en 1981 et ivoirien en 1999 ont été très différentes du fait que ceux-ci ont été suivis de politiques bien distinctes. Le coup d’Etat ghanéen de 1981 peut être considéré comme la continuation de celui de 19795. Ce dernier portait contre un régime militaire en place, comme le remarque Patrick McGowan (2003), et ressemblait plus à une mutinerie6 qu’à un coup d’Etat militaire renversant un gouvernement civil, comme ce fut le cas en Côte d’Ivoire. Il se peut que cette distinction soit importante. Au Ghana, le régime de Jerry Rawlings s’opposa aux militaires et chercha sa légitimité en se distanciant des politiques précédentes, considérées comme des échecs. Dans le cas du Ghana, c’est le coup d’Etat contre Kwame Nkrumah, dont les politiques étaient – en tout cas à l’époque – également considérées comme des échecs, que l’on peut rapprocher du coup d’Etat ivoirien de 1999. Ce qui s’ensuivit ne fut certes pas une guerre civile, mais tout de même une longue période d’échec économique.
  • 7 Paul Collier, Anke Hoeffler et Dominic Rohner pensent que le coup d’Etat ivoirien a été rendu poss (...)
25 L’incapacité du gouvernement ivoirien à mettre en place un mécanisme favorisant la croissance économique a clairement rendu le conflit très probable après l’arrivée au premier plan de dirigeants politiques désireux et capables d’exploiter les tensions ethniques sous-jacentes. En outre, les options qui se présentaient aux régimes militaires respectifs du Ghana des années 1970 et de la Côte d’Ivoire à la fin des années 1990 n’étaient pas les mêmes : l’un tirait parti de l’envolée des prix mondiaux des produits de base, l’autre souffrait de l’effondrement des prix7. Quelles qu’aient été les raisons ou les motivations des militaires, le résultat a été catastrophique pour la Côte d’Ivoire.

6. Echecs communs

26 Alors que les pays africains célèbrent le 50e anniversaire de leur indépendance, des questions fondamentales subsistent quant à la réalisation des attentes d’un avenir meilleur qui s’étaient exprimées au moment de l’indépendance. En termes généraux, les revenus actuels tant du Ghana que de la Côte d’Ivoire ne sont pas supérieurs à leur niveau des années 1960, et l’échec politique en Côte d’Ivoire implique une détérioration de la situation, au moins à court terme. A l’inverse, des données récentes provenant du Ghana (GSO 2007) montrent que le taux de pauvreté a été réduit de moitié entre 1991 et 2006 : le pays a atteint le principal Objectif du Millénaire pour le développement avant la date limite fixée. Tout en reconnaissant cette avancée, de nombreux Ghanéens sont manifestement déçus de la faible ampleur des progrès réalisés par les différents gouvernements postindépendance, et cela pour une raison très claire. Si le Ghana s’est remis du désastre économique de la période allant des années 1970 à 1983, cette reprise ne s’est pas traduite par une croissance rapide similaire à celle qu’ont connue les pays nouvellement industrialisés d’Asie de l’Est à partir des années 1970, ou la Chine à partir de 1980. Les pouvoirs publics ne parviennent toujours pas à transformer l’économie du pays, basée sur une agriculture à petite échelle et peu productive, en une économie soutenue par des entreprises très productives. Si le destin de la population ivoirienne montre que des résultats bien pires sont possibles, les Ghanéens sont conscients du fait que de bien meilleurs résultats sont également possibles et n’en attendent pas moins de la part de leur gouvernement.
27 Que doit-on faire ? Les ordonnances et diagnostics politiques foisonnent à propos des problèmes sous-jacents auxquels les gouvernements africains font face. Paul Collier (2007) pense que le problème repose sur un ensemble de pièges auxquels l’Afrique est confrontée. Ces pièges sont les conflits, les ressources naturelles, les pays sans accès à la mer et entourés de mauvais voisins et, par-dessus tout, la mauvaise gouvernance. Nous souhaitons souligner que ces « pièges » sont reliés par les choix politiques des gouvernements africains. Le conflit et la mauvaise gouvernance ne sont pas des catastrophes naturelles ; ils résultent d’une série de décisions prises par les gouvernements et, en ce qui concerne le conflit, par leurs opposants. Si ce sont des pièges, les gouvernements africains se les sont tendus à eux-mêmes. Pour trouver la source des problèmes, il est donc nécessaire de comprendre pourquoi les gouvernements font le choix de politiques entraînant si souvent des conflits et quel est le lien entre ces choix et une bonne dotation en ressources naturelles.
28 L’échec commun au Ghana et à la Côte d’Ivoire a été d’adopter des politiques menant à des baisses prolongées des revenus, avant la survenue de plusieurs coups d’Etat. La reprise au Ghana n’a pas permis aux revenus du pays de s’approcher ne serait-ce qu’un peu des revenus de la Côte d’Ivoire en 1980 : en 2000, les revenus du Ghana ne représentaient que la moitié de ceux de la Côte d’Ivoire en 1980. Cette dernière a-t-elle été une simple victime du mauvais sort, la chute des prix mondiaux, ou existe-t-il un autre problème plus profond ? La reprise au Ghana permettra-t-elle au pays de surpasser les résultats ivoiriens de 1980 ? 
29 Robert Bates (1981) et d’autres politologues ont souligné que les Etats africains, dirigés par des élites instruites et situées dans les zones urbaines, se finançaient soit par les impôts perçus auprès de la population rurale, soit par l’imposition des ressources naturelles quand celles-ci sont vendues comme matières premières. Aussi tout gouvernement se voit-il forcé de trouver un moyen d’augmenter les impôts pour garantir sa propre existence et, peut-être, l’offre de biens publics. Les problèmes posés respectivement par les produits agricoles de base et les ressources naturelles telles que l’or, le bois ou le pétrole sont très différents. On remédie en général aux premiers par des impôts prélevés auprès des petits paysans, qui sont à la fois pauvres et sans instruction. A moins que la productivité agricole n’augmente, la hausse des impôts entraînera selon toute probabilité la chute des rendements et le passage à des cultures non imposées. Cet effet s’est manifesté de manière dramatique dans l’histoire de la production ghanéenne de cacao.
30 Quoi qu’il en soit, il s’est également manifesté dans l’incapacité de la Côte d’Ivoire à maintenir les taux de croissance de ses exportations agricoles après 1980. La chute du prix réel aux producteurs a entraîné la chute des rendements au Ghana et la chute du taux de croissance de la production en Côte d’Ivoire. Cela n’est pas inévitable. Si la productivité augmente, il est alors possible de soutenir les rendements avec des prix inférieurs. Le problème sous-jacent ne se limite pas au niveau d’imposition, mais inclut l’incapacité à garantir la hausse de la productivité agricole. Les problèmes posés par la productivité agricole peuvent sembler bien éloignés des coups d’Etat et des guerres civiles, mais ils leur sont en réalité très proches, du fait des problèmes liés au financement du secteur public. 
31 L’incapacité à augmenter la productivité agricole en Afrique a été largement discutée. Lilyan Fulginiti, Richard Perrin et Bingxin Yu (2004) estiment que la croissance de la productivité totale des facteurs (c’est-à-dire le taux de croissance de la productivité par unité de ressources) pour la période 1962-1999 était de 0,34 % par an pour le Ghana et de 0,57 % par an pour la Côte d’Ivoire (voir le tableau 4 de leur article). Nous avons suggéré plus récemment (Eberhardt et Teal 2009) que le Ghana pourrait avoir un taux substantiellement inférieur, connaissant même une baisse de la productivité totale des facteurs (PTF) de près de 1 % par an (voir tableau 1).
32 Si la chute soutenue de la PTF du Ghana montrée dans le tableau 1 est correcte, alors les limites des avancées réalisées depuis 1983 sont évidentes. En l’absence de croissance du taux d’épargne (voir graphique 3), l’augmentation de la PTF devient la première source de croissance. Si ces données sont correctes, elles laissent suggérer que la reprise des exportations agricoles ghanéennes depuis 1983 (voir graphique 4) ne résulte pas d’une transformation technique de la production mais de l’utilisation de davantage de main-d’œuvre et de terres cultivées pour une technologie demeurant identique ; on retrouve en tout cas cette tendance dans les travaux d’enquête sur le secteur ghanéen du cacao (Teal, Zeitlin et Maamah 2006). En résumé, la poursuite d’une politique de forte imposition du secteur agricole s’est ajoutée à l’incapacité de promouvoir une révolution technologique avancée du secteur. Tableau 1 – Estimations de la croissance annuelle moyenne de la productivité totale des facteurs pour le secteur agricole, 1962-2002Tableau 1 – Estimations de la croissance annuelle moyenne de la productivité totale des facteurs pour le secteur agricole, 1962-2002
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  • 8 Les problèmes liés à la gestion des ressources naturelles se sont manifestés au cours des dernière (...)
33 Outre les petits producteurs agricoles, d’autres sources d’imposition existent dans de nombreux pays africains : les ressources naturelles. Pour le Ghana, la ressource primordiale est l’or, et pour les deux pays les exportations de bois ont joué un rôle important. Aucun des deux pays ne disposait de pétrole, mais d’importantes découvertes faites récemment au Ghana permettront son exploitation dans les prochaines années. Les ressources naturelles comme le pétrole sont considérées comme le meilleur exemple du concept du « piège » des ressources naturelles pour l’Afrique8. Que des atouts aussi précieux puissent être une malédiction peut sembler étrange de prime abord. Cependant, toutes les analyses de la question, qu’elles se concentrent sur les conséquences économiques ou politiques, concordent : s’ils sont mal gérés, ces atouts naturels peuvent mener à des pertes plutôt qu’à la croissance. De plus, de tels atouts entraînent une réinjection substantielle des revenus dans les économies ; les matières premières telles que le pétrole accroissent fortement les recettes des gouvernements. Le Nigeria est sans doute l’exemple africain le plus remarquable d’un pays qui n’a connu aucune augmentation de ses revenus après la découverte de pétrole et dont la mauvaise gouvernance lui vaut la 121e place sur 180 pays dans l’Indice de perception de la corruption 2008 de Transparency International.
34 Pour comprendre en quoi ces ressources naturelles sont un piège, il est nécessaire de se demander pourquoi les gouvernements n’utilisent pas cette augmentation de leurs recettes pour accroître les revenus, notamment ceux des pauvres. Il est clair que cette question est très similaire à celle relative à la taxation des petits producteurs agricoles : comment une taxation si forte n’a-t-elle pas permis de mettre en œuvre la transformation technologique nécessaire dans ces pays ? L’élément commun à ces deux types de taxation est que, même dans le cas de la taxation des ressources naturelles, dont l’assiette de base est beaucoup moins menacée, les recettes ne sont pas utilisées de manière productive.
  • 9 L’argument est que les proportions de facteurs caractérisant les économies africaines rendent inév (...)
  • 10 Voir Teal (2001) pour une discussion détaillée des données sur le Ghana.
35 Comment ces revenus sont-ils donc utilisés ? Ils sont réinjectés dans le secteur public, les services publics, notamment l’éducation, et les subventions au secteur industriel. L’expansion de l’éducation est la principale de ces activités ; or, elle s’est révélée incapable de générer la croissance (Pritchett 2001). Pourquoi ? A première vue cela est plutôt déconcertant. Si les compétences sont rares en Afrique, comme le laisse sous-entendre une analyse du problème africain présentée par Adrian Wood dans une série de documents (compilés dans Wood 2002), on pourrait s’attendre à de substantiels retours sur investissement en éducation9. Il y a désormais de multiples preuves que tel n’est pas le cas pour l’Afrique, ni d’ailleurs pour d’autres pays en développement10. Quant à la source de cet échec, la réponse ne peut être que spéculative. Toutefois, une partie de la réponse réside probablement dans l’incapacité du Ghana et de la Côte d’Ivoire à exporter des produits manufacturiers qui permettraient de créer les emplois et le marché leur faisant défaut.
36 Il est maintenant plus facile de comprendre la nature du dilemme politique au cœur des décisions politiques africaines. La motivation politique des élites urbaines dirigeant le pays est d’investir dans des activités urbaines, telles que les services publics et le secteur industriel, qui nécessitent une main-d’œuvre plus qualifiée. Les moyens investis pour former cette main-d’œuvre n’ont pas engrangé d’importantes augmentations des revenus des personnes instruites, et les emplois bien rémunérés sont de plus en plus rares. Peut-on envisager un mécanisme plus susceptible de créer des dissensions sociales que celui promettant moins d’emplois à ceux qui ont bien travaillé à l’école et des revenus ne représentant qu’une fraction de ceux disponibles dans des pays plus chanceux aux politiques plus sages ?

7. Vue d’ensemble du développement en Afrique

37 A bien des égards, les deux pays étudiés dans cet article, le Ghana et la Côte d’Ivoire, reflètent l’expérience africaine dans toute sa diversité depuis l’indépendance. L’image habituelle d’un continent en proie à l’instabilité politique, plongé dans la pauvreté et la stagnation, est loin de la réalité. Pendant plus de vingt ans, la Côte d’Ivoire a été l’un des pays en développement les plus prospères. La reprise du Ghana, tant sur le plan économique que politique, après l’effondrement du début des années 1980 est remarquable. Toutefois, le succès n’est plus au rendez-vous pour la Côte d’Ivoire, et l’économie du Ghana reste loin derrière celle de pays aussi pauvres au moment de l’indépendance, mais disposant maintenant de revenus élevés.
38 Les Africains aspirent à de tels niveaux de revenus mais, à l’exception de quelques personnes instruites, ces aspirations ne se sont pas réalisées. Nous avons avancé dans cet article que certains aspects de l’échec politique à l’origine de cette frustration sont communs aux deux pays. En particulier, la forte imposition du secteur agricole dans les deux pays a permis d’augmenter des recettes publiques qui n’ont pas été profitablement utilisées. Elles ont servi à maintenir un vaste secteur public et à investir largement dans l’éducation sans toutefois créer davantage d’emplois pour les nouveaux diplômés, d’où la profonde insatisfaction des Africains envers leurs gouvernements. Dans le cas de la Côte d’Ivoire, ces politiques inadaptées ont abouti à la guerre civile, et l’en faire sortir ne sera pas une mince affaire. Et remédier aux problèmes sous-jacents des deux pays promet d’être encore plus ardu.

Bibliographie

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Notes

1 Pour la période allant de 1956 à 2001, Patrick McGowan a identifié 11 complots, 6 coups d’Etat ratés et 5 réussis pour le Ghana, et 3 complots, 2 coups d’Etat ratés et 1 réussi pour la Côte d’Ivoire. Il établit un total military intervention score (TMIS – score total d’interventions militaires) de 54 pour le Ghana contre 14 pour la Côte d’Ivoire durant la même période. Si l’ampleur de l’intervention militaire a décliné entre 1980 et 2001, le Ghana se plaçait toujours au 9e rang sur les 48 pays d’Afrique subsaharienne, tandis que la Côte d’Ivoire se plaçait au 16e.2 Francis Teal (1986) explique comment le régime monétaire ghanéen a entraîné un taux d’imposition beaucoup plus élevé pour les producteurs de cacao qu’en Côte d’Ivoire.3 Douglas Rimmer (1992) en fait le récit détaillé.4 Paul Collier (2009, chapitre 7) en offre un exemple récent.5 Sur la période entre ces deux événements, voir Hutchful (1997).6 « Le gouvernement du Parti national du peuple (PNP), dirigé par le Dr Hilla Limann, reçut le pouvoir des urnes de la part du régime militaire du Conseil révolutionnaire des forces armées (CRFA) le 24 septembre 1979. Le CRFA, un régime de jeunes cadres et dirigeants dirigé par le capitaine Rawlings, avait pris le pouvoir quelques mois auparavant, le 4 juin. Lors de sa brève période de violente “remise en ordre”, le CRFA exécuta huit officiers militaires de haut rang, dont notamment trois anciens chefs d’Etat, en condamna plusieurs autres à la peine de mort in absentia, et incarcéra un certain nombre d’officiers militaires ainsi que de civils ou confisqua leurs biens » (Hutchful 1997, 538 ; NDT : notre traduction).7 Paul Collier, Anke Hoeffler et Dominic Rohner pensent que le coup d’Etat ivoirien a été rendu possible par le changement de politique du gouvernement français : « Pendant la période étudiée, les anciennes colonies françaises en Afrique couraient un risque de guerre civile trois fois inférieur à celui normalement prévu. Le risque était de 2,6 % (compte tenu du coefficient estimé) contre 8,2 % si ces pays avaient présenté les mêmes caractéristiques mais sans être francophones. A quoi peut tenir cette différence ? L’une des raisons possibles est que les traditions culturelle et administrative particulières établies par la France ont laissé un héritage plus pacifique que dans les sociétés non colonisées par la France. Une autre interprétation suggère que pendant cette période, l’Afrique francophone est restée sous tutelle militaire française, notamment avec la présence de bases militaires françaises dans la région, offrant de facto des garanties de sécurité. Puisque ces garanties de sécurité se limitaient à l’Afrique subsaharienne, notamment pour des raisons logistiques, ainsi qu’à une période de temps clairement définie, il est possible de tester ces deux interprétations en ajoutant une variable nominale pour toutes les anciennes colonies françaises, une variable nominale pour les pays francophones d’Afrique subsaharienne pour la période 1965-1999 et une variable nominale pour l’Afrique subsaharienne. Comme nous l’avons expliqué plus en détail à propos des tests de robustesse, il semble que l’interprétation relative à la sécurité soit la plus étayée. La politique française contrastait fortement avec la politique postcoloniale britannique qui a rapidement cessé d’autoriser l’intervention militaire. Le changement décisif de la politique française a eu lieu quand la France a décidé de permettre le coup d’Etat ivoirien de décembre 1999 alors qu’elle était en mesure de l’empêcher. Cette décision très controversée fut prise par un nouveau président contre l’avis de la fonction publique, plus proche des anciennes pratiques. Cette décision permet de dater avec précision le changement politique » (Collier, Hoeffler et Rohner 2009, 15 ; NDT : notre traduction).8 Les problèmes liés à la gestion des ressources naturelles se sont manifestés au cours des dernières décennies à la suite de la quadruple hausse du cours du pétrole dans les années 1970, du renversement de situation dans les années 1980 et de l’effet des découvertes de gaz naturel et de pétrole sur certaines économies telles que les Pays-Bas et le Royaume-Uni. Le terme de « maladie hollandaise » provient du fait que les Pays-Bas ont été le premier pays à en souffrir. Nous avons déjà mentionné que selon l’analyse de Collier, Hoeffler et Rohner (2009), la proportion des exportations de matières premières dans le PIB est une variable qui augmente la probabilité pour un pays de sombrer dans la guerre civile.
9 L’argument est que les proportions de facteurs caractérisant les économies africaines rendent inévitable un modèle de croissance dans lequel les exportations sont dominées par les produits agricoles et les produits primaires. L’Afrique est bien dotée en ressources naturelles mais manque de compétences. Le préjugé contre ces produits agricoles, implicite dans les politiques d’industrialisation par substitution des importations et de taux de change surévalués qui marquaient notamment l’économie du Ghana entre les années 1960 et 1990, a garanti l’annulation de cette source de croissance. Selon cette analyse, la « mauvaise gouvernance » désigne ces choix politiques qui, s’ils étaient inversés, faciliteraient un modèle de croissance intensif en ressources largement disponibles en Afrique, à savoir les produits agricoles.10 Voir Teal (2001) pour une discussion détaillée des données sur le Ghana.Haut de page

Table des illustrations

Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Titre Graphique 1 – PIB par habitant du Ghana et de la Côte d’Ivoire

Crédits Source : Penn World Table version 6.1, disponible sur http://pwt.econ.upenn.edu/​php_site/​pwt_index.php.

URL http://poldev.revues.org/docannexe/image/111/img-1.png

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Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Titre Graphique 2 – PIB par habitant par région, en 1980 et en 2000 (en USD PPA de 1996)a

Crédits Source : Penn World Table version 6.1.

URL http://poldev.revues.org/docannexe/image/111/img-2.png

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Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Titre Graphique 3 – Niveaux du PIB et taux d’épargne au Ghana et en Côte d’Ivoire

Crédits Source : Penn World Table version 6.1.

URL http://poldev.revues.org/docannexe/image/111/img-3.png

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Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Titre Graphique 4 – PIB et exportations au Ghana et en Côte d’Ivoire (en USD constants de 2000)

Crédits Source : Penn World Table version 6.1.

URL http://poldev.revues.org/docannexe/image/111/img-4.png

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Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Titre Graphique 5 – Volumes des cultures d’exportation et alimentaires au Ghana et en Côte d’Ivoire

URL http://poldev.revues.org/docannexe/image/111/img-5.png

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Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Titre Graphique 6 – Prix du cacao au Ghana et en Côte d’Ivoire

Crédits Source des graphiques 5 à 7 : Anderson et Valenzuela (2008). Les jeux de données intègrent les données sur la production et les prix disponibles sur  http://go.worldbank.org/​U32NJLFN10.

URL http://poldev.revues.org/docannexe/image/111/img-6.png

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Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Titre Graphique 7 – Prix du café et du coton en Côte d’Ivoire

URL http://poldev.revues.org/docannexe/image/111/img-7.png

Fichier image/png, 102k

Le Ghana et la Cote d'Ivoire : une inversion des rôles

Titre Tableau 1 – Estimations de la croissance annuelle moyenne de la productivité totale des facteurs pour le secteur agricole, 1962-2002

URL http://poldev.revues.org/docannexe/image/111/img-8.png

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Pour citer cet article

Référence électronique

Markus Eberhardt et Francis Teal, « Le Ghana et la Côte d’Ivoire : une inversion des rôles », Revue internationale de politique de développement [En ligne], 1 |  2010, mis en ligne le 11 mars 2010, consulté le 29 septembre 2011. URL : http://poldev.revues.org/111 ; DOI : 10.4000/poldev.111
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Auteurs

Markus Eberhardt

Chercheur boursier postdoctoral à l’Economic and Social Research Council (ESRC, Centre d’études des économies africaines, Département d’économie, Université d’Oxford) ; chargé de cours au St Catherine’s College (Université d’Oxford) ; spécialisé dans l’économétrie appliquée et dans les sciences économiques du développement.

Francis Teal

Directeur général adjoint du Centre d’études des économies africaines (Département d’économie, Université d’Oxford).Haut de page

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