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Commander In Chief - Discrimination in chief ?

Publié le 03 décembre 2006 par Heather

medium_commanderinchief.jpgHier soir, la page d'accueil de Yahoo titrait : "Commander-In-Chief : Mais qui garde les enfants ?"
Ce matin, à l'heure des résultats d'audience de la première soirée, un blog d'informations commente ainsi les résultats d'audience de la série et son 'flop' : "Commander-In-Chief : Les femmes présidentes ne portent pas chance aux chaînes françaises". Des petites phrases dont l'accumulation finit par devenir très énervante.

"Mais qui garde les enfants ?"

Les médias ont glosé allègrement sur cette femme 'présidente des Etats-Unis' toute la semaine, encouragée par la campagne de promotion de M6, à peine échaudée par l'échec automnal de "L'Etat de Grace" sur France 2. On verse facilement dans les envolées lyriques et les comparaisons douteuses pour nous conter à grand renfort de redondances le destin de cette première femme présidente venue d'outre-Atlantique. La plupart des jounalistes ne connaissent de la série que sa carte d'identité, un rapide synopsis, un casting avec en tête d'affiche Geena Davis, et une annulation au bout de 18 épisodes.
Mais le pitch de départ suffit à donner de la matière pour remplir quelques colonnes. Pensez-vous, dans la fièvre électorale qui saisit actuellement la France, voilà du pain béni pour qui cherche à monter des parallèles au mieux maladroits, au pire ridicules avec la 'réalité'. Notre réalité franco-française, bien entendu, car si l'on a vaguement entendu parler d'une sénatrice de New York qui aspirerait, parait-il, à l'investiture démocrate en 2008, l'Amérique, c'est bien loin. Dans des élans de narcissisme assumé, la figure d'une femme politique 'locale' est esquissée, quand le journaliste n'abandonne pas toute tentative de subtilité pour se saisir nommément de Segolène Royal et se mettre à ergoter sur les élections du printemps prochain, présentant Mackenzie Allen comme la preuve fictive, mais bien concrète, qu'une femme pourrait arriver à la tête de l'exécutif d'un pays. Versant gaiement dans un lyrisme de circonstance pour clamer le progrès ainsi atteint, ce n'est plus une série américaine (personne pour lâcher d'un air dépité un 'encore une' ?), mais une fiction avant-gardiste, reflet de notre réalité, peut-être de notre futur.

Si tous ceux qui ont écrit ces articles imagés cette semaine avaient pris soin de regarder la série avant. Ils auraient sans doute vite déchanté. Certes, cela n'aurait pas entraîné de changement dans une stratégie marketing d'exploitation si bien huilée désormais, ressortant sans arrières pensées, les mêmes articles, la même instrumentalisation artificielle que quelques mois auparavant pour "L'Etat de Grace". Au moins auraient-ils pris conscience que, dans cette fiction dominée par les relens patriotiques en l'honneur du pays de l'Oncle Sam, tout parallèle avec la réalité française n'avait aucun fondement. Le seul dénominateur commun se résumant au sexe de l'occupant du poste présidentiel, cela peut-il légitimer tout ce qui a été préalablement écrit ?

Le fait que Commander In Chief soit à mon avis une 'mauvaise série' accentue sans doute mon ressentiment à l'égard de cette mise en scène fort peu appréciable de la part des médias. Des dialogues plats, dans un monde manichéen et stéréotypé, placé allègrement sous la bannière étoilée, cette série dessert en réalité la cause qu'on s'obstine à vouloir -à tort- la faire servir.

"Les femmes présidentes ne portent pas chance aux chaînes"

L'échec au niveau des audiences était annoncé, encouragé par une programmation assez curieuse de la part de M6, dans une case horaire où le public ciblé est habitué à ses séries fantastiques. Les chiffres sont tombés ce dimanche matin. Un constat s'impose : ils ne sont pas bons, surtout pour "l'évènement" qu'ont voulu en faire les médias. Quelqu'un pourrait-il exprimer sa surprise ?
La perversité du processus de surmédiatisation passé se révèle alors. Et oui, après "L'Etat de Grace", voilà encore une fiction avec des femmes présidentes qui échoue dans la bataille de l'audience. On confère à ces chiffres la dimension d'un pseudo-sondage et cela occupera encore quelques jours les médias, relançant les sempiternelles interrogations et soi-disant 'débats'.
Bien entendu, le fait que le personnage central soit une femme constitue l'élément retenu par tous. Il est bien connu que les fictions politiques, que dis-je, les séries politiques américaines, sont très prisées en France. Quand il y a quelques mois, Paris Première déprogrammait "Jack & Bobby", initialement diffusée à 20h50, devant les audiences très décevantes réalisées, si les quelques-uns s'y intéressant pouvaient expliquer l'échec par le caractère très indigeste et moralisateur de la série, il ne venait à l'idée de personne d'invoquer d'autres causes. Frileuse, France 2 n'a jamais entrepris de diffuser "A la Maison Blanche" avant minuit.
"A la Maison Blanche" justement, diffusée actuellement en prime-time sur France 4 le samedi soir, avec laquelle la programmation déconcertante de M6 plaçait "Commander In Chief" en concurrence directe. Deux séries traitant de la présidence américaine. Quasiment deux Amériques pourrait-on dire en les comparant. Pour les amateurs du thème, la disparité entre les qualités des programmes proposés ne laissaient guère d'hésitation avant de zapper sur la chaîne du service public, tant "A la Maison Blanche" joue incontestablement dans une autre dimension.

Mais l'on retient donc ce dimanche ce qu'on assimile à une désaffection des téléspectateurs français envers les femmes présidentes. Raccourci dans la droite lignée de la confusion et du mélange des genres suscités par la couverture médiatique de la programmation de la série.
Conclusion qui laisse un goût amer à l'observateur extérieur de cette instrumentalisation qui vira à la mascarade.


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