Magazine Société

Imbroglio low cost

Publié le 11 octobre 2011 par Toulouseweb
Imbroglio low cost

A son tour, Iberia se lance dans l’arène. On s’y perd

Voici à présent Iberia, avec la bénédiction de l’International Airlines Group, qui franchit le Rubicon : Iberia Express sera mis en place dans le courant de l’hiver et commencera à fonctionner à la mi-2012, avec quatre puis treize Airbus A320. L’objectif tient en peu de mots, reprendre des parts de marché à la concurrence et redresser les comptes des lignes intérieures de la compagnie espagnole.

Dans ce cas-ci, une seule «base» est prévue, Madrid-Barajas, les avions seront tout simplement prélevés sur la dotation de la maison-mère mais le personnel devrait être recruté à l’extérieur. Une façon de faire qui, d’entrée, suscite un profond mécontentement des pilotes d’Iberia et relève, semble-t-il, d’une erreur pratique et psychologique en même temps qu’elle constitue une sérieuse maladresse. Chacun sait, en effet, qu’il n’est pas possible de faire cohabiter deux grilles salariales au sein d’un même groupe, ce que pourrait tenter de faire Iberia Express.

Un premier projet du même ordre avait été étudié en 2009 puis abandonné. Cette fois-ci, Iberia estime ne plus pouvoir se permettre d’attendre, compte tenu des pertes accumulées. Elle cherche à réduire impérativement ses coûts d’exploitation, en faisant appel à des mesures qui apparaissent similaires à celles décidées par Air France pour ses bases (cette terminologie est celle de Ryanair et EasyJet). L’essentiel consiste à faire voler davantage les avions (un aller et retour supplémentaire par 24 heures, avec un premier décollage aux aurores, un dernier atterrissage tardif, des demi-tours à destination aussi court que possible. Il n’y a là rien d’original.

En revanche, on se demande pourquoi Iberia n’a pas confié cette tâche à Vueling, dans laquelle elle y détient de participation importante, ou encore à Air Nostrum. Les dossiers se télescopent, les forces se dispersent et l’essentiel n’est pas traité. A savoir que toutes les grandes compagnies affichent des coûts trop élevés, incompatibles avec un alignement de leurs tarifs sur ceux des «vraies» low cost. Il faudrait tout revoir, tout repenser, tout reconstruire, prendre des mesures radicales mais, à Madrid comme à Paris, on est loin du compte.

Détail révélateur, les A320 d’Iberia Express seront configurés en deux classes, c’est-à-dire utilisés tels qu’ils sont actuellement, et non pas densifiés. Mais leur exploitation sera confiée à une filiale à part entière, option qui n’a pas été retenue par Air France. Cette dernière doit regretter amèrement de ne pas avoir conservé Air Inter en l’état : spécialiste des vols courts, forte d’une culture de la vitesse et de la ponctualité, capable de topologie de la clientèle pour bien moduler ses tarifs, elle aurait fait merveille en ces temps de grand chambardement.

Le moment des grandes conclusions philosophiques n’est pas encore venu mais sans doute peut-on esquisser un premier commentaire. A savoir que les ténors classiques («legacy carriers», disent les Anglo-Saxons) ont peur du changement. Et cela au point d’écarter les évidences, de nier hypocritement que l’avenir est aux low cost tout simplement parce que les tarifs appliqués sur les lignes courtes classiques ne sont plus acceptables, ne sont plus tolérables aux yeux d’une clientèle qui a profondément changé. Sur les vols courts, les passagers attendent des prix raisonnables et n’attendent pas la distribution gratuite de journaux ou la course de vitesse imposée au PNC obligé de distribuer des boissons sur des vols de 40 minutes, montée et descente comprises. Cela sans même parler de cas extrêmes mais bien réels comme les tarifs qui évoluent dans une fourchette de 500 à 600 euros, notamment sur Toulouse-Marseille. Autant s’y mettre à plusieurs et voyager en taxi.

Iberia ne sera sans doute pas la dernière à s’aventurer dans une voie sans issue. Mais c’est en vain que l’on attend un «printemps» de l’IATA ou de l’AEA, une simplification drastique des rouages des réseaux court-courriers, une vaste opération de dé-sophistication, voire de démythification, qui ramènerait ce beau monde aux fondamentaux. Rien de tel ne pointe à l’horizon, l’interminable basse conjoncture et les mauvaises habitudes des producteurs de pétrole continuent d’avoir bon dos. Et, dans le même temps, Ryanair, EasyJet et les autres en terminent de s’incruster, d’accaparer les bonnes places. Plus on avance, moins on comprend.

Pierre Sparaco-AeroMorning


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Toulouseweb 7297 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossiers Paperblog

Magazine