La BBC, le calendrier et les non-chrétiens...

Par respect pour les non chrétiens

Que le pays qui s’attribue le premier méridien – celui de Greenwich – soit aussi celui qui réforme le calendrier, voilà qui fera rire! On l’aura appris, en effet, désormais à la BBC, par respect pour les non-chrétiens, on ne situera plus les millésimes avant ou après le Christ, mais tout simplement avant ou après “l’ère commune”. Tant qu’on y est, si l’an 1 n’est plus celui de la naissance du Christ, pourquoi ne pas chercher un autre événement important pour recommencer le calcul à zéro? Les premières conquêtes de l’empire britannique, par exemple? Ou bien la date de la bombe d’Hiroshima qui nous a fait entrer dans l’ère de la peur nucléaire? Ou la naissance de Steve Jobs, le co-fondateur d’Apple – ceci dit avec beaucoup de respect et d’admiration?

Même la révolution française, qui s’est essayée à changer le calendrier, n’y est pas parvenue, pas plus que Lénine ou Mussolini. La révolution du Christ aura, en tous les cas, duré plus longtemps parce que, comme le dit le philosophe italien Croce, c’est « au centre de l’âme » qu’elle a agi. En son temps, un Roger Garaudy, avait eu un texte saisissant. « Toutes les sagesses, jusque-là méditaient sur le destin, sur la nécessité confondue avec la raison. Il a montré leur folie, Lui le contraire du destin. Lui, la liberté, la création, la vie. Lui qui a défatalisé l’histoire. » L’originalité de Jésus, à en croire celui qui fut membre du parti communiste, est précisément d’avoir donné à l’Histoire ses lettres de noblesse: elle est écrite par nous et non par les astres ou le destin aveugle. Désormais, le temps n’est plus cyclique, mais comme une flèche pointée vers l’avenir, au gré de notre liberté. L’âge d’or n’était plus derrière nous, mais devant nous. L’histoire pouvait être habitée par le « principe Espérance » (Ernst Bloch).

Que le christianisme soit de moins en moins une référence en Europe, c’est certain. Le continent qui est l’héritier de « la plus grande révolution que l’humanité ait jamais accomplie » (Benedetto Croce) et qui l’a détournée à son profit, la renie. Mais faut-il maintenant qu’il exporte ses fantasmes au reste de la planète et répande ses ressentiments un peu partout? Le Christ représente, aux yeux de beaucoup, chrétiens ou non, un tournant de notre histoire humaine. N’est-ce pas méprisant pour les gens qui ne partagent pas cette foi chrétienne d’oser penser qu’ils ne sont pas capables de reconnaître des faits historiques?

Editorial du P. Charles Delhez, paru dans le « Dimanche Express » n°36 du 16 octobre 2011