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En France, on ne s’indigne pas

Publié le 17 octobre 2011 par Copeau @Contrepoints

Mais pourquoi la France n’est-elle pas affectée? Pourtant, les conditions de l’indignation y sont réunies autant qu’en Espagne ou aux États-Unis.

Par Guy Sorman

En France, on ne s’indigne pas
La protestation contre les excès du capitalisme mondialisé avait commencé au printemps, à Madrid. De là, elle devait gagner les grandes villes d’Espagne, puis Athènes. Aux États-Unis, le mouvement Occupy Wall Street progresse en popularité et suscite des répliques à Chicago et Boston. Londres est contaminée à son tour.

Les sceptiques constatent que le nombre de ces indignés reste très modeste tandis que les médias leur accordent une attention excessive. Leurs revendications sont confuses : contre les capitalistes, pour l’emploi, sans balise ni boussole. La composition sociale de ces groupes rappelle plutôt le Sex, Drugs & Rock and Roll des années 1960 qu’un mouvement révolutionnaire de travailleurs et citoyens engagés. Ces indignés, peut-être, seront dispersés par l’hiver. Peut-être pas : tout mouvement social qui débute est imprévisible.

Mais pourquoi la France n’est-elle pas affectée ? Les conditions de l’indignation y sont réunies autant qu’en Espagne ou aux États-Unis. Le chômage et les inégalités sont comparables. Des élections prochaines devraient inciter à faire pression sur les candidats. La concentration des étudiants à Paris pourrait fournir les troupes nécessaires à une occupation de l’espace public. La tradition de la barricade est nôtre et Mai 68 ne fut-il pas français ?

Une explication peut-être, à la passivité singulière des indignés français : l’esprit de révolte est chez nous, canalisé par des partis politiques. Aux États-Unis et en Espagne, et dans la plupart des démocraties occidentales, les ennemis du « système » ne peuvent s’exprimer que dans la rue. En France, ils se trouvent encadrés au parti socialiste, chez les communistes et les trotskistes. Un José Bové, en France, finit au Parlement européen : un indigné français a vocation à devenir un notable.

La prolifération des partis extrémistes, extrême droite et extrême gauche (convergeant dans l’anti mondialisme et l’anti capitalisme) est une originalité française : elle parait archaïque, accablante, irréaliste. Mais sa vertu inattendue est d’intégrer les ennemis du système dans le système. Les indignés français n’occupent pas la Place de la Bourse à Paris : ils sont candidats aux élections municipales.

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