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Les gogos, les nigauds et le sel sur la queue par Karl Grünberg

Par Haykel

Karl-ssssss1111.jpgPour PLANETE PHOTOS, Karl Grünberg, travailleur social et animateur de ACOR SOS Racisme entame une série d’articles sur l’UDC, un parti qu’il a suivi depuis sa création. Après “Le programme de l’UDC: attrape-nigaud”, Karl Grünberg replonge de nouveau dans les arcanes de ce parti qui puise son mécanisme dans “l’arsenal nationaliste et raciste élaboré au cours des années 1930 et 1940”.
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Mon grand-père, apprit au très petit garçon que j’étais qu’on mettait du sel sur la queue des moineaux pour les attraper. Je mis des années à comprendre qu’ils étaient déjà attrapés si on leur salait la queue.
Ma grand-mère, excellente pédagogue, ratait peu d’occasions pour éduquer ma méfiance à l’égard des «pouvoirs» et ma sympathie pour leurs dupes. Ma question «Nonna, c’est quoi le fascisme?» me valut cette réponse: «Le fils de Mussolini, lui demanda à la table familiale ce qu’était le fascisme. «Taci e mangia» réagit son père». («Tais-ton et mange» Mes grands-parents étaient Italiens). Ma grand-mère me peignait aussi le «Malade imaginaire», en gogo qu’un cuistre abusait.
Comment changer un marronnier en plante vénéneuse ?
«En journalisme, un marronnier est un article d'information de faible importance meublant une période creuse. Tout comme le marronnier (l'arbre) qui, tous les ans, produit ses fruits, le marronnier journalistique reproduit les mêmes sujets avec plus ou moins d'originalité. Les sujets «débattus» dans un marronnier sont souvent simplistes, parfois mièvres» (Wikipedia).
Il y a peu, les déjections canines, les muselières des toutous ou les ferrazinettes étalaient leur insignifiance dans la presse estivale et provinciale. Quelqu’un sait-il encore ce qu’était une ferrazinette? Pourquoi, comment en moins de deux ans la crainte du bonneteau a-t-elle conquis une telle importance?
1540093767.jpgApparu à Genève il y a une paire d’années, ce jeu amuse les touristes sans susciter aucune nuisance. Seules des personnes consentantes se livrent à ce jeu d’argent. Elles espèrent duper l’animateur de jeu en devinant la place d’une petite bille que ce dernier a cachée sous l’une des trois boîtes d’allumette qu’il a disposées à même le sol, sur un petit tapis.
Le joueur qui se limite à jouer une seule fois a une forte chance de gagner. Pour attirer les joueurs, le «croupier» d e rue doit rendre le jeu attrayant. Souvent il laisse au joueur le gain de sa première mise. Le joueur qui espère tromper deux fois la dextérité du «croupier» perd. Et restitue son gain précédent. S’il s’obstine, il perd deux fois. Et l’animateur du jeu a gagné.
A la différence des casinos, cette activité n’entraîne pas d’addictions connues. Et la probabilité d’un gain est plus élevée qu’avec les loteries auxquelles beaucoup s’adonnent.
Lorsque Gogo et Nigaud montent dans un bateau, tous deux tombent à l’eau
Et pourtant, cette insignifiante activité a été stigmatisée au point de susciter le dépôt d’un projet de loi, un nombre invraisemblable d’articles de presse, et la constitution d’une milice qui a agressé des joueurs après une campagne d’affichage sauvage. La presse et les autorités ont recensé avec compréhension cette campagne d’affichage et de passage à l’acte. Ridicule, la croisade anti-bonneteau serait une contribution à la lutte contre l’insécurité.
UDC Final-ssssss1111.jpgDeux remarques
Premièrement. L’indifférence témoignée à une activité autrement lucrative et génératrice d’insécurité: le commerce des matières premières. A la différence du jeu de bonneteau elle se mène dans la discrétion, sinon dans le secret. Selon l'Association genevoise du négoce et de l'affrètement, la cité de Calvin gère, contrôle et assure le courtage de 30% du pétrole et des céréales dans le monde, de 20% du sucre et s'occupe du transit par bateau d'un cinquième des matières premières brutes au monde. Les spéculations de ces entreprises et leur soutien à des régimes corrompus ou à des seigneurs de la guerre sont responsables de terribles détresses. En Suisse aussi l’impact des sociétés de courtage est fort. Si leur participation au produit intérieur brut est semblable à celle de l’industrie des machines, elles proposent 10 fois moins d’emplois. Déclarées au fisc comme «auxiliaires», elles paient, à Genève, la moitié du taux d’impôt appliqué aux sociétés ordinaires. Et personne n’ignore leur pression sur le marché du logement asséché au profit de leurs cadres, à des niveaux de loyer inaccessibles pour la classe moyenne locale.
Deuxièmement. Le travail de terrain de petites équipes militantes, souvent liées aux milieux identitaires, aux «nationalistes révolutionnaires» ou autres groupuscules fascistes et leur influence au sein des partis xénophobes. En Suisse romande, dès la fin des années 1990, les Hammerskins, Avant-Garde Suisse puis les Jeunesses identitaires, Altermedia puis Novopress, sont intervenus au sein des jeunesses villageoises, dans les écoles professionnelles ou les villes périurbaines pour tester des rumeurs accréditant l’existence de Suisses victimes d’étrangers.DSC06560-ssssss1111.jpg
Marquées de slogans dans un premier temps, ces actions se sont affinées. Aux brutalités infligées à des requérants d’asile, à des Arabes, des Noirs ou des Tamouls ont succédé diverses formes de propagande par l’acte puis, plus récemment, de dénonciations du supposé danger de groupes prétendus problématiques, les mendiants roms, les joueurs de bonneteau. Leurs auteurs, il faut le relever, ont su manipuler de grands médias populaires et l’action de partis politiques qui se sont paresseusement, complaisamment ou volontairement moulés dans le soi-disant combat contre le sentiment d’insécurité. Cette synergie avec le terrain semble confirmer les slogans de l’UDC et accréditer ses affiches.
En 1985, commençait la dénonciation des prétendus «abus dans le droit d’asile». Pour s’en prendre à des «ressortissants de pays qui n’ont pas les idées européennes au (sens large)» (Conseil fédéral, 15 mai 1991), pour éviter «l’enchevêtrement culturel» qu’ils étaient supposés susciter (Arnold Koller, conseiller fédéral démocrate chrétien, 1994), les autorités disqualifiaient des personnes et des groupes de personnes que protégeait le droit d’asile.
L’UDC a saisi l’importance d’un dossier qu’elle fut le premier parti gouvernemental européen à traiter. En détruisant «l’Etat social» les grandes entreprises capitalistes affrontent la société. Substituant du lien racial, identitaire au lien social qu’elle a coupé la classe dominante espère rouler gogos et nigauds. Le talent de Christoph Blocher ne suffit pas à expliquer sa vision. La Suisse avait conservé l’essentiel de l’arsenal nationaliste et raciste élaboré au cours des années 1930 et 1940. L’UDC a eu l’audace de s’en servir.

Karl Grünberg
ACOR SOS Racisme

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