Magazine Humeur

Ouf !

Publié le 18 octobre 2011 par Kamizole

Mais le plus dur ne fait que commencer ! Néanmoins gros soulagement quand j’appris dimanche dans la nuit que François Hollande avait gagné la primaire socialiste et d’assez belle façon. J’avoue que plusieurs articles avaient instillé pas mal de doute quant au resserrement de l’écart entre les deux candidats. Je ne pouvais envisager sans frémir une victoire de Martine Aubry sur le fil et si François Hollande l’avait emporté avec un score trop étriqué, sa légitimité comme candidat du PS eût été écornée. Je fus donc soulagée de lire qu’il l’avait emporté 56 % contre 44 %, la participation étant estimée entre 2,7 et 3 millions de votants donc supérieure au premier tour. Essai transformé !

Comme le souligna Ségolène Royal : François Hollande a une "grande légitimité" (Le Monde 16 oct. 2011). Rassembler le plus de voix possible sur le candidat arrivé en tête étant le sens de mon appel à voter pour lui : «les urnes ont donné raison à cette logique politique (…) la première étape vers l'élection présidentielle est réussie. Le candidat peut maintenant passer aux autres étapes (…) L'heure est au rassemblement joyeux». Puisse-t-elle dire vrai ! C’est du moins l’image l’on en retint : Hollande candidat, les socialistes s’affichent rassemblés (Le Monde 16 oct. 2011).

Jean-François Copé qui n’en rate jamais minimise la victoire de François Hollande lis-je sur Le Monde L'UMP juge le PS divisé et Hollande sans expérience nationale (16 oct. 2011) en «estimant qu’avec tous les ralliements qu’il avait engrangés, il aurait dû l’emporter avec 65 ou 70 % des voix». Il faudrait qu’il soit doté de beaucoup plus d’intelligence pour comprendre que comme d’ailleurs n’importe quelle élection, un candidat n’est jamais propriétaire des voix de ses électeurs qui choisissent comme bon leur semble nonobstant les ralliements des battus. L’argument fut repris par Thierry Mariani, ce qui prouve à l’envi que nous avons là encore les «éléments de langage» fomentés à l’Elysée par Franc Louvrier et son équipe de branquignols et repris ensuite en chœur par les habituels chiens de garde de la meute.

C’est vrai pour les réactions de l’UMP au soir de la victoire de François Hollande. Outre Copé, se sont toujours les mêmes - Valérie Pécresse, Thierry Mariani, Laurent Wauquiez, Nadine Morano, Christian Jacob, Valéry Rosso-Debord, Christian Estrosi, Henri Guaino, Claude Guéant et Benoist Apparu pour l’essentiel - qui les ânonnent en boucle. Quand je pense que Laurent Wauquiez fut présenté comme l’intello de l’UMP, ma verve ironique ne se sent plus de joie à imaginer le niveau du reste de la troupe : certainement celui des «classes spéciales» pour attardés mentaux telle qu’il en existait une quand je fréquentais l’école primaire du Château Gaillard.

Je ne pus que me frotter les mains et glousser en découvrant un article du Nouvel Obs : L'UMP, un parti de perroquets ? (10 oct. 2011) reprenant une information du Monde Critique de la primaire PS : un document révèle les éléments de langage de l'UMP (9 oct. 2011). Que l’Elysée rédigeât de courtes fiches à titre d’argumentaire pour ceux qui doivent monter au créneau dans les médias contre les socialistes ne me surprit guère au demeurant tant cela me semblait évident depuis plusieurs années. Les avoir sous les yeux ou apprises par cœur étant censé leur éviter de raconter n’importe quoi - même si c’est en soi du grand n’importe quoi ! Au lendemain du 1er tour des primaires, les trois arguments de fond (que nous entendîmes ad nauseam) consistaient à relativiser la portée du scrutin, pointer les divinisions du PS et l’absence de leader naturel, critiquer la stature du candidat choisi (quel qu’il fût : le seul qui avait grâce à leurs yeux étant Manuel Valls, moderne : entendre ultralibéral) et le programme inapplicable

Mais encore faut-il se servir de ces fiches au bon moment ! Je rigolai donc comme une baleine en apprenant que l’argument utilisé par Sarkozy le 10 octobre 2011 devant les responsables de la majorité : «malgré un pilonnage médiatique sans pareil, la participation à la primaire est assez loin de ce qui était annoncé» avait été mis en exergue par une fiche rédigée le 5 octobre 2011, «soit quatre jours avant le lpremier tour de la Primaire PS… ou «comment commenter un événement politique avant qu'il survienne» pouvait ironiser l’auteur de l’article malheureusement anonyme…

Qui narrait en outre les réactions de Jean-François Kahn, participant en même temps que Nadine Morano - qui avait dû oublier d’apprendre ses fiches par cœur - le 10 octobre 2011 sur France 2 à l’émission "Mots-Croisés" et ne put se retenir de lui envoyer une pique : «Les membres de l'UMP sont-ils des "magnétophones", et dans ce cas quel crédit donner à leurs déclarations, au lendemain du premier tour de la primaire PS ?» tant elle fut maladroite, bafouillant et tentant d’esquiver la question. Ce à quoi la donzelle répondit - sans doute avec son habituelle agressivité :  «C'est n'importe quoi ! Vous êtes en train de dire que je n'ai pas de cerveau, que j'ai besoin d'un cadrage. On a pas le droit à l'UMP d'avoir une analyse, notre analyse ?».

Pour avoir des perroquets dotés de longues oreilles asiniennes et jappant à qui mieux-mieux leurs éléments de langage, je suis persuadée que le staff de communicants a recruté un savant fou tenant à la fois des docteurs Folamour et Jeckyll qui aura réussi cette splendide manipulation génétique. M’étant souventes fois moquée des dents de Nicolas Sarkozy qui ressemblent étrangement à celles d’un piranha, je ne m’en amusai que davantage en voyant un titre sur Le Monde Le piranha à ventre rouge ne fait pas que mordre, il aboie aussi (16 oct. 2011) faisant état d’une communication récente d’Eric Parmentier, directeur du Laboratoire de morphologie fonctionnelle et évolutive de l’université de Liège et notamment donc ce piranha à ventre rouge (Pygocentrus nattereri) qui ne se contente pas de mordre - fort méchamment : une chercheuse du labo eut un doigt à moitié sectionné ! - mais jappe lorsque le piranha est manipulé ou prisonnier d'une épuisette… Je sais donc maintenant pourquoi le fameux visiteur du Salon de l’agriculture - traité de «Pôv con» par Sarkozy comme tout le monde s’en souvient - refusa obstinément de lui serrer la main…

Sans doute Jean-François Copé se sert-il de cet argumentaire mais il devrait s’abstenir d’improviser surtout quand il se réfère à l’histoire ! Âneries garanties… Je l’avais épinglé pour avoir osé comparer l’euro symbolique demandé aux participants à la primaire socialiste - y compris les militants du PS et j’ai apprécié que nous fussions tous traités à la même enseigne - au suffrage censitaire en vigueur pendant la Monarchie de Juillet. Mais il aura fait encore plus fort en comparant la proposition d’Arnaud Montebourg de nationaliser les banques en perdition sans bien entendu les indemniser dans la mesure où l’Etat est obligé de le recapitaliser… - peut-on avoir le beurre, l’argent du beurre et de surcroît le sourire du Trésor public et des contribuables ? - à ce qu’avaient fait les bolcheviks en 1917 !

Sans doute son concept de démondialisation les dérange-t-il mais je n’arrive pas à imaginer Arnaud Montebourg en bolcho le couteau entre les dents ! L’on devrait de surcroît rappeler à Jean-François Copé que ce fut un certain… Charles de Gaulle qui fut à l’origine de la nationalisation des banques en 1945 ! Le chef de l’UMP a une idée si peu claire de l’histoire qu’il n’hésite pas à soupçonner le député de Saône et Loire de collusion avec Marine Le Pen ! Excusez du peu mais vous ne me ferez jamais croire que les électeurs d’une région aussi calme et tranquille que le Charolais lui donneraient leur faveur s’il était un extrémiste de gauche ou de droite…

«Le candidat désigné sera l’otage de ce troisième homme qui défend une vision radicale et extrémiste (…) expression d’un courant populiste qui en appelle à la fermeture des banques des frontières et à l’expropriation des banques (et a reçu, outre 17 % supposés d’électeurs militants socialistes - vous avez bien lu comme moi «supposés» !). Et a un soutien de choc en la personne de Marine Le Pen (…) On nous fait le procès systématique de supposées collusions avec le Front national. Nous ne sommes pas disposés à recevoir des leçons de morale»… fermez le ban !

J’aurais l’occasion de revenir sur les propositions de Marine Le Pen dont il est risible qu’elle se posât quasi comme l’inventrice de la démondialisation… Ses conseillers (issus des rangs de la gauche comme nous l’apprit Marianne) devraient l’avertir qu’une partie des militants et intellectuels de gauche ne l’a pas attendue. Je pense notamment à une foultitude d’articles du Monde diplo dénonçant l’ultralibéralisme depuis une bonne vingtaine d’années…

Maintenant que le candidat est connu - souvenons-nous que Copé était impatient d’en découdre et de décortiquer le programme du PS ; une convention nationale de l'UMP doit même se réunir mardi sur ce sujet - l’UMP peut monter au créneau et continuer concentrer ses attaques sur François Hollande, le candidat du "rien" (Le Monde du 13 oct. 2011)… Positivement charmant et d‘un goût très délicat ! Comme le souligne Patrick Roger «les amabilités ne font que commencer et l’artillerie lourde - la Grosse Bertha ? - est sortie : «Hollande, c'est rien, c'est le plus petit commun dénominateur, c'est le truc qui ne dérange personne. Il ne s'est jamais positionné sur rien. Il n'y a pas une proposition. Son contrat de génération est grotesque. Il n'a pas sorti une idée pendant dix ans. Ce garçon est absolument incapable de prendre une décision». Si Hollande n’est "rien", ce que je ne crois absolument pas, je suis en revanche persuadée que Copé atteint le "degré zéro" de la politique.

L’entreprise de démolition systématique de François Hollande et du Parti socialiste s’appuie sur trois axes majeurs - bien entendu concoctés à l’Elysée.

  • Il s’agit de souligner la division entre la gauche «molle» et la gauche «sectaire»

selon Jean-François Copé : «on a là deux marques de fabrique, qui seront assez présentes tout au long de cette campagne (…) la droite aurait beaucoup de questions à poser aux socialistes au pluriel - c’est ça, oui ! Si vous imaginez que les socialistes vont répondre à vos injonctions stupides, vous pouvez toujours courir… Cela fera le plus grand bien aux ventripotents - parce qu'on a compris quand même qu'il y avait une large fourchette, et qu'entre Manuel Valls et Arnaud Montebourg, c'était les deux infinis, quand même»… Argument repris par Thierry Mariani : «Franchement voir Arnaud Montebourg et Manuel Valls se serrer la main et s'auto-congratuler derrière le même candidat, cela mérite un bon film comique»… chez lui cela doit être plutôt série B.

Laurent Wauquiez ne pouvait être en reste ! J’ai beau m’attendre à énormément de stupidité de sa part, j’avoue que là, il me trouve le cul… «Les socialistes ressortent de ces primaires en ayant un peu mal aux adducteurs. Qu'est-ce qui sort ? Trois tendances: la démondialisation de Montebourg, la gauche dure de Martine Aubry, la gauche molle de François Hollande (…) Donc, ce soir, c'est la victoire de la gauche molle mais je trouve que ça risque fort pour François Hollande d'être un peu une victoire à la Pyrrhus. Comment est-ce qu'il va faire ? Les primaires ont dégagé un candidat mais pas de clarté»…

«Mal aux adducteurs» ? J’aimerais qu’il m’en expliquât la raison. Sinon j’ai ma petite idée perso sur la question : c’est à force de prendre de la part des joueurs de l’UMP tous les méchants tacles par derrière !

  • Un candidat mal élu, une première secrétaire désavouée

Je ne reviendrais pas sur leur appréciation du score obtenu par François Hollande. S’il est vrai que Martine Aubry a subi un revers, «un désaveu des militants et des sympathisants» ce n’est certainement pas à Nadine Morano de décider qu’elle «devrait démissionner ce soir» ! Occupez-vous de ce qui se passe dans votre propre parti, la majorité ne me semble pas aussi unie que vous persistez à tenter de le faire accroire, ce qui est chaque jour démenti même et y compris au sujet des primaires de la droite.

A partir du moment où Martine Aubry semble tout à fait décidée à jouer le jeu et mobiliser l‘ensemble du Parti socialiste pour tenter de faire gagner François Hollande en 2012 -  pourquoi révoquerais-je ses affirmations en doute d’autant que son avenir politique est également en jeu : on ne lui pardonnerait aucunement un échec si elle y avait pris quelque part, le souvenir de 2007 est vivace dans toutes les têtes ! - je ne vois pas pourquoi elle devrait passer la main.

  • Gagner la primaire, ce n’est pas gagner la présidentielle

Il ne faut pas sortir de l’Ena ou de Sciences-Po pour le savoir et c’est certainement l’affirmation la moins stupide de leur démonstration. J’y reviendrais.

Toutefois cela s’inscrit bien évidemment dans le travail de sape à l’encontre de François Hollande que «depuis le début de la campagne électorale ses adversaires politiques se sont employés à décrédibiliser en tant qu’homme d’Etat». Nadine Morano - encore elle ! Et je suppose sur le ton hystérique que nous lui connaissons - qui «constate aussi que les votants à cette primaire ont préféré l’inexpérience nationale et internationale d’un François Hollande à l’ancienne ministre et dame de fer des 35 heures, dont la France a eu tant de mal à se remettre»…

Autrement dit, si Martine Aubry avait gagné ils auraient continué à lui taper dessus au sujet des 35 heures, dont je rappellerais qu’en tant que ministre du travail elle mit en forme une proposition de Dominique Strauss-Kahn. Si par extraordinaire Arnaud Montebourg l’avait emporté, ils auraient continué à fustiger le bolcho-facho au risque de faire crouler de rire plus de la moitié de la France…

Quant à l’inexpérience de François Hollande - il rappelle à juste titre que Lionel Jospin l’associa étroitement en tant que 1er secrétaire du PS à toutes les décisions politiques concernant aussi bien les affaires françaises qu’étrangères. Je ne pense pas que le bilan soit magnifique à cet égard concernant Nicolas Sarkozy nonobstant ce qu’il voudrait nous faire accroire Je suis tombée tout à fait par hasard sur un article du Point dont le titre était tellement significatif que je ne pus manquer de l’ouvrir "Merkozy" agace les dirigeants européens(14 oct. 2011). Selon Alain Franco (correspondant à Bruxelles) et sans entrer dans les détails «Les autres pays de la zone euro reprochent au couple franco-allemand de les mettre sur la touche»… Drôlement malin, hein ? Quand l’on sait que les décisions doivent être prises à l’unanimité des Etats-membres ! Pas étonnant qu’ils ne parviennent jamais à prendre des décisions…

Thierry Mariani reprend à son compte la charge contre François Hollande «Etre candidat et gagner la primaire c'est autre chose qu’être président pour la France» - c’est du français, ça ? - «Quand je vois son expérience, quand je vois ses propositions en surtout quand je vois son bilan, le département le plus endetté de France, je me dis que ce n’est certainement pas la meilleure solution dans quelques mois pour notre pays»…

M’sieur Mariani, devrait-on vous rappeler que les départements et les collectivités locales sont endettées en grande partie parce que l’Etat ne compense pas les dépenses - de plus en plus nombreuses - qu’il met à leur charge ? Quant à la saine gestion, laissez moi rire à l’aise en pensant à l’énormité de la dette - tellement astronomique que je ne peux même pas convertir en francs sur ma calculette ! - que Nicolas Sarkozy laisserait en 2012 (l’ardoise sera drôlement salée) : 1600 milliards d’euros ! Dont tous les experts de bonne foi affirmant qu’un tiers seulement doit être attribué à la crise économiqueles deux tiers relèvent bien entendu de la plus mauvaise gestion que la France n’ait jamais connu.

Alors, SVP : camembert ! «La meilleure solution dans quelque mois pour la France» n’est certainement pas Sarkozy pour 5 ans de plus : elle en crèverait et nous en même temps…

Autre élément de langage qui fait florès : l’exemple des primaires italiennes repris par Nadine Morano «Walter Veltroni, pourtant investi à 75 % des voix - j’aurais plutôt dit "avec" mais bon… - comme candidat par la gauche, perdant quelques mois plus tard lors des législatives face à Silvio Berlusconi»…

Comparaison n’est pas raison et le système électoral italien est fort différent de la France. S’agissant de Nadine Morano, j’hésite entre stupidité et/ou mensonge mais comme les deux sont réunis, les oreilles qu’elle a déjà fort longues vont encore pousser d’un cran en même temps que son nez. J’avais le parfait souvenir que la loi électorale avait été modifiée à plusieurs reprises par Silvio Berlusconi dans son seul intérêt. Je suis donc allée sur Wikipedia me rafraîchir la mémoire et je ne reviens pas déçue du voyage : en effet, la loi électorale «a été à nouveau modifiée à la fin de l’année 2005, pour rétablir un scrutin proportionnel de listes bloquées, de façon à réduire l’échec probable de la "Maison des libertés"… Réforme critiquée, y compris par le ministre qui en a présenté le projet, elle est qualifiée de "Porcellum" (de porcata… une cochonnerie). En France; nous parlerions de «loi scélérate»…

Quant à la "Maison des libertés", c’est l’exemple parfait d’anti-phrase dans le mesure où c’est le ramassis de Forza italia de Berlusconi, Ligue du Nord (populiste en diable) et autres partis plus ou moins crypto fascistes, etc… Si Nadine Morano n’a pas d’exemples plus probants d’élections démocratiques, elle ferait mieux de fermer son grand clapet à sarkonner.

François Hollande sait pertinemment que le plus difficile est désormais devant lui. Puisse-t-il rassembler tout son camp ! Et n’avoir point à s’exclamer comme Voltaire «Mon Dieu, gardez-moi de mes amis ; mes ennemis, je m’en charge» ! C’est qu’ils ne vont pas lui lâcher la grappe les chiens de garde de l’UMP… Ils ont trouvé un nouvel os à ronger et vont y user leurs dents pendant plus de 6 mois. Leur cri de guerre n’est pas «on va gagner !» - au lieu de «décortiquer» le programme socialistes ils devraient présenter leur qui est encore dans les cartons à supposer qu’ils en aient la moindre ébauche dont de toute façon Nicolas Sarkozy n’a rien à secouer - mais «on va cogner !»…

Matin, midi et soir. Nous n’avons eu jusqu’à présent que les hors-d’œuvre, je me doute bien que le plat de résistance sera encore plus épicé. Encore heureux s’ils ne l’accommodent pas de quelques boules puantes sorties tout droit de leur bauge.

A ma petite mesure, j’essaierai de leur rendre coup pour coup, œil pour œil, dent pour dent. Sans nulle boule puante, je n’ai jamais mangé de ce pain-là. Ils n’ont pas de chance avec la mémé Kamizole car le cri de guerre du clan de mes lointains aïeux du côté écossais fut : «aut pax, aut bellum»… La paix ou la guerre ! Tout un programme.

La route jusqu’à avril et mai 2012 sera longue, étroite et sinueuse, semée de redoutables pièges. Pas uniquement ceux que lui tendront Sarkozy, l’Elysée et la meute hurlante des chiens de garde. Les plus à gauche - Mélanchon notamment qui ne fait jamais dans la dentelle - l’attendront au tournant. Ils voudront lui faire promettre plus qu’il n’est possible de tenir pour démontrer qu’il ne vaut pas mieux que ses adversaires de droite. Une analyse très pertinente de Françoise Fressoz dans le Monde qui voit dans la victoire de François Hollande le triomphe de la gauche réaliste (17 oct. 2011).

François Hollande ne devant pas répéter les erreurs de 1981 : beaucoup trop de promesses intenables et souvent idéologiques. Les nationalisations par exemple alors que j’étais totalement d’accord avec notre prof d’éco en 1983 quand il disait qu’il eût suffi d’acquérir sur le marché suffisamment d’actions pour obtenir une minorité de blocage et donc peser sur les décisions prises dans les conseils d’administration, et ce d’autant plus que j’ai le parfait souvenir d’une désastreuse décision du Conseil constitutionnel alourdit encore la facture… tout cela pour arriver en 1983 au tournant de la «politique de rigueur» de Pierre Mauroy… et la perte des élections législatives en 1986 après de nombreuses élections locales.

Ne croyez surtout pas que les électeurs fussent aussi versatiles que certains le prétendent : ils détestent avoir été trompés mais paradoxalement n’accorderaient nul suffrage à un candidat leur prédisant «du sang et des larmes»… préférant accorder leurs suffrages à celui qui promet que demain «on rase gratis»… manque de pot, avec Sarkozy les pauvres benêts qui avaient cru à toutes ses mirifiques promesses n’eurent droit qu’aux lendemains qui déchantent : nous sommes «plumés et tondus à sec» avec le "fratrès" (barbier ou écorcheur pour un Solognot) «qui y’eux crache directe su la gueule»…

Mieux vaut promettre moins mais tout tenir. Je suis persuadée depuis trop longtemps que «la politique est l’art du possible» pour en avoir une vision idéaliste (a fortiori idéologique !). Je me suis fait tirer dessus souventes fois à bout portant ou boulets rouges quand je prônai le réalisme - même en ajoutant car c‘est mon intime conviction qu‘il ne faut toutefois jamais perdre de vue l‘idéal qui constitue la ligne d‘horizon. Mais tant pis, je persiste et signe.

Osons une gageure : être réaliste sans perdre de vue l’idéal mais sans succomber à l’idéologie !

Bien évidemment, François Fillon - mais il n’est pas à une ânerie près ! - jugeant le projet socialiste "à côté de la plaque"(Reuters 17 oct. 2011) il ne pouvait que s’en moquer, prétendant que le discours de François Hollande aurait consisté à dire «au fond, mon programme, c'est de réenchanter le rêve français, on se dit que, vraiment, le projet du Parti socialiste est à côté de la plaque»… Mauvaise foi pure et simple car il se contente de monter en épingle un seul élément du discours de François Hollande dont on nous dit qu’il fut «grave et volontariste»… tout le contraire d’un hurluberlu !

«Je mesure la tâche qui m'attend, elle est lourde et grave. Je dois être à la hauteur des Français qui n'en peuvent plus de la politique de Nicolas Sarkozy». Promettant la victoire de la gauche mais expliquant que «la tâche serait difficile». C’est en déclinant l’axe majeur de son programme qu’il a évoqué «le rêve français» qu'il a promis de «réenchanter» en renouvellant sa promesse de donner la priorité à la jeunesse et à l'éducation.

«Réenchanter le rêve français»… Je le comprends comme redonner de l’espoir à des dizaines de millions de personnes qui n’ont pour tout horizon qu’un avenir toujours plus sombre et désespérant dans un tunnel sans fin. Il ne s’agit nullement de promettre qu’immédiatement les lendemains chanteront car comme je l’ai souventes fois écrit les difficultés qui ne manqueront certainement pas plus demain qu’aujourd’hui seront autrement plus faciles à supporter si l’effort est plus équitablement partagé, ce qui suppose en premier lieu une réforme totale de la fiscalité qui passe bien évidemment par la disparition des «niches fiscales» seule susceptible de rétablir la progressivité de l’impôt sur le revenu. Thomas Piketty, jeune économiste de talent - proche du Parti socialiste - défend cette idée depuis au moins 10 ans.

Il est essentiel de redonner de l’espoir à la jeunesse, aussi bien sur le plan de l’éducation que de l’emploi car un pays qui laisse ses enfants en déshérence est un pays sans avenir. Nadine Morano - encore elle ! - a bien pu déclarer que le «contrat de génération proposé par François Hollande était totalement irréalisable» au soir du second tour de la primaire.

Qu’en sait-elle ? Si j’en ai bien compris le principe il s’agit d’embaucher des jeunes sans qualification tout en conservant des seniors qui se chargeraient de leur formation. Je ne sais s’il vous en souvient mais une telle mesure a déjà été mise en œuvre dans le passé sous le nom de «tutorat» pour des salariés qualifiés en fin de carrière acceptant de prendre en charge la formation pratique d’un apprenti et à ma connaissance cela marcha plutôt bien. Son coût serait prohibitif : 8 milliards d’euros par an ? Que les UMP ne viennent surtout pas nous donner de leçons si l’on songe à toutes les dépenses superfétatoires de Nicolas Sarkozy et autres turpitudes de sa clique. Lui qui prétend si mensongèrement privilégier les dépenses «utiles» qu’il faut entendre bien plutôt par «futiles»… Là, il s’agit précisément d’un investissement d’avenir !

«Réenchanter le rêve français»… la formule m’a fait immédiatement penser à Max Weber «Le savant et la politique». Certes, celui-ci critique le charisme des notables contrôlant les partis politiques mais je n’en pense pas moins que le charisme reste un élément essentiel du colloque singulier entre un candidat à la présidence de la République et ses électeurs, le charisme bien compris s’entendant par la vertu de l’exemple… Pour la vertu de Nicolas Sarkozy, prière de repasser et quant à sa République «exemplaire» les multiples «affaires» qui ont émaillé - et continuent d’émailler son quinquennat - ont eu raison de cette «fable» !

Assurément, Nicolas ne manqua pas d’un certain charisme pour avoir su attirer dans ses rets autant d’électeurs dont on peut dire qu’ils n’étaient pas des électeurs "naturels" de la droite - je pense notamment aux ouvriers, séduits par son «travailler plus pour gagner plus» ou à certains enseignants… toutes catégories qui jurent aujourd’hui en règle générale qu’ils ne voteront pas une seconde fois pour lui. Le ressort s’est cassé. Trop de mensonges, trop de mépris, trop de mesures antisociales.

Je ne sais pourquoi me vient à l’esprit l’image de la lampe d’Aladin. Peut-être parce qu’elle rejoint la «pensée magique» de Sarkozy. Mais l’on retrouve dans toutes les cultures des contes semblables où une fois que l’on a épuisé les vœux satisfaits de façon surnaturelle, tant pis si celui qui pouvait bénéficier de ce concours a fait de mauvais choix : il retombe dans sa condition d’origine. Or, nous savons que Nicolas Sarkozy a bâti sa vie sur deux vœux «faire président de la République» - langage de gamin ! - et «faire de l’argent»… Il semble bien avoir réussi à concilier les deux pendant son quinquennat. Le troisième étant peut-être d’être toujours en vadrouille aux frais de la princesse, d’un bout à l’autre de la France et de la planète.

Il aura donc épuisé ses trois vœux. Mais le mésusage qu’il fit des pouvoirs qui lui étaient accordés semble avoir rompu le charme et transformé le conte en cauchemar. Il aura beau prononcer autant de fois «abracadabra» ou n’importe quelle autre formule magique requise, il n’obtiendra rien de plus. Sinon des sondages le montrant à la dérive : passer d’un aberrant 67 % pendant l’été 2007 à 30 % actuellement.

Drôlement pervers, Fillon a qualifié François Hollande de «bon candidat» - sans doute comme punching-ball ? - alors que le programme du PS serait «archaïque et inadapté». Ben voyons, l’ultralibéralisme qui nous renvoie tout à la fois aux pires heures de la révolution industrielle et à la féodalité, c’est le top de la "modernité" ! La politique menée par Sarkozy et sa clique depuis plus de 4 ans est tellement "adaptée" à la situation de la France et des français que nous coulons à pic !

Mais ce qui m’a fait rugir c’est de lire que «Tout candidat qui représente le Parti socialiste dans un pays aussi équilibré que le nôtre, où les élections présidentielles se jouent toujours à quelques centaines de milliers de voix, est un bon candidat»…

Il n’a vraiment pas honte : «pays aussi équilibré que le nôtre» ! Assurément, nous ne vivons pas sur la même planète. Rarement la «fracture sociale» et le paupérisme n’ont atteint un tel degré, touchant désormais une part non négligeable des classes moyennes et l’écart entre une poignée d’hyper-riches - très bien soignés par le pouvoir en place - et la grande majorité des Français n’a été aussi important. Plus de 8 millions de personnes vivant en dessous du «seuil de pauvreté», c’est «équilibré» ?

Une dernière perle de François Fillon qui prend toute sa saveur aujourd’hui par une nouvelle petite ironie de l‘histoire. François Hollande ferait mumuse avec son concept de «réenchantement du rêve français» alors que «Le fond du sujet, c'est le projet au moment où tous les yeux du monde entier sont rivés sur la zone euro et la crise financière, la possibilité pour la première fois qu'un Etat puissant, de la zone la plus riche du monde, de l'Europe, fasse faillite»…

Je ne saurais dire de quel Etat puissant il voulait parler mais la nouvelle est tombée tout à l’heure comme un coup de massue pendant que je corrigeai mon article et jetai un coup d’œil sur ma boîte au «12-15» supplément économique du Monde. Je fus abasourdie en lisant : La note Aaa de la France menacée ? Par l’agence de notation Moody’s qui a émis lundi un premier avertissement concernant la note Aaa de la France. Se donnant 3 mois pour déterminer si la perspective "stable" était toujours justifiée au vu de la dégradation de la situation économique, en conséquence de quoi «Moody’s va surveiller et évaluer cette perspective stable (de la note du pays), au regard des progrès effectués par le gouvernement pour mettre en œuvre les mesures annoncées de réduction du déficit budgétaire»

Notez que cela n’a rien de surprenant : avec 1600 milliards d’euros de dettes la France est bien évidemment en faillite et cela ne date pas d’hier. Je supputais bien que la France fût déjà dans le collimateur des agences de notation mais j’imaginais que Nicolas Sarkozy serait préservé par son statut de président du G20 et du G8 jusqu’à la fin de l’année. Preuve s’il en était besoin que «Nicolas Sarkozy ne fait plus peur» selon la formule d’Anna Cabana dans Le Point. Pas plus en France qu’à l’étranger…

Mais nulle raison de nous réjouir de cette déconfiture… attendons-nous à morfler encore plus grave que ce que nous redoutions : François Fillon, a affirmé lundi soir «qu'il faudrait prendre des mesures nouvelles d'austérité si la France n'enregistre pas une croissance minimale de 1,5 % en 2012. Le budget 2012, qui doit être débattu à partir de mardi par les députés, est bâti sur une prévision de 1,75 % de croissance»…

Dire que ce sont ces bouffons qui prétendent donner des leçons d’économie à François Hollande ! J’ai sans doute le fort d’être plutôt keynésienne mais encore une fois j’aimerais qu’on m’expliquât comment ils peuvent réduire de façon drastique le pouvoir d’achat des ménages et espérer un regain de croissance. C’est la quadrature du cercle.

Enfin, il restera à se demander si les chiens de garde de l’UMP qui devaient se réunir ce soir en convention pour «décortiquer» le projet socialiste et préparer leur plan de bataille contre François Hollande vont persister dans leurs intentions plutôt que se pencher sur cette question si vitale pour l’économie de la France et les Français.


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