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Evan, carnet de bord d'un ange déchu...

Par Bordierlaurent

Il est six heures vingt-neuf et dans une minute, la radio va se mettre en route. Mélanie va ouvrir les yeux, écouter les informations pendant quelques secondes, souffler en entendant la météo que le speaker annoncera maussade, prendre le cadre photo digital où je ferai une apparition tous les dix clichés ; le toucher de son index gauche, sourire bêtement puis, si tout se passe bien, elle devrait également faire une longue caresse à Squeeze, notre chat.

 Concernant Squeeze, ça dépend de lui en fait. De mon vivant il a toujours été dépendant et passait de longues nuits à l'extérieur. Aujourd'hui, il l'est moins et je sais pourquoi. Juste après mon accident il s'est fait jeter par une chatte de race... ça fout un coup, je comprends... Mélanie n'en sait rien et pense qu'il est devenu casanier, préférant le canapé du salon à la cave de l'immeuble. Mon amour se lève enfin. Nous traversons tous trois le salon et c'est Squeeze qui gagne la course ( en me traversant, le tricheur ) pénétrant le premier dans la cuisine. Mélanie sort une paire de ciseaux de l'un des innombrables tiroirs du buffet, découpe nonchalamment un sachet decat's likeet le vide dans sa gamelle. Je lui ai déjà dit que cette marque « cat's like » ne convenait pas à notre chat ; Squeeze n'aime pas les morceaux de carottes insidieusement enfouies dans la gelée... trop de gelées d'ailleurs…

 Mercredi dernier, alors que nous faisions les courses au supermarché, Mélanie hésita entre les sachets cat's like et ceux de chez cat's love. Je pensai fort pour qu'elle attrape le second :

- quinze centimes d'euros de différence ! Melanie, tu abuses...c'est pour Squeeze ! Elle ne m'entendit pas et fit pivoter son caddie en direction des caisses. Le chariot complet de vivres pour dix-mille Tibétains affamés, elle râla également de ne pas trouver sa carte bleue,  je lui chuchotai à l’oreille 

En compagnie de ta carte vitale Méla' ; lorsque tu sors de chez le généraliste, elles finissent tout le temps collées ensemble.Gênée devant la caissière déjà furieuse et impatiente de passer à un autre client, Mélanie la sortit enfin de son sac et ce fut donc encore moi qui dû lui souffler son code secret. Sur le parking je me souviens également avoir vu les pompiers débouler puis freiner brusquement devant le fast-food jouxtant le supermarché.

- Qu'est-ce que c'est que ce bordel...où vont-ils ? pensa-t-elle.

- Un décès Méla, avais-je répondu,  fier de connaître de nouveau tout avant tout le monde. Au bout de quelques minutes un homme s’extirpa de cette cohue, l’air ahuri, puis se dirigea d’un pas décidé vers nous. Je regardai Mélanie qui ne sembla pas le voir et tout en sifflotant je détournai soigneusement la tête en direction de la pompe à essence afin d’éviter de fournir à cet homme un quelconque renseignement à propos de son état.  Il s'écria tout de même :

- Hey !  !

Je ne bougeai pas et continuai de feindre une passion envers cette magnifique station-essence.

– Hey ! Vous là, l'homme en jeans ensanglanté, baskets noires, vous êtes un ange ? Démasqué, je tournai légèrement la tête en sa direction pour moi aussi, lui poser une question pertinente  :

-   Vous apercevez une paire d’ailes derrière mon dos ?

  - Et bien non...c’est que…ce sont les couleurs qui tournent autour de vous qui me... (ahuri)  Suis-je mort ?

 - Aucune idée monsieur. Je détournai de nouveau la tête, mais ce coup-ci en direction de la voiture de Mélanie qui déjà s’affairait nerveusement de ranger nos courses ;  lorsqu’une voix intérieure me rappela amoureusement ma mission.

- Aide-le Evan, je ne t’ai pas mis ici pour que tu passes ton temps à admirer les automobiles ou encore les stations-services…ce n'est pas faux, réfléchissai-je, en fixant les barres chocolatées des gamins qui passant près de moi semblèrent me narguer avec.

- Oui monsieur, vous n’êtes plus de ce monde, lui avouai-je nonchalamment.

-Mais que dois-je faire alors ?

- Je ne sais pas moi...allez visiter votre corps dans le fast-food ! les pompiers tentent une réanimation, mais je vous avouerais que c’est mal barré quand même puisque vous me voyez…


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