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L’utilisation des ressources énergétiques de la Russie dans sa politique étrangère

Publié le 23 octobre 2011 par Vindex @BloggActualite
L’utilisation des ressources énergétiques de la Russie dans sa politique étrangère-Le Drapeau Russe-

La Russie est le plus vaste Etat du monde avec 17 millions de km² (LAVIGNE, 2002) soit 31 fois la superficie de la France pour une population de seulement 143 millions en 2005 (LACOSTE, 2007). Le pays est situé sur deux continents (l’Europe et l’Asie) s’étendant sur 10 000 km de l’est à l’ouest, de la Baltique au Détroit de Béring et 3500 km du nord au sud entre les Iles des Terres du Nord et la Chine. Le pays est le deuxième producteur de pétrole avec 12,3 % de la production mondiale et le premier pour le gaz avec un cinquième de la production (LACOSTE, 2009). Elle cherche à rester influente en Europe de l’Est et Centrale grâce à sa politique énergétiquemalgré celle grandissante de l’UE et de l’OTAN donc des Etats-Unis. Elle cherche aussi à diversifier ses exportations d’hydrocarbures ailleurs que vers l’Europe.

Comment la Russie utilise t-elle « l’arme énergétique » (NIES, 2010) pour rester influente en Europe et tenter de s’insérer dans le concert des grandes puissances en Extrême-Orient ?

Le pays reste attaché à l’Europe notamment en étant un de ces principaux fournisseurs de gaz mais elle perd sa zone d’influence ; à l’opposé en Extrême-Orient, elle se tourne vers la Chine s’en trouvant fortement influencée par l’Empire du Milieu.

La Russie dispose d’immenses réserves en hydrocarbures, peut-être les premières pour le gaz (LACOSTE, 2009). Elle est un des principaux fournisseurs de gaz de l’Union Européenne. C’est l’entreprise publique Gazprom qui gère cela et l’UE craint que la Russie ne se serve de « l’arme énergétique » contre elle (NIES, 2010) pour peser dans les décisions géopolitiques. Suzanne NIES déclare que ce serait peu profitable pour elle car l’UE est son principal client. En revanche, elle n’hésite pas lorsqu’il s’agit d’Etats qu’elle considère relevant de son aire d’influence, « l’étranger proche ». En effet, La Russie a une conceptiond’une géopolitique en aire d’influence et rapports de force (NIES, 2010). Un exemple de crise est celui de la « Guerre du gaz Turkmène » en 2009 pendant lequel la Russie a délibérément détruit un gazoduc pour échapper au contrat de fourniture la reliant à Achkhabad. Ou encore avec l’Ukraine comme pendant l’hiver 2009 où elle lui a coupé les vannes pendant deux semaines car les relations diplomatiques étaient très mauvaises. En effet, l’Ukraine voulait poser sa candidature à l’OTAN. Les tensions sont aujourd’hui moins fortes depuis l’élection en février 2010 de Ianoukovitch un pro-russe qui remplace Ioutchenko. Les Ukrainiens ont même accepté de renouveler le bail de la flotte russe de Mer Noire stationnée à Sébastopol en Crimée (GUENEC, 2008). Toutefois, afin de moins dépendre de Kiev, par laquelle transite 80% du gaz russe vers l’Europe Centrale (NIES, 2010) l’Etat russe cherche de nouvelles portes de sortie comme le North Stream entre Kaliningrad et l’Allemagne via la Baltique.

La Russie reste donc un partenaire de l’UE mais elle perd son influence en Europe de l’Est et dans certaines des EX-Républiques Soviétiques d’Asie Centrale face à l’UE et l’OTAN.

La Russie cherche aussi à diversifier ses exportations pour ne plus dépendre essentiellement du marché européen notamment vers le marché asiatique.

La Russie est très dépendante des exportations de mineraiset d’hydrocarbures car ils représentent à eux deux, 80% des exportations en valeur du pays (BORNE et SCHIEBLING, 2007). L’Etat russe met alors en concurrence des pays pour l’accès aux ressources gazières afin de diversifier ses exportations (LOCATELLI, 2007). L’Empire du Milieu étant très gourmand en matières premières pour soutenir sa croissance, le plus grand pays du monde en profite pour diversifier ses exportations en le fournissant en hydrocarbures principalement. C’est pourquoi, le 27 septembre 2010, Dimitri Medvedev président de la Fédération de Russie, a inauguré un oléoduc reliant Skovorodino (oblast de l’Amour en Sibérie Orientale) à Daqing dans la province du Heilongjiang (Chine du nord-ouest). Il doit délivrer 15 millions de tonnes de pétrole brut par an. De plus, une douzaine d’accords ont été signé entre la Chine et la Russie pour la livraison de 30 milliards de m ³ de gaz pendant à partir de 2015. Ce projet a pour objectif de désenclaver les provinces sibériennes et de leur permettre de se développer (DESMICHELLE, 2010).

La Russie fait aussi partie de l’Organisation de Coopération de Shanghai (Chine, Russie et les Ex-Républiques Soviétiques d’Asie Centrale exceptée le Turkménistan). L’OCS voit son influence croître sans cesse du fait de la situation politique internationale, de ses richesses naturelles et de sa situation géographique charnière. Les Etats ont plusieurs projets ambitieux comme la création d’une banque de développement, une zone de libre-échange et à terme, l’instauration d’une monnaie unique (HAMACHE, 2011). Ajoutons que la Russie et la Chine n’utilisent plus le dollar pour les échanges mais la rouble et le Yuan, qui pourrait devenir monnaie de réserve à terme.

Toutefois, les Russes s’inquiètent de la sinisation inéluctable de l’Extrême-Orient russe. En effet, ils ne sont que 7,58 millions dans la région fédérale d’Extrême-Orient plus un petit million en Transbaïkalie contre 100 millions de l’autre côté de la frontière. Certains chiffres parlent de 5 millions de Chinois installés illégalement en Russie. En fait, ils sont moins nombreux. Un oblast comme celui de l’Amour ne compte que 16 000 citoyens Chinois (GRAS et SHVEDOV, 2010). L’économie se transforme : les Russes achètent de plus en plus des produits chinois fabriqués à partir de matières premières russes (GRAS et SHVEDOV, 2010). Le gouvernement cherche à intégrer ses régions reculées pour éviterqu’elles ne prennent du retard. Pour cela, la coopération avec la Chine est devenue indispensable.

La Russie se rapproche donc de plus en plus de l’Asie car c’est en Orient que se situe le nouveau cœur économique mondial. Mais elle n’abandonne pas pour autant l’Europe même si elle y perd progressivement son influence. Elle dispose de partenaires économiques en Asie comme en Europe pour exporter ses matières premières qui font d’elle une grande puissance géopolitique.

BIBLIOGRAPHIE :

BORNE D. et SCHIEBLING J.(dir.) (2007) - Le monde russe, Hachette supérieur, Paris, 254p.

DESMICHELLE M. (2010) - Première connexion pétrolière sino-russe. Carto, n°3, 45.

GRAS C. et SHVEDOV U. (2010)- Extrême-Orient russe, une incessante reconquête économique. Hérodote, 2010/3-n°138, 127-143.

GUENEC M. (2008) - La Russie face à l’extension de l’OTAN en Europe. Hérodote, 2008/2- n° 129, p. 221-244.

HAMACHE M. (2011)- Les ambitions de l’Organisation de coopération de Shanghai. Carto, n°7, 32.

LACOSTE Y. (2007) - Atlas géopolitique, Larousse, Espagne, 192p.

LACOSTE Y. (2009) - Géopolitique, la longue histoire d’aujourd’hui, Larousse, Espagne, 336p.

LAVIGNE M. (2002) - Russie (Fédération de). Encyclopedia Universalis, Malesherbes, 20,350-359.

LOCATELLI C. (2007) - Les enjeux de la réorganisation du secteur pétrolier in ECKART D. (dir.), (2007), La Russie, Hachette Supérieur, Paris, 141-155.

NIES S. (2010) - L’énergie, l’UE et la Russie. Hérodote, 2010/3- n°138, 79-93.


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