Magazine Journal intime

Mes ailes de papillon

Par Isabelledelyon

Un matin de ces vacances de Toussaint, alors que nous étions en famille, à la montagne, à traîner paresseusement le matin après le petit déjeuner, E., 6 ans et demi, est venue s'asseoir à mes côtés, sur le canapé, pour me faire un câlin.
Alors qu'elle se blottissait contre moi, elle m'annonce :
"Je suis contente, Maman, que tu ne sois pas morte à cause de ton cancer du sein. J'aurais été triste si tu était morte, tu me manquerais beaucoup".
Elle me demande alors si moi aussi je suis heureuse de ne pas être morte.
Évidemment j'acquiesce et j'ajoute :
"Je suis bien contente que mes médecins aient réussi à me soigner". Elle me répond :
"Moi aussi, je suis contente que tes médecins t'aient guérie".
Petite pause de silence et elle déclare :
"Je veux être médecin quand je serai grande".
Voilà comment naissent des vocations...
A 6 ans et demi, mon cancer, notre vécu familial à travers cette épreuve, lui ont apporté une grande maturité sur la vie et la mort, sur l'importance de la médecine et des traitements.
Elle sait parfaitement que mes perfusions, toutes les trois semaines, ont pour objectif de me maintenir en vie et d'empêcher ce cancer de revenir et de lui ravir sa maman.
J'étais émue par ces paroles, un vrai cri du coeur de ma petite chérie. J'étais heureuse qu'elle arrive à verbaliser ce qu'elle devait ressentir au fond d'elle-même depuis si longtemps. Elle n'avait que 15 mois lorsque ce cancer métastasé a été diagnostiqué, j'ai eu tellement peur de la laisser sans aucun souvenir personnel de moi à cause de son trop jeune âge. J'en étais pétrifiée de douleur rien qu'en osant y penser.

Rien ne pourra me faire plus plaisir que de la voir un jour sauver des vies. Comme tous les enfants confrontés trop tôt à la mort, à la terrible crainte de perdre un être cher, son empathie en sera marquée à tout jamais, elle exprimera une grande humanité envers tous ceux qui auront ces angoisses que nous avons connues tous les quatre.
Je sais que mes deux filles auront cette beauté d'âme qui leur permettra d'accueillir avec générosité, simplicité et chaleur les personnes en souffrance, trop de similitude avec notre histoire.
Mes filles se sont construites sur mon cancer, sur cette vie en suspens que je croque à pleines dents. Je leur ai appris à profiter de tous les petits bonheurs qui se présentent dans une journée, à ne surtout pas les laisser filer sans en savourer leur valeur.
Une journée de vacances commence toujours pour moi par un gros câlin à mes trois chéris. Elles adorent quand nous faisons le papillon et me le réclament souvent. Je suis le corps du papillon et elles sont mes deux ailes sans lesquelles je ne peux pas voler. Elles se collent chacune contre l'un de mes flancs. Je passe un bras sous chacune d'elles en les serrant bien contre moi et je les soulève légèrement vers moi, "je bats des ailes". J'accompagne ces mouvements de petites pressions sur leurs bustes, sous leurs bras, des chatouilles qu'elles adorent, elles en pleurent de rire et moi aussi. Ce sont des moments de pur bonheur, rien de mieux pour commencer une journée en savourant le plaisir d'être réunis.

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