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women’s forum : les femmes parlent au monde

Publié le 16 octobre 2011 par Polluxe

Women's ForumLe Women’s forum s’est terminé hier. Pendant trois jours, 1 400 participantes de 80 pays – dont une centaine d’hommes – ont discuté, échangé sur les grands thèmes d’actualité (crise économique, choix énergétiques, printemps arabes, révolution numérique) mais aussi sur les sujets plus classiques du féminisme (place des femmes dans les CA, image des femmes dans les médias, rôle des quotas, violence contre les femmes…).
Dans cette fourmilière souterraine qu’est le centre international de Deauville avec ses multiples amphithéâtres, agoras et corners, tous ces débats se sont entrecroisés donnant de ces journées une étonnante sensation de richesse et de densité. Autant dire qu’il était impossible de tout suivre et notre petit groupe de blogueuses ou journalistes invitées a dû se frayer un chemin dans cette jungle, entre deux pauses cafés à la salle de presse pour recharger les smartphones et les cerveaux !
Pour ma part, j’ai beaucoup apprécié les points presses en petit comité qui permettaient des échanges simples et directs. Quelques rencontres m’ont particulièrement marquée.

D’abord la rencontre avec Shirin Ebadi. Cette iranienne, qui a reçu le prix nobel de la paix en 2003 et qui a été ovationnée par une salle debout à la fin de la réunion plénière sur le printemps arabe, est un petit bout de bonne femme très déterminée. Lors du point presse, elle a délivrée deux messages essentiels à propos de l’Iran et de la Tunisie.
D’abord l’idée que c’est à chaque peuple de conquérir par lui-même la démocratie. Aujourd’hui en Iran, il y a des frémissements démocratiques, mais à cause de la répression violente de 2009 ce frémissement ne prend pas la forme de manifestations de rue mais d’actions ponctuelles pacifiques comme une bataille d’étudiants avec des pistolets à eau : « le feu couve sous la cendre ». La conquête de la démocratie doit se faire sans aide extérieure directe : « tout ce que nous demandons aux occidentaux c’est de ne pas soutenir les dictateurs ». Or c’est ce qu’ils font en tolérant que ces dictateurs corrompus mettent leur argent dans des banques occidentales ou en tolérant les pressions qu’ils exercent sur certaines sociétés. Ebadi a évoqué un cas précis. Jusqu’à présent beaucoup d’iraniens étaient informés de manière indépendante par deux télés internationales diffusées en persan via un satellite d’Eutelsat. Après avoir dans un premier temps tenté de les brouiller, le gouvernement iranien a fait pression sur Eutelsat pour qu’elle retire ces chaines. Or Eutelsat est une société qui appartient à hauteur de 26 % à l’État français [via la Caisse des dépôts et consignations]… Suivez mon regard…

Ensuite elle s’est adressée aux tunisiennes en leur demandant de ne pas faire la même erreur que les iraniennes lors de la révolution islamique de 1979. Face à la menace islamiste, il leur faut renforcer la société civile – car en démocratie on peut voter pour des partis islamistes – et ne rien céder dès le départ. Il leur faut aussi s’approprier le débat sur la religion car « les islamistes ont profité de notre méconnaissance, à nous les femmes, de l’islam » et ont imposé deux seules options : ou vous êtes musulmanes et vous faites ce que nous disons ou vous êtes hérétiques [NDLR. voir la notion d"islamophobie" créée justement pour disqualifier toute opposition] ; « c’est aux femmes d’interpréter l’islam ».

Elle a évoqué aussi le cas de Sakineh« j’aimerais que vous vous battiez contre la peine de lapidation et non seulement pour Sakineh » – et sa situation personnelle : elle ne peut plus entrer en Iran, ses biens ont été confisqués, sa famille maltraitée… Elle nous dit alors ceci :  « j’aime ma famille et ma maison,  mais j aime encore plus mon pays et je ne me tairai pas. [...] Aujourd’hui le gouvernement iranien est passé aux menaces. Mais de tout façon on doit tous mourir. Il ne faut pas avoir peur de l’inévitable. »

Comme un écho à cet interview, nous avons rencontré Amina Bouzguenda Zeghal, jeune enseignante tunisienne qui a participé à la révolution. Après avoir décrit le rôle des réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter dans la mobilisation et le contournement des médias traditionnels, elle a évoqué ses craintes pour les prochaines élections à l’assemblée constituante. Seules 30 % de personnes sont inscrites et elle craint que le courant émancipé et laïque ne soit pas bien représenté face à des extrémistes – sous-entendu islamistes – qui sont très mobilisés. Pour preuve leur attaque récente de la télé privée Nessma pour avoir diffusé le film de Satrapi, Persépolis… Elle craint pour les droits des femmes, droits qui sont importants en Tunisie depuis l’indépendance et souhaite que les femmes soient nombreuses à aller voter. Hasard du calendrier, ses propos font aussi échos à la chronique de C.Fourest dans Le Monde, la Tunisie joue sa liberté.

Autre rencontre très intéressante dans un petit salon de la salle de presse, celle avec Viviane Reding : « l’égalité n’est pas une affaire de femmes mais de société » et le fait que les femmes, plus diplômées que les hommes, soient sous-représentées dans les instances d’encadrement et de direction est un véritable gâchis ! Et bim ! comme dirait Ronald. Mais comme Sabine de Girls in Web a filmé l’interview, je vais m’arrêter là pour ce soir et vous renvoyer à la vidéo qui ne tardera pas à être sur leur site…


Tagged: Ebadi, femme, Iran, Reding, Tunisie, Women's forum

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