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Alerte enlèvement: on cherche l’opposition.

Publié le 07 novembre 2011 par Legraoully @LeGraoullyOff
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Alerte enlèvement: on cherche l’opposition.

« Si tous les économistes se tenaient par la main, ils n’arriveraient même pas à une conclusion »

George Bernard Shaw

Et bien voilà, le festival de Cannes a pris fin, la police a pu retrouver ses attributions ordinaires de maintien de l’ordre public au lieu de protéger les propagateurs du désordre mondial. Séance tenante, Sarko tient les seules promesses qu’il tient toujours, celles qu’avec force courbettes  et moultes génuflexions il fait à la finance qui n’en demande pas tant. Comme il est en quête de représidentalisation en vue de 2012, c’est Fillon qui s’est chargé de pointer le majeur tendu de son patron aux habitants de la SA France qui n’ont pas l’heur d’avoir un compte aux îles Caïman. Paré de ses plus belles cernes pour l’occasion, le Ministre à la triste figure a déroulé ce matin toute une batterie de mesures destinées à faire des économies et à empêcher les agences de notation de nous piquer notre AAA, qui si j’ai bien compris est le garant de la paix dans le monde ou alors dites tout de suite que Sarkozy est un menteur. Sans AAA, il faudrait revenir au franc, voire même au sesterce ou au louis d’or, et Israël en profiterait pour bombarder l’Iran. Heureusement, le mahatmah Fillon ne laissera pas cette catastrophe advenir. Je n’entrerai pas dans les détail des mesures de raideur (ou de rigueur j’ai oublié), de toute façon comme vous n’êtes pas millionnaires, vous serez tous concernés, mais je ne manque pas de penser à vous ici dans ma villa de Saint Barthélémy, où au bord de ma piscine, je dicte mes mémoires à ma secrétaire suédoise en têtant un cigare cubain et une bouteille de Chivas.

Cela dit, une question me taraude et me lancine: avant de monter dans mon jet privé, j’ai cru me souvenir qu’il fut un temps où il y avait une opposition en France, et qu’elle était même passée trois interminables fois à la télévision pour se choisir un candidat aux présidentielles et pour affirmer avec détermination que le règne du copain d’Obama ne serait plus qu’un souvenir térébrant quand le paradis sur terre reviendra en mai de l’année prochaine. Or, pendant que le gratin des pays riches se dorait le gruyère sur la Croisette, on se demande ce que faisait François Hollande. Certes, on a appris avec un plaisir non dissimulé que sa compagne prenait ses distances avec Paris Match, mais c’est une base bien fragile pour postuler à l’Elysée. Benoît Hamon a bien tenté de porter la bonne parole de son parti, mais les journalistes qui ne voulaient pas déranger Sarko et ses confrères de la jet-set ont préféré l’interroger sur l’avenir de Jean-Noël Guérini. Un des directeurs de campagne de François Hollande a même avoué que le programme socialiste était basé sur une prévision de croissance bien supérieure à la réalité, et qu’il faudrait le réajuster en temps utile (le temps utile, c’est comme le vote utile, on cherche toujours à qui ça profite). A l’occasion d’Halloween, on a même vu le spectre de Jean-Pierre Chevènement annoncer sa candidature à la présidentielle, et Léon Blum quand il se rase, commence à se dire que son heure est peut être venue. Mais de François Hollande, point. Est-il victime d’une forme de dépression post-partum, est-il à nouveau au régime, réajuste t-il son programme, envisage t-il de proposer à toute l’Union d’abandonner l’euro pour revenir au drachme, ce qui provoquerait une bonne petite désinflation compétitive, une alerte enlèvement a t-elle été diffusée à l’insu de ma vigilance? L’attente me ronge, mais pas tant que ça en fait.

Car en matière de désertion du terrain de la protestation, j’ai trouvé pire que le PS. Après l’allocution de Fillon ce matin, les patrons des principales centrales syndicales qui avaient réussi à ne pas s’endormir se sont succédés à la télé pour donner leurs avis avisés. Et on a pu se rendre compte qu’outre le goût prononcé pour les services d’ordre musclés, les syndicats partagent un autre point commun avec la police: ils sont rarement là quand on a besoin d’eux. Pendant que Fillon et ses copains piquent le sac à main de mamie République, et organisent un petit viol en réunion pour le fun, personne ne s’interpose. Les syndicats ont sûrement des circonstances atténuantes: un taux de syndicalisation particulièrement bas, la difficulté à mobiliser quand on risque de perdre une journée de salaire, et la truanderie de Sarko qui les a affublés du titre pompeux de « partenaires sociaux » pour les inciter à négocier au lieu de défiler. Mais, cornegidouille, crotte de bique et boyau de chat, ça ne suffit pas d’avoir transformé les manifs en cortèges mortuaires dignes du baroud d’honneur d’une bande de cacochymes maniaco-dépressifs, il faut en plus se laisser marcher dessus et attendre l’avis de la base pour voir si éventuellement, si le temps le permet, et si on trouve un accord de principe pour monopoliser la contestation, faire une love parade peu bandante de Bastille à République? Et en passant, le soutien aux Indignés de France et d’ailleurs, ça vous arracherait une prothèse dentaire à incrustation vestibulaire que plus personne ne pourra se payer quand la Sécu sera privatisée, ou vous attendez fébrilement que ça finisse en mai 68 pour re-trahir la contestation, si les CRS n’ont pas fait place nette d’ici là? Ca ne vous a pas suffit de vous faire enfler comme des premières communiantes lors de la dernière réforme des retraites, il faut aussi que vous vous fassiez déflorer sur ce qui reste du droit du travail et de la solidarité publique? Avec un opposition aussi virulente, la petite Giulia peut déjà commencer à mobiliser des soutiens dans sa crèche pour la présidentielle de 2052, la dynastie Sarkozy sera toujours là.

Dans un prochain épisode, nous vous conterons notre visite au fameux musée du coquillage de Corossol, qui est la seule attraction de Saint Barthélémy quand on goûte peu les plages paradisiaques et le tourisme de luxe comme Bernard Thibault. Quel manant.


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