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L’HÉRITIÈRE DU TEMPS de Ludovic Rosmorduc lu et chroniqué par Nicole Provence

Par Phooka @Phooka_Book

L’HÉRITIÈRE DU TEMPS de Ludovic Rosmorduc lu et chroniqué par Nicole Provence  
Présentation de l'éditeur:
Une grossesse qui tourne mal conjuguée à l'arrivée tonitruante d'une émissaire du Diable à Sétiladom : il n'en faut pas plus pour convaincre la Sainte Inquisition d'intervenir. Et si le Grand Inquisiteur est convaincu du bien-fondé de sa cause, il est également mû par d'autres motivations plus sombres.
Héritiers de l'histoire de la Cité Ocre, mais surtout de la sagesse d'Ambroise de Liemmos, l'alchimiste Yorel, le guerrier Dungal et leur protégée de toujours, Sixéla, vont tout mettre en oeuvre pour découvrir ce qui se cache derrière ces manifestations démoniaques.

Nicole Provence, notre marraine  a lu L'Héritière du Temps et nous l'a chroniqué dans le cadre du Mois de Ludovic Rosmorduc sur Bookenstock.
Par contre, cette chronique est réservée à ceux qui ont déjà lu le livre car elle contient énormément de spoilers! Si vous avez l'intention de lire le livre, n'allez pas plus loin et revenez lorsque vous l'aurez fini.  Le propos de Nicole est tellement passionnant (à notre avis) que nous préférons le laisser tel quel quitte à révéler tout le livre. Vous êtes prévenus!!!


L’Héritière du Temps
Ou…
La quête de Ludovic…

Une âme d’ado pour rejoindre les personnages de Ludovic Rosmorduc, j’ai lu ça quelque part sur Book En Stock… voilà qui me convenait très bien, moi qui ne suis pas une fan de Fantasy mais qui ne boude pas un peu de fantastique. Une âme d’ado, qui n’ayant pas encore étudié entre autre l’Inquisition, en aura eu une représentation si bien imagée, et là je pense à la terrible exécution de Mélisande, qu’il aura peut-être envie d’en connaître davantage sur cette terrible époque.
L’écriture de Ludovic est fluide, plaisante à lire, on ne s’ennuie pas. J’ai bien aimé « l’Héritière du temps » même si je n’avais pas lu le « Tertre des âmes ».
Dès les premières pages nous sommes propulsés dans un passé assez proche pour s’y reconnaître. Il nous devient aussitôt familier et on déambule aux côtés de Yorel dans les rues pavées d’une cité médiévale, avec ses tavernes, ses échoppes, on se mêle à ses badauds. C’était presque hier, cependant, je dois écrire le « Mais » que nous réservent les éditeurs quand après une liste de compliments sur notre écriture ou le thème abordé, ils nous adressent la petite phrase assassine, « c’est bien, mais… »
Oui certes, j’ai aimé l’histoire de Sixela, Yorel et Dungal, et aucun ado ne boudera cette aventure, mais, à mon avis, sans doute parce que je suis auteur moi-même, je trouve que beaucoup de choses manquent et forment un vide. Par exemple, Sixéla : depuis le premier roman, elle a beaucoup grandi, elle a perdu sa mère, et on la retrouve toute à la fois mariée, veuve, enceinte. Romantique comme à mon habitude, et comme la plupart des ados, j’aurais aimé en savoir davantage sur ses amours, ses noces avec le bel Angus ( il ne pourrait en être autrement !) et les circonstances de sa mort. Rien ! Le lecteur doit « passer » son chemin. J’aurais aimé aussi savoir si son enfant difforme, mort-né, chapitre qui constitue le début de l’Héritière du Temps, avait été victime d’un mauvais sort, et de qui, Diable ou suppôt de Satan ? Qui se serait acharné sur Sixéla et son enfant, et pourquoi ? Cette naissance monstrueuse n’aurait-elle pas dû être pour Sixéla la raison d’être jetée en pâture dans les griffes de l’inquisition, quitte à en être sauvée par Dungal et Yorel ? Voilà un sujet qui aurait pu être développé et aurait donné une autre force à ce roman. Car d’après l’ambiance qui règne dans cette histoire, on aurait presque pu s’attendre à ce que Sixela périsse elle-même sur un bûcher si elle avait accouché d’un enfant parrainé par le diable. Le Père Bélarius si vindicatif et si attentif à toute manifestation surnaturelle, si prêt à livrer pieds et poings liés une sorcière à la Sainte Inquisition ne s’en soucie finalement pas plus que ça alors qu’il avait béni le cadavre du nourrisson. Et ce bébé, son cadavre du moins, personne ne sait quelle destination Yorel lui a réservé. Même pas de sépulture sur laquelle sa mère aurait pu venir se recueillir. Pour une époque où le culte des morts avait beaucoup d’importance, la perte de son enfant dans ce cas, cela manque un peu. Oui, vraiment, je suis restée sur ma faim d’en connaître davantage sur Sixela.
Yorel, apothicaire et alchimiste, on s’attend à bien des potions magiques, mais rien d’extraordinaire dans ses préparations d’herbes, sauf les capsules noires qui aideront Mélisande à supporter ses tortures. Quant aux rares manifestations de magie, seules, la lumière prisonnière des pendentifs et la « création » de l’homoncule que j’ai trouvé judicieuse, apportent quelque chose d’inattendu à la fin du roman.
Dungal, l’homme d’une force inégalable, aux amours malheureuses n’aura finalement pas un si grand rôle dans cette aventure et périra, sortant ainsi définitivement et trop vite du trio solidaire.
Alors bien sûr, les geôles et les tortures, les procès perdus d’avance, la loi du plus fort, du plus vicieux, le bûcher aux hérétiques, la mise ne place du nouveau conclave, les luttes d'influence, l'avidité du pouvoir suprême, sont des thèmes très et trop souvent abordés. C’est en cela que L’Héritière du Temps manque un peu d’originalité, même si l’on a plaisir à suivre les personnages dans cette aventure.
Mais cela est mon avis et personne n’est (heureusement) obligé de le partager.
En revanche, parce que mon « Mais » n’efface en rien les qualités que j’ai trouvées au roman de Ludovic Rosmorduc, j’ai beaucoup aimé l’enquête dans l’enquête, le passé au secours du présent à travers les pages d’Ambroise de Liemnos, qui, narrant son histoire et ses découvertes, guidera nos héros jusqu’à la révélation attendue. J’apprécie d’aller d’un tableau à l’autre et de ce côté Ludovic a monopolisé mon attention et mon intérêt sans que l’ennui s’installe. J’ai erré dans les couloirs sombres et glacials de l’université cléricale et j’ai accompagné le jeune Ambroise et son ami pour découvrir la cause de ces morts mystérieuses qui, hélas, emportera Élériel à son tour. J’ai suivi avec plaisir ce voyage risqué de Sétiladom jusqu'à Bramald la Nébuleuse, en empruntant le chemin de fleurs lumineuses qui, la nuit, guidait nos héros jusqu’à destination. J’ai cherché avec eux les indices dans les pierres gravées, et découvert l’origine de cette terrible maladie qui dévore le monde, ce mal noir qui progresse plus vite que le vent. J’ai trouvé originale la façon dont « on » l’a faite progresser et la façon dont « on » l’enrayera : des hosties presque magiques, il fallait y penser.
J’attends le prochain roman de Ludovic Rosmorduc car je suis certaine qu’il sera passionnant et qu’il aura profité de tous les avis de ses lecteurs. Car ce que j’aime beaucoup en Ludovic c’est sa franchise de reconnaître que contrairement à ce que d’autres nient, on n’est pas (ou très rarement) publié du premier coup, sans envois de manuscrits dans plusieurs maisons, sans refus combien désespérants, sans re-travail du texte, sans conseils qui parfois son difficiles à accepter et remettent en cause nos idées, notre écriture, nous frustrent de notre titre et nous obligent parfois à dévier de notre chemin initial. Une humilité qui porte ses fruits et rend notre écriture plus forte, plus précise, plus passionnante.
Bravo Ludovic pour l’Héritière du Temps dont j’ai été l’heureuse gagnante grâce aux éditions BAAM et Book en Stock, je les remercie tous deux. Ce fut un agréable moment de lecture et mille voeux pour tes prochains romans.

Nicole Provence
     

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