Sans conteste, le crew 1995 est la grosse saveur de cette année 2011. C'est une véritable déferlante qui s'est abattue sur le Rap Français depuis la sortie du EP "La Source" au début de l'été. Le concept: une bande de très jeunes rappeurs nostalgiques d'un certain "age d'or" qui reprennent les ambiances boom bap et jazzy des années 90.
Le succès de ce groupe est déjà en soi étonnant (parce que ce genre de Rap n'a jamais vraiment emballé la foules au sein de l'Hexagone) mais il l'est encore plus à la vue de son public. Qu'elle ne fut pas ma surprise de constater que la salle était remplie de ce qu'il faut considérer comme des gamins!
La moyenne d'âge de la population devait tourner autour des 16 ans. Leur a-t-on expliqué que 1995 était le nom du groupe et pas la date de naissance requise pour les écouter? On a même vu des gamins accompagnés de leurs parents... On aurait pu voir exactement la même audience pour un concert de Phoenix ou, je sais pas, un set de Justice, par exemple. Très loin d'un auditoire Hip Hop.
Fatalement, ce public de kids fait de cette soirée un concert de kids: un nombre incalculable de groupies hystériques de Nekfeu et pas mal ados maladroits ne comprenant pas vraiment comment interagir avec leurs corps au son de cette musique. Puis, bon, quand le groupe propose un espèce de medley des morceaux historiques du Rap Phocéen, c'est un peu consternant de voir tous ces gamins ne pas reconnaitre des sons comme les Bad Boys de Marseille.
Tout ça sonnait un peu faux, vous voyez? Tout le monde faisait un peu comme si: les gamins essayaient (assez maladroitement) de sauter comme dans une improbable bloc party, le groupe est monté sur scène en portant des sacs à dos, un des gars avait un t-shirt de la Scred Connexion... Presque une impression de reconstitution historique, en somme. Une glorification assez écœurante du c'était mieux avant. On est en 2011, les enfants. Get over it.
Le groupe en lui même est très chouette, hein. Les gars ont faim, ils ont énormément d'énergie à revendre et un grand respect de leur auditoire (avec notamment des textes inédits préparés pour l'occasion) mais... Comment dire? J'ai 24 ans, pas bien vieux donc et il est évident que ma génération a déjà loupé les grandes années portées aux nues par 1995 mais alors ceux qui sont arrivés après... Il est assez ardu de comprendre ce besoin d'authenticité et de crédibilité, c'est très curieux. Une certaine jeunesse veut se créer des souvenirs. C'est très bien mais vouloir reproduire ce qu'ont vécus les ainés n'est clairement pas une bonne idée.
Bref, j'ai passé une mauvaise soirée, cerné de gens qui n'étaient pas né à l'époque où j'écoutais mes premiers morceaux de Rap. Je n'ai pas pu adhérer à cette célébration. Le possee 1995 n'en reste pas moins prometteur. Bien au contraire, même, après avoir déployé une telle énergie. Mais on va tranquillement attendre d'en écouter un peu plus avant de s'emballer. Quand on a ne serait-ce que quelques années d'expérience rapologique dans les pattes, on sait bien qu'il faut éviter les emballements précoces.
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