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Mon métier : Designer Plasticien par François Mangeol

Par Vincent Espritdesign @espritdesign

Mon métier : Designer Plasticien par François Mangeol

Venons aujourd’hui à la rencontre de François Mangeol, jeune designer / plasticien français tout en réflexion créative.

- Peux tu nous expliquer ton parcours, formations en quelques mots ?

J’ai d’abord suivit des un cursus scientifique, bac S, spécialité mathématiques puis un début de formation en biologie des métabolisme que j’ai arrêté ensuite pour entrer à l’École supérieure d’art et design de Saint-Etienne (ESAD).

- Travailles-tu dans un studio, agence ?

J’ai monté mon bureau en 2007 et il est arrivé depuis à plusieurs personnes de collaborer périodiquement avec moi.

Mon métier : Designer Plasticien par François Mangeol

- Peux tu définir ton travail en un mot ?

C’est difficile, je suis toujours curieux du regards que l’on peut porter sur mon travail. Ce serait une bonne question à poser aux personnes qui ont écrit ou parlé de mon travail.

Mais si je devais vraiment l’évoquer, je parlerai d’un design “pensif”; c’est un travail de stratification du sens, presque littéraire. Un design à penser issu de fictions à la fois fondatrices des projets et incorporées en eux, à penser.

J’aime à croire que la définition des aphorismes que fait Alessandro Baricco, écrivain musicologue italien contemporain dans son livre « l’ame de hegel et les vaches du Wisonsin » s’applique à mon travail.

“L’aphorisme c’est l’instant où la réflexion s’élance, s’appuyant parfois sur le paradoxe, usant d’articulations faibles, ou hasardeuses, s’autorisant la provocation et cherchant le fracas de vérités nouvelles, provisoires. C’est la limite et en même temps la force de tous les aphorismes : par le pouvoir frêles de l’intuition, bousculer la pensée immobile. “

J’essaye donc de dessiner des “Aphorismes à penser”

:)

- Un objet ?

Les derniers sortis peut-être qui continuent d’affirmer ce positionnement dans le dessin et la création : Le vase S.M.S. édité chez ÉSÉ ou les miroirs Pi édités chez Domeau & Pérès.

Mon métier : Designer Plasticien par François Mangeol
Mon métier : Designer Plasticien par François Mangeol
Mon métier : Designer Plasticien par François Mangeol

- Quels sont les designers qui vous inspirent ou que vous appréciez particulièrement ?

Enzo Mari, Andrea Branzi les radicaux italiens de manière générale pour leur état d’esprit, leurs actions et leur propension à voir le design comme une pratique global, du livre au jouet, de l’industrie au manifeste.

Après il n’y en pas quelques-uns en particulier, le monde m’inspire, l’actualité, les plasticiens, les artisans, les savoir-faire, mes camarades designers aussi, les maitres comme les plus jeunes. C’est quelque chose qui n’est pas toujours systématique, les objets auprès desquels on se sent à l’aise, ceux dont on partagerait la même vision voire langage parfois.

- Avoir des idées c’est bien, les créer, et les distribuer ?

C’est mieux!

Aujourd’hui nous sommes assaillis d’images d’objets or le travail du designer reste la conception d’un produit et d’une expérience physique de design. De manière générale il est difficile pour un designer de voir arriver ses objets sur le marché; d’autant plus lorsqu’il s’agit d’”aphorisme à penser”.

Les maisons d’édition en France restent peu nombreuses malgré le boom de ces dernières années. Sans compter que le designer n’en a que rarement le choix au début de sa carrière. C’est souvent le fruit d’une rencontre fortuite, parfois provoquée, autour de projets préalables. Compte tenu du nombre de designers formés chaque année et du risque financier inhérent à la production en série d’objets, les choix des éditeurs, maisons d’édition ou galeries ne se portent que sur un petit nombre d’entre nous.

- Parmi tes créations quelle est celle que tu aimes le plus ?

C’est toujours compliqué. Il y a beaucoup d’aspects, mais je pense que celle que j’aime le plus sont celles qui restent à venir, encore en chantier, qui me tiennent en haleine et en éveil.

- Chez toi c’est comment ?

Ce soir, chez moi dans le salon… une table d’artisanat marocaine, deux meubles bas Ikea PS rouge, une girafe gonflable de Libuse Niklova, gonflée, des prototypes des miroirs Pi pour Domeau & Pérès, un RAR ABS des Eames, un tapis blanc, la bouteille de Garouste et Bonetti pour Ricard, vide depuis des années et l’album We are New Here de Gil Scott Heron and Jamie XX / en fond!

- Ton environnement de travail ? Peut on avoir une photo ?

L’environnement de travail est assez systématique, un grand bureau qui peut accueillir du monde, de la musique toujours.

Mon métier : Designer Plasticien par François Mangeol

(Sur la photo Thibault qui a travaillé avec moi cet été.)

- Pour toi, le plus important dans une création est ? La Praticité ? La Poésie ? L’Usabilité ? La Processus de création simplifié ?… L’humour ?

Le contexte. Les meilleurs projets sont ceux qui ont un contexte de création quel qu’il soit, poétique, scénographie, subversif, etc.

- Un conseil à donner au personnes désireuses de se lancer et de devenir designer ?

Je ne peux que leur conseiller de faire preuve d’entêtement, de courage, de patience, de curiosité et surtout de beaucoup de travail!

- Que penses-tu de l’effervescence autour de la déco, du design ces dernières années à la télévision et sur internet ?

Depuis quelques temps maintenant, la valeur d’un designer s’écrit comme celle d’une marque. Le nom devient marque, une signature à apposer sur des objets pour mieux les vendre compte tenu de l’image de marque déjà acquise. Starck ™ par exemple. L’hypocrisie de ces marques/ noms de designers, qui sont le fruit de 5 10 15 30 100 designers intégrés à l’agence, tombe le masque petit à petit pour laisser leur chance à de plus jeunes designers ou studios, cf l’exposition de la galerie Grosserez de Septembre dernier sur les “assistants” de “grands” designers.

On peut faire un parallèle avec le milieu du cinéma et de ses acteurs. Il y a des producteurs (éditeurs) plus ou moins connus avec plus ou moins de moyens. Il y a un petit nombre d’acteurs/designers connus et reconnus (sans remettre en cause leurs compétences) à qui on demande de faire beaucoup de produits pour surfer aussi sur leur image (de marque). On voit arriver sur le marché des blockbusters à grand renfort de publicité dans toutes les salles (boutiques) et de plus petites productions d’auteur, dans quelques salles seulement.

J’en pense donc que c’est une chose positive, dans le sens où le public a de plus en plus les moyens médiatiques de s’intéresser à ce que nous faisons. Notre métier demeure encore un peu fantasmé à mon avis. ET dans le même temps nous manquons de visibilité et seuls certains designers sont reconnus (leur travail assimilé, compris, acheté), les français ne s’intéressent pas vraiment encore à la jeune création dans l’acte d’achat.

Enfin je suis surtout Motivé et plein d’espoir par cette génération, cette nouvelle vague et son dynamisme en marche. Le design se démocratise et sa visibilité se fait de plus en plus qualitative. Il faut donc le regarder avec de la motivation, de l’envie et de l’énergie tout en gardant à l’esprit que ce n’est pas facile tous les jours. Ne jamais oublier que les parutions ne font pas vivre et simplement essayer, essayer encore, sans cesse d’observer pour mieux comprendre, mieux dessiner peut-être.

- Comment choisis tu tes nouveaux projets ? Sur demande, au feeling ?

J’ai la chance d’avoir pu choisir la plupart de mes projets au feeling effectivement. Ces rencontres qui façonnent un parcours tout en ne l’imposant pas.

Mais tu l’as vu mon travail n’est pas systématique, je m’attache à travailler le plus possible des champs que je n’ai pas encore investit Je ne me limite pas à un type de produits, un type de production. Par nature curieux je ne suis jamais contre la découverte de nouveau champs de réflexion et de projection.

- Où puises tu ton inspiration ? Expérience, livre, voyage…

Le quotidien est une source de curiosité, de connaissance, de découverte potentiels énorme. C’est donc un terrain illimitée d’expériences et d’inspirations. C’est le propre du designer d’avoir toujours les yeux grands ouverts et de s’arrêter dans la rue, reculer et prendre en photo une borne électrique à Eindhoven, un tabouret au design vernaculaire en pleine campagne en passant par du graphisme de boucherie!

- Consultes tu régulièrement des livres, sites, blogs consacrés au design ? Si oui lesquels ?

Je ne peux que conseiller la lecture des magazine Uzbek & Rica ou encore Feuilleton, à lire absolument.

Après j’utilise des aggrégateurs de flux pour suivre un certain nombre de blog qui ne sont que rarement spécialisé dans le design mais plutôt dans l’info, les sciences.. sans oublier les sélections de Flo, Jo Yana, Éric, Alexandre ou encore les tiennes, enfin rien que tous le monde ne fasse déjà. Je n’ai pas de blog d’inspiration secret

;)

- As tu une définition du “design” ?

C’est difficile, la question a été beaucoup posé, nombreuses ont été les réponses apporté. J’en donnerais un regard, le designer dessine des objets, quel qu’en soit leurs échelle (industrielles, architecturales, de masse, de galerie, etc.).

L’étymologie du mot objet nous renseigne sur la nature même de la démarche : ce qui est placé devant, donc devant nous, utilisateur, amateur ou spectateur. L’objet est bien sûr un outil et un instrument mais il est aussi objet de regards. Il est de façon plus abstraite, matière pour l’activité de l’esprit et support de la pensée.

Nous sommes donc des “objecteurs”, à nous d’opposer, de prétexter, de répliquer, de répondre ou encore de contester un ordre établi. C’est à dire, du côté de l’utilisateur, une responsabilité et une implication plus grande que la simple consommation.

Toutes ces définitions/acceptations du mot objet essayent de trouver écho dans ma pratique.

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- La vie d’un designer est-elle enviable ?

Enviable je ne sais pas, il ne fait pas nourrir se fantasme. C’est un métier qui de manière général pendant une dizaine d’année reste sommes toute précaire pour la plupart d’entre nous. Mais c’est un choix, le choix de rencontres enrichissantes, inoubliables, d’un métier très complet qui mêle création, gestion, commerce… on a pas le temps de s’ennuyer! De fait c’est un métier chronophage, prenant et il y a donc d’énormes concessions à faire.

- Quels sont tes passions, tes loisirs, en dehors du design ? Un designer a-t-il une vie en dehors de la création ?

Je te l’ai dit… Il faut faire d’énormes concessions. Mes soupapes sont la lecture, l’écriture, le dessin, ma guitare que je délaisse trop souvent, mes proches, les voyages (dès que je peux!). Il n’y a rien de mieux que se trouver projeter dans une nouvelle culture, une autre manière de vivre, des couleurs et odeurs différentes…

- Ou te vois tu dans 5 ans ? 10 ans ?

Je n’arrive que difficilement à me projeter au mois de Janvier et ne sais toujours pas où je fête le nouvel an alors dans 5 ou 10 ans…!

Disons que je m’imagine bien à l’étranger, j’aimerais vraiment avoir plus souvent l’opportunité de voyager, d’aller à la rencontre d’autres cultures et puis je vois bien des enfants…

- Penses tu qu’il y a un problème pour les designers en France ?

La base du problème c’est que nous sommes peut-être déjà trop pour que le marché nous absorbe tous ; et ce bien que les champs d’applications soient multiples, qu’ils se multiplient et qu’il existe de nombreuses aides et structures (OSEO, le VIA, le lieu du design, la Cité du design, …)

je ne suis pas certain que la multiplication des aides soient une solution même si elles restent une aide nécessaire. Pour vivre, il faut avoir un chiffre d’affaire, ce qui n’est pas le rôle des aides…

Il faut arriver à un changement des mentalités, à une plus grande ouverture d’esprit. Il est donc nécessaire que des efforts soient faits, autant du côté des industriels que des designers afin d’installer une confiance mutuelle susceptible de proposer des produits riches à forte valeur de patrimoine, afin que l’on associe plus le design à de la création (innovation, recherche, nouveaux usages, nouveau message, etc.). Aujourd’hui le mot “design” est trop souvent employé comme l’adjectif qualificatif d’un style, moderne (?!), contemporain (?!), fantasmé dans tous les cas. Et c’est à mes yeux une des missions des structures, des magazines, ou des blogs de travailler à multiplier les actions de médiation auprès des publics sur ce que sont réellement les métiers du design. Espérons que des expositions comme - L’objet du design des Sismo ou encore celle de Konstantin Grcic à la Cité du design se multiplient.

- Pourquoi accepter de répondre à mes questions ?

Pour cette même raison évoqué juste avant, bien que ce ne soit toujours un exercice délicat et il est pas dit que ce que je raconte soit si intéressant.

Tu me diras!

- As tu un nom à nous donner pour  une prochaine interview ?

Voire plusieurs, David des Moutis, Jean-Sébastien Poncet, Gregory Lacoua, Pierre Lapeyronnie, …

- Quelle est ton actus ?

À très court terme, le prochain salon Maison&Objet en Janvier, un banc qui sera présenté à Milan en Avril prochain, un livre avec mon camarade et ami designer Jean-Sébastien Poncet qui se termine, une collaboration avec une orfèvrerie, des projets de tapisserie à venir, plein de choses excitantes en perspective !

Quelques unes de ses créations :

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I Miss Swan, lampe à LED

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Miroir, tôle polie pour Domeau & Pères

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Bar Mobile, prix de la créativité, Exquisite Wyborowa

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Millefuilles, miroir + tapisserie Aubusson

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Galamp, lampe prototype

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Tapis Occidorient, Edition Sous Etiquettes.

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Usine Occupée, purificateur d’air, Edition Sous Etiquettes.

Crédits photos :

Pi - ed. Domeau & Pérès, 2011 - photo : FM / Occidorient, I Miss Swan, Usine Occupée, SMS, ed. ÉSÉ Édition Sous Étiquette, 2010-2011 - photo : François Caterin / Collection Saint-Etienne - DS3 ed. Souvignet, 2010 en collaboration avec Sophie Françon - photo : Johan Meallier / photos : FM

Plus d’informations sur la designer : François Mangeol

merci à François pour sa disponibilité et gentillesse, en espérant le revoir au plus vite sur BEDesign !

By Blog Esprit Design


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