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À en pleurer

Publié le 07 décembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Une ministre italienne est incapable d’annoncer à ses citoyens, sans pleurer, des sacrifices bien modestes. Ça en dit long sur les défis qui nous attendent, tous.

Par David Descôteaux, depuis Montréal, Québec

À en pleurer
Une vidéo circule sur Internet. On y voit une ministre italienne éclater en sanglots pendant qu’elle annonce une réforme des régimes de retraite. L’Italie est fauchée. Le gouvernement va augmenter le nombre d’années de cotisation, et repousser l’âge de la retraite, notamment. Le premier ministre doit terminer l’allocution de la dame, trop « émotionnée » pour poursuivre.

Cette réforme sera insuffisante pour sauver les finances publiques de l’Italie, qui foncent vers la catastrophe. Mais qu’une ministre soit incapable d’annoncer à ses citoyens, sans pleurer, des sacrifices bien modestes (vu l’ampleur du problème)? Ça en dit long sur les défis qui nous attendent, tous.

L’île des insouciants

Mais j’oubliais. Ici sur notre île, rien de tout cela peut nous arriver. Ici c’est business as usual. Nos déficits, notre dette galopante, nos régimes de retraite dans le rouge… Tous ces irritants vont disparaître comme par magie.

Prenez Gérald Tremblay à Montréal. La dette de sa ville bouffe 17 % des revenus annuels. Les régimes de retraite font le tic-tac d’une bombe à retardement. M. Tremblay va-t-il se serrer la ceinture? Non. Il prévoit embaucher des dizaines de fonctionnaires de plus cette année. Il va plutôt serrer la ceinture de ses citoyens, à coups de hausses de taxes.

Prenez Jean Charest ou Michelle Courchesne, à Québec. La dette grossit plus vite chaque année (une douzaine de milliards en 2011, au minimum). Pas seulement à cause des infrastructures — le gouvernement paye l’épicerie avec sa carte de crédit. Les coûts de santé explosent, et le trou des régimes de retraite se creuse. Qu’entend faire Mme Courchesne? Y « réfléchir ». Rien ne se fera avant l’élection de 2012, bien sûr. La priorité : se faire réélire. Faut pas froisser quiconque d’ici là.

Prenez Stephen Harper, à Ottawa. Malgré ses discours de « droite fiscale », il endette le pays plus vite que tout autre premier ministre avant lui. La bureaucratie québécoise est un yacht à côté du paquebot fédéral, qu’Harper n’est même pas capable de faire virer de 10 degrés. Sous les conservateurs, les dépenses et les déficits battent des records. Un retour en récession, et c’est la catastrophe budgétaire.

Snif, snif

Retour en Italie. L’AFP cite un chef syndical qui déchire sa chemise : le gouvernement italien « n’a pas calculé l’impact social » du plan d’austérité. Faux. Ce que le gouvernement — tous les gouvernements — n’a pas calculé, c’est l’impact social inévitable d’une gestion à courte vue pendant des décennies. À dépenser plus que ses revenus, et à promettre mer et monde à chaque groupe d’intérêt. Quand la facture arrive, l’austérité n’est pas un choix.

Et plus nos politiciens, ici, continuent de croire que nous sommes sur une île, que notre carte de crédit Gold est illimitée, plus nous dressons la table pour une cure d’austérité sévère. Si nous continuons de laisser nos politiciens repousser à plus tard la moindre réforme, par manque de couilles ou par opportunisme, ne soyez pas surpris. Chez nous aussi, ça va pleurer.

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