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Se résoudre aux adieux / Villa Amalia / My Blueberry Nights

Publié le 08 décembre 2011 par Notsoblonde @BlogDeLaBlonde

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Parfois, quand rien ne va, on ressent l'irrépressible besoin d'évacuer un trop plein d'émotions qu'on ne comprend pas forcément et souvent, ça passe par des mots. Il y a des gens qui vont écrire des chansons, d'autres qui se lanceront dans la littérature. Il parait même que certains ont débuté des blogs comme ça.

Comme quoi, la douleur mène à tout.

 "Se résoudre aux adieux" de Philippe Besson est un roman épistolaire composé d'une correspondance à sens unique. 

C'est une femme qui en est l'auteur et je suis abasourdie par la pertinence de l'analyse de l'écrivain quant au tempérament féminin qu'il décrit. C'est saisissant de justesse et de subtilité.

Cette femme est seule. Il l'a quittée. Il y a plusieurs semaines déjà.

Pour s'en sortir et dépasser la douleur, les angoisses et le manque, elle décide de s'échapper.

Seule.

De fuir ses souvenirs.

En vain.

Alors, en quête d'apaisement, elle écrit.

Elle LUI écrit.

Sans espoir de retour.

Pour lui dire.

Les mots qu'ils n'ont pas pu échanger.

Par manque de courage, de temps, d'envie. Pas pudeur aussi.

Elle lui dit son errance, ses craintes et ses espoirs.

Elle lui avoue ses secrets, lui confie ses tourments. Son retour à la vie. Aussi.

C'est beau et tortueux. Triste et généreux. 

Une de mes plus jolies lectures depuis la rentrée.

Extraits : 

En guise d'ouverture du roman on trouve ceci:

*

"Clément,

J'ai décidé de t'écrire, plutôt que rien.

Plutôt que rester là, comme ça, dans le silence.

Que je te dise : je me suis honnêtement, sérieusement essayée au silence, je l'ai endossé comme on se glisse dans un vêtement, je m'y suis livrée comme on accepte une astreinte. Je l'ai fait d'abord pour moi, ne t'y trompe pas, c'était un choix égoïste, même s'il m'a coûté. En fait j'ai pensé que cela me sauverait. Mais le rien-dire ne sauve pas, enfin disons que moi, il ne m'a pas sauvée. Je crois même qu'il m'a enfoncée un peu plus dans la tristesse, le chagrin. Pour être tout à fait honnête, il m'a dévastée parce qu'il est peuplé d'images, le silence, de souvenirs impossibles à classer, telles ces mouches inopportunes qui tournent autour du visage, qu'on tente d'éloigner avec de grands mouvements des bras, et qui toujours reviennent. Et puis dans le silence on est sans défense : les assauts n'en sont que plus blessants."

Plus loin :

*

"Non je ne t'aurais pas offert la sécurité.

Mais aimer, ce n'est pas s'installer une fois pour toutes au sommet de ses certitudes. c'est douter toujours. Trembler toujours. Et puis demeurer vigilant pour éviter que le poison mortel de l'habitude ne s'insinue et ne nous tue ou pire : nous anesthésie. Ne pas croire que tien ne reste à faire mais au contraire séduire, séduire encore.

Aimer ce n'est pas gagner à tous les coups. C'est prendre des risques, faire des paris incertains, connaitre la frayeur de perdre sa mise pour mieux savourer le frisson de la doubler.

Aimer, ce n'est pas emprunter des routes toutes tracées et balisées. C'est avancer en funambule au-dessus des précipices et savoir qu'il y a quelqu'un au bout qui dit d'une voix douce et calme : avance, continue d'avancer, n'aie pas peur, tu vas y arriver, je suis là."

*

"Les ignorants, oublient-ils que l'écriture est un travestissement, si on le décide?

Je te réserve ma vérité intime. Je sais trop bien que tu n'en feras strictement rien."

*

""Vous vous êtes tant et si mal aimés tous les deux". La phrase est venue comme un coup de grâce. Tombée comme un couperet. J'ai entendu le bruit de la lame quand, après sa course brève, elle sectionne les nuques. Tant et si mal aimés.

Peut-on viser plus juste?"

*

"Cette lettre me ressemble : elle déborde, comme le font certaines rivières de leur lit. Au fond, le seul sujet auquel je me suis tenue, c'est toi. Il m'est arrivé de me fixer, tu vois. Ce n'est pas ce que j'ai fait de mieux apparemment."

6€17 dans la collection 10/18 par exemple ici.

Bien sûr ce roman m'a évoqué deux films que j'ai beaucoup aimés, des films qui relatent l'errance solitaire d'une femme qui cherche à se recontruire:

Villa Amalia de Benoit Jacquot avec Isabelle Huppert, bouleversante:

Et My Blueberry Nights de Wong Kar-Wai avec le mythique couple Norah Jones/Jude Law qui finit par se trouver après s'être tenu à distance sans rompre le lien, épistolaire, justement...

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