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Guatemala: que penser de la « main dure » d’Otto Pérez Molina?

Publié le 19 décembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Les Guatémaltèques ont élu Otto Pérez Molina sur sa promesse de lutter avec une poigne de fer contre le crime. Cependant, sa stratégie pourrait certainement se retourner contre lui.

Par Juan Carlos Hidalgo (*), depuis les États-Unis
Article publié en collaboration avec le Cato Institute

Guatemala: que penser de la « main dure » d’Otto Pérez Molina?

"Mano dura" : Otto Pérez Molina a promis de mener une politique de la "main dure".

Le mois dernier, j’ai visité le Guatemala, où le nouveau président élu, Otto Pérez Molina, a promis de déployer l’armée pour combattre le crime organisé. Pérez Molina  – lui-même un ancien général de l’armée – a dit qu’il suivra l’exemple de Felipe Calderón en déclarant une guerre totale contre les cartels de la drogue. Il devrait réfléchir à deux fois à cette stratégie.

Regardons le taux d’assassinats au Mexique quand Felipe Calderon est arrivé au pouvoir en décembre 2006 et a lancé une offensive militaire contre les cartels de drogue. Le taux d’assassinat dans ce pays, mesuré par le nombre d’homicides pour 100.000 habitants, a connu une baisse constante depuis le milieu des années quatre-vingt-dix. Cependant, il a explosé après que l’armée soit allé dans les rues, déchaînant une violence inouïe puisque les cartels ont riposté et ont intensifié leurs vicieuses querelles.

Guatemala: que penser de la « main dure » d’Otto Pérez Molina?

Source: Étude mondiale sur les homicides 2011, Bureau des Nations Unies contre la drogue et le crime.

Le phénomène très clair au Mexique est que, au lieu d’apaiser la violence, le déploiement de l’armée a aidé à la magnifier. La raison en est que, même si l’armée pouvait prétendre à la victoire en tuant ou en arrêtant un baron de la drogue ou un des membres d’un gang, il ne faisait que créer un vide que les cartels s’employaient à remplir – et cela violemment. Le spectre criminel très fragmenté mexicain, avec au moins sept cartels de la drogue significatifs en lice pour le contrôle du territoire, est en quelque sorte le résultat de la guerre du gouvernement contre le crime organisé.

Pourtant, le taux d’assassinats au Mexique en 2010 (21,5 meurtres pour 100.000 habitants) est environ la moitié du Guatemala (41,4 meurtres pour 100.000 habitants). Il y a deux raisons pour lesquelles les choses pourraient empirer au Guatemala: d’abord, l’armée est mal préparée à la lutte contre les puissants cartels mexicains qui ont déjà une présence dans ce pays. Après l’accord de paix de 1996, la taille de l’armée guatémaltèque est passée de 50.000 soldats à seulement 16.000. Si les cartels sont prêts à combattre une armée mexicaine mieux équipée, on ne peut que se demander ce qu’il adviendrait de son équivalent guatémaltèque plus petit et plus pauvre. Deuxièmement, même si l’armée réussissait à affaiblir les cartels, le même phénomène de vide qui est intervenu au Mexique aurait également lieu au Guatemala. Jusqu’ici, le Mexique a deux des cartels les plus puissants, Sinaloa et Los Zetas, qui contrôlent différentes parties du territoire du Guatemala, mais ils ne se sont pas encore affrontés l’un contre l’autre dans ce pays. Cela pourrait changer si l’armée porte un coup important à l’un d’eux, offrant une opportunité à son rival.

Les Guatémaltèques ont élu Otto Pérez Molina sur sa promesse de lutter avec une poigne de fer contre le crime. Cependant, sa stratégie pourrait certainement se retourner contre lui, laissant les Guatémaltèques bien plus mal qu’ils ne le sont déjà.

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Sur le web
Traduction : JATW pour Contrepoints.

(*) Juan Carlos Hidalgo est coordinateur de projet pour l’Amérique latine au Center for Global Liberty and Prosperity. Auparavant, il était directeur pour l’Amérique latine de l’International Policy Network. Régulièrement, il publie des articles ou fait des interventions télévisées dans les médias latino-américains ou états-uniens.


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