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Interview Claire Denamur

Publié le 21 décembre 2011 par Bullesonore

Interview Claire Denamur

Claire Denamur a 27 ans. Jeune recrue de la chanson française, elle promet. C’est une évidence. Quelle maturité dans son disque « Vagabonde » ; un deuxième album qu’elle a tendance à considérer comme le premier tant il se rapproche enfin de l’effet recherché. Car Claire Denamur, jeune femme au regard plein de détermination, a une idée bien précise de ce qu’elle a à dire et à chanter. Dans ce disque, une jeune femme nous dévoile sa « quête » d’elle-même, des autres, du passé, de liberté.

Elles déambulent, elles errent, elles rôdent. Elles dégagent un sentiment de liberté, nous donnent des sensations de grands espaces. Elle déambule, elle erre, elle rôde : Claire Denamur vagabonde.

Il n’y a pas eu d’envie de fuite avec ton nouvel album « Vagabonde« , même si le titre tend plus à l’errance, au voyage, à une certaine instabilité. C’est plus en fait d’une évolution musicale qu’il s’agit ?

C’est exactement cela. Il ne s’agit pas de fuite avec cet album, c’est une affirmation de moi des deux côtés, en tant que femme et en tant qu’artiste. Les thèmes par contre expriment la petite quête que je mène dans mon parcours de vie, de liberté, peut-être pour fuir une société avec laquelle je ne me sens pas en adéquation.

On ressent quand même une vague nostalgique à des moments dans ce disque

La nostalgie qu’il y a dans cet album c’est par rapport à quelqu’un que j’ai été par le passé notamment en tant qu’adolescente et je me sentais beaucoup plus forte à l’époque.

C’est bizarre, en étant ado, on est plus « faible » et vulnérable !

Quand j’étais adolescente, j’avais le sentiment de savoir bien mieux où je voulais aller et comment j’allais y parvenir…

Qu’est ce qui a changé, qui t’a rendu moins forte ?

En plein milieu du chemin, tout d’un coup on m’a intercepté puis on m’a dit viens viens faire un album. Je ne m’attendais pas à faire ça, je ne me voyais pas forcément là-dedans et en plus  y a une pression énorme. Quand on se dit que nos petites chansons faites chez nous à la maison pour les amis et la famille, des chansons vraiment que pour soi, c’est plus un grand public qui va les écouter, qui va les juger (et les aimer ou les détester), tout cela n’était pas vraiment prévu (sourire).

J’avais trouvé ton premier album excellent, c’est drôle on ne sent vraiment pas que tu n’étais pas prête pour enregistrer un disque.

ça me ressemble moins que ce que je propose aujourd’hui parce que j’ai mis tout ce temps-là (depuis le premier album) à me chercher. Et puis aussi, tout simplement parce que je m’y dévoile beaucoup moins. Le premier album c’est la réunion de textes écrits quand j’avais 15 ans, cet âge où on aime écrire des chansons d’amour (rires). Et lorsqu’il est sorti, j’avais 25 ans … C’est vieux presque !

Interview Claire Denamur

« Rien de moi » par exemple, est une chanson de ton deuxième album et tu te livres assez … C’est une chanson sur l’adolescente que tu étais, une adolescence que tu as perdu …

Artiste n’est pas seulement mon métier, mais ma façon d’être aussi. Je me dis que je peux me permettre de me confier, même si c’est à plus de gens …

Peut-on dire que cet album est né grâce à la rencontre avec Da Silva ?

En fait, avant même de rencontrer Da Silva, j’avais déjà commencé la création de cet album et donc j’avais la moitié déjà prête. La rencontre avec Da Silva ça a complété et ça a « bouclé » cet album, ça la rendu cohérent et beaucoup plus fort que si je l’avais faite toute seule. Finalement, si j’avais fait « Vagabonde » toute seule, ça aurait été juste un album où je me confie, où je parle uniquement de mon vécu à la première personne.

A la base, ta première langue ça aurait été l’anglais, donc avec la petite touche Da Silva sur cet album, on retrouve un beau côté lyrique dans les chansons 

En français, je n’ai pas les moyens ni les outils pour dire les choses comme Da Silva a pu les dire. Sur « Bang Bang Bang » par exemple, c’est le fruit de nos conversations qui duraient jusqu’à très tard dans la nuit lorsque j’étais pendant une semaine chez lui à Rennes pour faire des chansons. C’est le fruit de nos conversations, de nos visions respectifs du monde actuel et de notre époque. Il a apporté une touche plus littéraire et m’a permis de traduire ce que j’avais parfois du mal à exprimer en français.

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Tu apportes une musique nord américaine chantée en français, et du coup ça donne quelque chose de plus fondé, de plus profond ! (Cf. la chanson « Hurt », titre de Trent Reznor et popularisé par Johnny Cash, qu’on retrouve sur l’EP 4 titres « Bang Bang Bang« )

C’est mieux que la question « Pourquoi tu chantes en français ? » (rires), du coup je vais répondre à ma propre question (rires). Pourquoi le français ? Ben y a deux raisons derrière : D’une part, je suis en France et je suis bel et bien française quand même (sourire) et je trouve que c’est normal de chanter en français surtout quand on fait des recherches de textes. Si à la limite je ne cherchais pas qu’on me comprenne particulièrement et de comprendre mon être, je serai passée à l’anglais. Puis d’autre part, l’autre raison, y a quelques temps quelqu’un m’a dit qu’apparemment si j’avais fait la même chose mais en anglais, je ferai partie d’un tableau de chasse où il y a beaucoup beaucoup de gens qui font ça, qui l’ont fait par le passé et qui le feront plus tard. Le fait de travailler sur une musique en français, ça nous a obligé à arranger  la musique d’une façon beaucoup moins clichée que les standards américains.

Quand j’ai fait mes maquettes guitare-voix, je faisais une country typique (sourire) ou une folk typique. Avec la vision de Jean Massicotte qui a réalisé cet album, et parce qu’on s’adressait à un public francophone, il fallait moderniser le son et l’amener vers quelque chose d’un peu plus « français ».

Y a une chanson où ta voix est plus grave, « Together » qui  n’est que l’oeuvre de ton frère, Laurent Denamur. Cette fois-ci le morceau prend ses marques du côté du blues. Peut-on dire que ça fait partie de tes chansons les plus importantes ?

C’était impensable de ne pas inclure cette chanson dans mon disque. Quand l’album a pris forme avec Da Silva, je me suis rendue compte que j’étais entrain de réussir le défi que je voulais relever un an et demi plutôt, c’est à dire faire un album qui sonne américain. « Together« , la chanson de mon frère, je la connaissais depuis des années. Quand je l’ai écouté, j’avais l’impression d’écouter un enregistrement américain des années 20 ou 30, d’un mec avec un chapeau sur une chaise à bascule avec une voix absolument incroyable.

Image de prévisualisation YouTube

(grand sourire) J’ai hâte de voir l’album en physique, et hâte de voir sa réaction quand il verra son nom sur un album … moi ça m’a fait bizarre (sourire).

En paralléle de « Vagabonde », tu as enregistré des reprises qui sont mises en ligne sur internet de façon épisodique sous le nom de Vagabondages :

Tu ne les mets même pas en bonus sur ton album ?

Je garde volontairement une distance avec les reprises pour ne pas les intégrer à mon répertoire, même si je viens de cette école-là ! J’ai passé beaucoup de temps dans les restos et les bars à faire que des reprises, bien que j’avais à l’époque cinq chansons à moi mais c’était clair, je n’allais jamais les jouer (sourire). Ce n’était pas avec une chanson d’une petite nana, qu’ils ne connaissaient pas, que j’allais attirer l’attention des gens dans les bars, alors si on leur sort une reprise des Rolling Stones (sourire)…

Mais pourquoi ces Vagabondages ? 

Mon album était prêt depuis pas mal de temps et je pense vraiment avoir préféré mourir que d’attendre en silence qu’il sorte. J’en suis vraiment fière, je l’aime (grand sourire) et j’ai envie que les gens l’écoutent et me disent ce qu’ils en pensent, d’où la sortie de l’EP (Bang Bang Bang EP sortie en mai 2011). Comme on a vraiment travaillé « visuellement » sur cet album, on s’est dit qu’on allait se servir du monde un peu en noir et blanc qu’on avait créée  et faire filmer ces reprises tout simplement.

Donc, est-ce-que l’aspect visuel d’un projet musical compte autant que la musique elle-même ?

Il est aussi important … J’ai cherché à travailler d’une façon très très forte, très prononcée sur le visuel de cet album parce que j’ai conscience que les temps sont durs pour nous tous, artistes compris et les places sont hyper chers; il faut se rendre identifiable et c’est particulièrement difficile de le faire. Sur mon premier album, j’avais du mal à trouver, parce qu’être habiller sur scène comme on l’est au quotidien avec la même coupe de cheveux c’est … bof. L’art de la scène ça vient du théâtre, ça vient de la comédie musicale, et normalement pour ces apparitions-là  c’est des visuels très forts, ça passe beaucoup par l’expression faciale.

Donc tu as voulu rendre identifiable cette vagabonde que tu incarnais, je comprends mieux … Et sinon, la petite quête que  tu mènes dans ton parcours de vie ça t’a aidé à te retrouver ? 

Ben j’espère pas (sourire), très sincérement je trouve que ce qui est très intéressant c’est la quête et pas l’arrivée. Je préfère me dire que ma quête va durer toute ma vie, c’est très stimulant, ça nous rend meilleur ça nous fait progresser avec le temps, … J’espère ne m’être pas retrouvée (rires).

Je l’espère aussi (rires).

Bon, on va se quitter en musique : Que peux-tu me conseiller comme musique à écouter ? 

S’il faut absolument quitter le passé musical et choisir quelqu’un d’aujourd’hui, je dirai Asaf Avidan & The Mojos, qui a quelque chose de bluesy avec une voix plus féminine on meurt !


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