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Une justice privée?

Publié le 26 décembre 2011 par Copeau @Contrepoints

Quelles sont les solutions alternatives au Tout-État pour les fonctions « régaliennes » ?

Un article de l’aleps

JusticeDans de précédents articles, nous avons montré comment il est possible de se passer du « Tout-État » dans les domaines de l’enseignement, de l’université, de la protection sociale (santé et retraites), de l’énergie , des transports, de la monnaie et de la finance. Mais quid des missions « régaliennes » ?

De quelle justice s’agit-il ? 

Il y a la justice civile, la justice commerciale, la justice administrative, la justice pénale. Chacune d’entre elles a sa propre histoire, ses propres fonctions. Quand on classe la justice parmi les fonctions « régaliennes » de l’État, on manque de précision.

Il n’y a aucune raison pour que la justice commerciale soit rendue par des fonctionnaires. De tous temps il a existé des tribunaux de marchands, appliquant des règles spécifiques au commerce : c’est un droit de professionnels, avec des coutumes évoluant avec le temps et les techniques. Aujourd’hui, les plus gros contrats internationaux prévoient l’intervention d’individus ou de cabinets capables de régler les cas litigieux. Cela représente des centaines de milliards, et justice est rendue sans problème – indispensable à l’heure de la mondialisation.

On peut en dire autant pour la justice civile, qui concerne l’application et l’évolution du droit des familles et des biens privés. La France est un pays « de code », par opposition aux pays anglo-saxons dits « de common law » : ici les juges ne sont pas des fonctionnaires dépendant de l’État et appliquant une législation nationale.

Pourquoi les juges sont-ils des fonctionnaires ? 

Aux États Unis, les juges sont élus. Ils n’ont de statut public qu’une fois installés. En Angleterre, les juges exercent une véritable profession libérale, ils sont des entrepreneurs concurrents, le plus souvent issus de plusieurs années de barreau. L’expérience et la notoriété de ces juges privés tranchent avec celles que l’ont trouve aujourd’hui chez les juges français. On a d’ailleurs tendance aujourd’hui à retrouver, pour les petites affaires locales, l’équivalent des « juges de paix », notables réputés pour leur compétence et leur honnêteté.

Quant à la justice administrative, qui tranche des litiges dans lesquels l’administration publique est en cause, elle est une particularité française, que rien ne justifie. Il n’y a aucune raison pour que les pouvoirs publics échappent au droit commun.

Donc, au total, la justice privée existe déjà, même en France, et il suffirait de se référer aux pratiques étrangères pour avoir une justice plus rapide, plus sûre, et moins coûteuse.

Des auxiliaires et des magistrats privés pour la justice pénale  

Comme son nom l’indique cette justice prononce des peines : amendes et prison. Les peines ne peuvent se confondre avec les condamnations civiles ou commerciales qui ne sont que le respect d’obligations contractuelles et entendent réparer des dommages. Les peines impliquent une coercition : le condamné est forcé à perdre son argent et/ou sa liberté. Qui peut imposer une telle coercition ? La réponse classique est celle de l’État : il a le monopole de la violence, lui seul peut donc punir, et a le droit de punir.

Peut-on déléguer tout ou partie de ce droit ? Tout d’abord, il faut distinguer l’administration de la justice pénale et les juges eux-mêmes. Par exemple les services du greffe, l’équipement et l’entretien des tribunaux, peuvent avantageusement être confiés à des professionnels ou des entreprises privées. La lenteur et la vétusté disparaîtraient sans doute.

Ensuite se pose le lancinant et douloureux problème carcéral. L’expérience de prisons entièrement privées (y compris pour les tâches de surveillance) a été positive dans de nombreux pays, et aux États Unis, suivant les États, les prisonniers payent leur séjour, donc sont obligés d’avoir une activité marchande – ce qui leur permettra de se réinsérer plus vite ensuite.

Quant aux juges, ils sont accompagnés de jurys populaires pour les crimes – ce qui est un choix de société – mais les magistrats devraient avoir un mode de recrutement et de promotion parfois différent de celui d’une École Nationale. Comme en Angleterre, il serait souhaitable que des professionnels expérimentés interviennent aux côtés de jeunes magistrats frais émoulus de l’ENM.

En conclusion, si la justice pénale intégralement privée n’est pas pour demain, l’introduction de prestataires et de magistrats privés en matière criminelle devrait améliorer le fonctionnement de la justice.

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