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Ethique et droit

Par Jjs

Officiellement, l'envie de morale et d'éthique ne cesse d'envahir le droit français et le droit international.

Officieusement, certains évoquent un recul en matiére éthique....

Y a t il un parallèle entre ces deux faits ? Est-ce une bonne chose que de moraliser ainsi le droit ?

Concernant la seconde question, il importe de savoir que cette pénétration est nouvelle. Jusqu'à récemment, les juristes se défiaient de la morale. En effet, inspirés par ce que l'on appelle le positivisme juridique et l'une de ses figures de proue (Hans Kelsen), ils estimaient qu'il était dangereux  de juger les hommes à leur valeur morale car ainsi  nous prenions le risque d'un retour des totalitarismes.

Les donneurs de leçon de tous ordre donnent parfois les pires tyrans....Influencé par cette crainte, notre monde juridique, nos évaluations (en tout domaine) se faisaient et se font encore (à tout le moins en apparence et pour les non initiés, pour ceux qui ne sont pas "branchés") de manière formelle....A l'ancienneté, au respect de certaines formes....

Depuis Bourdieu, Foucault et quelques autres, nous savons que ce respect de formes, ce jugement formel, apparemment égaliaire favorise les nantis et les bien nés. En effet, pour fonctionner efficacement, il se devait de se conformer à des régles obscures et uniquement connues des initiés : résultat , seuls les favorisés, les bien informés en profitaient....Fini désormais l'adage des Lumiéres : désormais il s'est renversé, ce n'est plus nul n'est censé ignorer la loi c'est , nul qui n'est pas habilité n'est censé la connaître sauf au péril de sa vie...ou de son honneur...Ainsi, l'on s'en doute, cette situation a créée des abus, des passe droits. Elle a installé des privilèges indûs dans certains cas.

Pour les limiter, lutter contre le cynisme que cette situation a pu installer et contre la desespérance engendrée par ce déclin de ce que d'aucuns appellent les "valeurs", la pénétration de l'éthique dans le champ du droit a  eupour objectif d'évaluer les individus sur leurs valeurs morales, d'introduire à nouveau du sens dans nos vies.

Cette tentative a t elle été heureuse ?

Ce  nouveau projet pose à nouveau de sérieux problèmes à certains. En effet, il s'agit ici d'une morale normée et juridique. Elle confond droit positif et morale. De plus elle est accessoire pour certains et redoutables pour d'autres, souvent les plus faibles. C'est une exigence morale et éthique à deux vitesses. Tout le monde le sent bien : la corruption, le libertinage, l'égoisme sont érigées en valeurs suprêmes dans une certaine élite conquérante et le peuple quant à lui ne cesse de recevoir et de se voir limité...

  Mais faut-il ne rien faire, revenir à la situation antérieure ? Certes, le retour d'un ordre moral nauséabond n'est pas impossible si nous poursuivons cette route : cynisme et éthique n'ont jamais fait que produire cette tyrannie de la morale au service des idiots pour affaiblir la véritable élite : la conjuration des imbéciles à l'oeuvre écrivait-on autrefois. Cependant, dans l'autre sens, ne rien faire c'est prendre le risque du ridicule et du retour de l'impudence éhontée et du cynisme que le positivisme a permis d'installer sans le vouloir certainement ....(Kelsen se serait retourné dans sa tombe s'il avait vu ceà quoi nous assistons et que je préfére appeler du sous positivisme mais passons...).

En accordant à cette éthique une place secondaire, le danger serait limité.Les donneurs de lecon et les Tartuffe de tous ordre seraient moins dangereux....Toutefois, nous l'avons indiqué cette secondarité ne s'impose pas à tous et c'est ici qu'elle pose probléme : lorsqu'il faut sanctionner, évaluer les plus faibles, les plus étrangers à un système, les plus démunis, elle est redoutable, humiliante, terrible...Elle justifie ainsi l'exclusion, le licenciement, le harcélement de un tel parce qu'il aura eu tel comportement jugé immoral  par la majorité mais elle admet allégrement les mêmes débordements chez les plus puissants et les mieux protégés. Certes parfois, ces puissants se choisissent quelque malheureux bouc émissaire pour dire au peuple "voyez, nous aussi nous sommes contrôlés" mais le peuple n'est pas dupe lorsqu'il réfléchit, il sait bien ce qu'est ce bouc émissaire, parfois lui-même fabriqué individu immoral pour les besoins de la cause....Alors que faire ?

Difficile de proposer des " il n'y a qu'à" mais tout de même, le bon sens le plus élémentaire voudrait :

a) que ce soudain retour de la morale dans le droit ne vise pas que les plus faibles ou les plus faibles des plus puissants mais tout le monde  : du plus petit au plus puissant....et srutout qu'elle ne favoriser la multiplication des logiques de bouc émissaires...Or dans le cynisme ambiant on doute de cela...

b) que chacun balaie devant sa porte et que ceux qui accusent regardent à deux fois ce qu'ils ont à se reprocher avant que d'accuser...Mais le doute est grand également en ce domaine tant l'immoralité de notre voisin nous répugne et la nôtre nous parait si belle...!

Alos que faire  ? Revenir et réflechir à nouveau aux liens et distinctions qui unissent et distinguent : droit et éthique. Faire oeuvre philosophique en ce domaine. Proposer de nouvelles définitions de l'éthique...Oui mais que dire et que faire ?

Ici, nous ne sommes qu'au stade de la recherche et de l'hypothèse: un chercheur ne trouve pas, il cherche...Donc cherchons et proposons sans prétendre arrêter la longue liste des idées qui ont pour merveilleuse idée d'être de libre parcours comme le disent les juristes français....

Donc, s'il faut distinguer éthique et droit positif, il faut rappeler qu'un même mot les réunit : celui de droiture...L'une et l'autre doivent servir un même, ce même but. De plus, il importe effectivement de rappeler la supériorité de l'éthique sur le droit positif puisque celle-ci repose sur la foi en sa nécessité alors que le droit positif repose sur la peur de la sanction... Logiquement, le droit positif doit donc servir cette éthique.

Le servir, cela signifie en ces temps de manipulation de tous ordres, qu'il faut être prudent avec le concept même d'éthique et qu'il ne faut pas l'utiliser à tout bout de champ. D'ailleurs qu'est ce que ce mot signifie exactement ? Aujourd'hui l'évolution est telle en ce domaine que nous pourrions effectivement en proposer de multiples acceptions : quelle éthique en effet adopter : une éthique du comportement, de l'acte, de la conséquence, appliquée, clivée, transversale, jugeant les individus sur le temps et non sur un seul acte, une éthique globale, locale ? Le débat peut être engagé en ce domaine.

Mais alors, faut-il pour autant exclure l'éthique du droit positif ? Non, l'éthique doit en être sa source et son principe sinon nous n'avons affaire qu'à un droit dénaturé. Cependant, il faudrait pouvoir effectivment et qu'en acte, nos élites ne soient plus sélectionnées sur un seul critère : le critère formel. Il faudrait que les qualités éthiques les plus diverses puissent être reconnues et faire l'objet du respect le plus élémentaire . Cette ouverture et cette acceptation d'une éthique multiple qui pourrait même admettre ceux qui ont la modestie de se dissimuler en ce domaine, pourrait ainsi permettre à notre pays de sortir de l'orniére dans laquelle il est entrée : une sélection suivant un seul type de critère,le critère formel et positiviste doublé d'un discours moralisateur qui ne touche finalement que les plus humbles ou les plus faibles ou les boucs émissaires et qui risque d'ailleurs d'en fabriquer de nouveaux pour se construire une nouvelle légitimité.

En résumé : nous nous interrogions sur la montée de l'éthique dans le droit et le sentiment de son recul. Mais ce sentiment s'explique sans doute par ce que nous avons tenté d'expliquer : une éthique devenue premiére pour ceux qui y croient et derniére pour ceux qui en doutent et ne voient en elle qu'un amuse gueule pour idiot utile...Il faudrait que cette éthique redevienne premiére mais qu'elle accepte sa diversité et que nos élites soient sélectionnées sur leur valeur morale mais que ces valeurs soient reconnues dans leur extrême diversité : de celui qui est "doué" pour connaître les formes et les régles nécessaires pour réussir tel concours (l'héritier écrirait Bourdieu) qui mérite une reconnaissance car ce n'est pas rien que de se plier à ces régles même lorsque l'on n'y croit guére (et plus encore car quelle abnégation parfois, que de travail continuel sur soi pour dissimuler, jouer en permanence), à celui qui est totalement gauche face à ces régles et ces normes mais qui a démontré par ses actions qu'il avait le souci de bien faire, d'oeuvrer comme il se devait et ce dans tous les domaines, qu'il ait été bon pére de famille, bon artisan, bon ouvrier, bon voisin... Mais me direz vous c'est un relativisme moral et éthique que vous préconisez  ?

Nullement c'est une éthique qui tient compte de la singularité de l'homme et de la dangerosité de tout discours sur l'éthique que d'habiles mauvais lecteurs peuvent toujours parvenir à retourner contre cette éthique même....L'éthique ne vise pas le normal ni la norme mais comme le droit au sens noble, elle vise l'exception or, par définition celle-ci est telle qu'elle n'est pas visible à l'oeil nu : il faut donc se défier des formules trop bien ficelées la concernant.... 

Cette éthique plurielle doit cependant avoir plusieurs limites : notre propos n'est pas ici de les recenser mais elle doit reposer sur certains principes ouverts, être en acte et ne pas créer de honte humiliante....mais pour expliquer tout ceci, il me faudrait d'autres lignes, d'autres notes, d'autres écrits....



 

   

 


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