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L’utopie de la modernité

Publié le 13 janvier 2012 par Wtfru @romain_wtfru

 L’utopie de la modernité

Slow life, slow food, slow fuck (pour ceux qui peuvent), il suffit aujourd’hui d’apposer slow devant toutes les disciplines et de l’accorder à toutes les sauces pour détendre l’atmosphère et obtenir l’approbation générale. Pas d’interro surprise, mais nous espérons sincèrement que vous avez fait vos devoirs de la semaine dernière.

Le ralentissement général prôné par une bande d’hurluberlus – les hippies du XXIème siècle en quelque sorte – suscite un tollé sans précédent dans toutes les sphères qui nous entourent. Tout y passe sans ménagements ; de l’histoire à la sociologie en passant par la finance, le management et la cuisine, on veut prendre le temps. Dans le monde hyperaccéléré qui nous entoure, on se retrouve tous noyé sous un flot d’informations sans précédent.

Pour y voir plus clair, back to the roots.

Harmut Rosa, philosophe et sociologue allemand également professeur à l’Université d’Iena, explique dans son dernier ouvrage Accélération pourquoi l’homme moderne est davantage pressé par le temps. Alors qu’à l’époque, dans sa ville imaginaire, il fallait passer sa journée à couper du bois pour se chauffer, l’apparition du chauffage automatique allait révolutionner la société en laissant du temps pour lire, nager ou faire une sieste. Il détaille sa fable en faisant allusion à l’agriculture ou encore les transports. Ainsi, le protagoniste avait du temps pour s’asseoir dans le jardin et discuter avec sa femme (ou celle du voisin). Pourquoi se passe-t-il exactement le contraire en réalité ? Simplement parce que les changements techniques – accélération – sont accompagnés de profonds changements de la société et rythmes de vie. On en fait beaucoup plus, plus vite, trop vite. L’être humain est alors plus que jamais stressé par le temps.

On confond très souvent, et à mauvais escient d’ailleurs, décélération et décroissance. La logique à saisir derrière les mouvements slow n’est pas de moins faire, mais de mieux faire. Ralentir pour progresser. Le slow money ne veut pas dire investir moins d’argent, mais mieux placer et plus longtemps. Le slow management ne veut pas dire travailler moins, mais mieux collaborer et éviter les effets de burn out. Le slow food ne veut pas dire moins manger, mais mieux s’alimenter et prendre le temps de savourer. Oui, des exemples on en a la pelle. Remplacer le « toujours plus » par le « toujours  mieux » nécessite des changements profonds, parfois incompréhensible. Si incompréhensible qu’on risquerait très vite de devenir une cigale dans la fourmilière. L’évolution diachronique de notre environnement au sens large doit se faire sur le long terme. C’est l’art du sustainable pour les anglophones. Alors si vous ne voulez pas être touché d’arithmomanie* aigüe, prenez donc le temps de comprendre.

* « La maladie de l’homme pressé ». Les personnes victimes de cette pathologie mentale sont obsédées par les nombres. Certains ne peuvent s’empêcher de compter tout ce qui tombe sous leurs yeux.  


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