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Les Hommes de l’ombre entre eux

Publié le 25 janvier 2012 par Francoisjost

Les Hommes de l’ombre entre euxCe soir commence sur France 2 la diffusion des Hommes de l'ombre. Toute personne exposée aux médias en a entendu parler: c'est une mini-série en 6 épisodes qui racontent une campagne présidentielle du point de vue des communicants.

Il se trouve que je l'ai déjà vue car le Mouv' m'avait demandé de réagir à son sujet. Plus précisément de dire si, selon moi, cette fiction était fidèle à la réalité. L'interview, bien sûr raccourcie, a été diffusée dans Saison 1 épisode 1, que l'on peut réécouter grâce à ce lien:

http://www.lemouv.fr/player/reecouter?play=7242

Néanmoins, beaucoup de choses que j'avais dites ont été mises de côté, comme c'est l'usage, et je profite de mon blog pour les dire publiquement. Globalement, cette fiction est bien construite et, bien qu'elle progresse beaucoup moins vite qu'une série américaine, on ne s'ennuie pas. Mais qu'apprend-on vraiment sur la communication politique?

- que les hommes ou les femmes politiques font du média training

- qu'ils tentent des coups de bluff, comme ce dossier mis sur la table en évidence par Mitterrand, lors de son débat avec Giscard, qui redoutait qu'il l'ouvre pour évoquer l'affaire des diamants.

et d'autres choses encore.

En revanche, le point de départ de la campagne d'Anne Visage, jouée par Nathalie Baye, est totalement absurde: le communicant Simon Kapita décide une ministre à se présenter contre son premier ministre qu'il déteste. Pourquoi pas? me direz-vous. Pourquoi pas. Ce qui est plus étonnant, c'est qu'elle n'a pas de parti derrière elle et que le communicant va décider un parti à la suivre. Etonnant non? un parti à qui on livre une candidate clé en mains. Plus curieux encore, le QG de campagne de celle-ci est tout le temps désert, il n'y a pas de conseiller politique et tout se passe entre Anne Visage et son communicant. Comme si, pour le reste, la vie du parti était un long fleuve tranquille... Sur ce point, on comparera West Wing, qui donne l'impression d'un grouillement perpétuel, et le désert des Hommes de l'ombre.

En écoutant ces critiques, le scénariste ou le producteur, je ne sais plus, a rétorqué que j'avais raison, mais que c'était une fiction, nullement obligée de coller à la réalité. Qu'il s'intéressait scénaristiquement à une relation duelle. Soit. Après tout, je veux bien l'entendre. D'autant que j'ai toujours professé que les droits de la fiction et de l'écrivain étaient sans limite. Mais ce que j'accepte moins, c'est qu'on joue sur les deux tableaux. D'un côté, on fait la promotion du film sur le thème "regardez cette série et vous saurez tout sur la communication politique", de l'autre, on fuit les critiques faites au nom du réalisme, en opposant le statut fictionnel.

Pour ne pas faire le communicant, qui vend son émission comme un homme politique, il faut dire où l'on se trouve et ne pas inciter le spectateur à prendre des vessies pour des lanternes. Pour ma part, j'aime bien cette fiction, mais ce qu'elle m'apprend de la vie politique est très réduit: outre qu'elle utilise des faits vrais que tout le monde connaît tant ils ont été rebattus  (ceux que j'ai cités plus haut), elle laisse accroire que la politique n'est qu'une histoire de communication et que la communication fait tout. Dans la réalité, on en est loin. Les candidats ont aussi des valeurs, contrairement aux candidats des Hommes de l'ombre qui en semblent dépourvus. Qu'ils soient de droite ou de gauche, ils se battent aussi pour des idées, ce que cette série ne montre à aucun moment. Et les affrontements entre conseillers et communicants En outre, la communication ne fait pas tout. La "Force tranquille " était un bon slogan parce qu'il collait au candidat Mitterrand, mais bien malin celui qui peut dire combien cela lui a rapporté de voix. Sûrement beaucoup moins que la trahison de Giscard par Chirac, qui appelait à voter Mitterrand.

Les liaisons dangereuses entre communication et politique existent, mais elles sont beaucoup plus complexe que ce que montre cette série, dont on risque de retenir simplement ceci : on est manipulé par le système.


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