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Peut-être Yann Moix n'aime-t-il pas lire...

Par Pmalgachie @pmalgachie
Yann Moix se fait encore remarquer. Il adore ça. Et pratique volontiers l'excès pour être certain de s'offrir un bref moment de gloire. Après Frédéric Beigbeder, il s'en prend lui aussi au livre électronique dans un article de La Règle du jeu: L'orgie numérique ou comment et pourquoi détester l'e-book, en se basant sur quelques affirmations péremptoires. Du genre, dès les premières phrases: "L’e-book s’arrache et on sait bien pourquoi : c’est le livre qu’il s’agissait de tuer. Le livre fait peur: il intimide. Il s’agissait d’avoir sa peau. C’est pratiquement fait." Nous ne sommes pas dans la nuance. Argumentation (je simplifie à peine, car il est difficile de faire plus simpliste que Yann Moix): télécharger l'intégrale de Balzac ou de Proust, c'est se donner une bonne raison de ne pas lire les livres. "Le but du jeu est d’enterrer à jamais les œuvres par le seul fait de les posséder toutes. Posséder tout Balzac revient à obtenir la permission de ne jamais avoir à en lire une ligne."Lire, voilà bien l'enjeu - et la seule chose sur laquelle Yann Moix ne se trompe pas. Mais quelle importance si on lit sur papier bible ou recyclé, mat ou brillant, blanc ou crème? Ou (attention, la proposition suivante va faire mal, très mal!) sur écran? N'en déplaise à MM. Beigbeder et Moix, la démarche est la même, motivée par le seul plaisir de lire - je n'entre pas ici dans le débat qui consiste à décider si le livre numérique peut être l'exacte reproduction d'une édition papier ou doit bénéficier, par l'apport de musique ou d'hyperliens, des possibilités de la machine.Hier, j'ai lu sur écran le roman d’Élise Fontenaille, Les disparues de Vancouver, réédité aujourd'hui en poche, et celui de Daniel Pennac, Journal d'un corps, qui paraît demain. Je m'apprête à (re)lire sur papier Le froid, de Thomas Bernhard, probablement photographié à partir de l'édition originale plutôt que repassé par la phase composition, car la typographie est tremblée et presque baveuse. Je n'ai pas le choix de la police de caractères, ni de sa taille. Tandis que, celle dans laquelle se présentait le livre d’Élise Fontenaille ne me convenant pas, je l'ai modifiée en cinq secondes et deux manipulations.
Peut-être Yann Moix n'aime-t-il pas lire...Le premier qui voudrait me convaincre d'une lecture moins attentive, moins fine ou je ne sais quoi, des deux premiers ouvrages cités peut proposer toutes les explications qu'il veut, je ne le suivrai pas dans son raisonnement.(Au passage, et à l'attention d'un lecteur qui ne fréquente d'ailleurs peut-être même pas ce blog, mais dont une remarque m'avait un peu énervé, je note que cela me fait, hier, environ 540 pages de lecture, sans précipitation ni sentiment de gavage.)Plutôt que les anathèmes lancés contre l'e-book avec une foi aveugle dans le livre papier, je préfère la nuance romanesque introduite, à propos de livres numériques, par Paul Fournel dans La liseuse. Où un éditeur tout ce qu'il y a de plus traditionnel, bousculé par une stagiaire dynamique, découvre avec un peu d'appréhension les possibilités offertes par une liseuse de 730 grammes dans laquelle sont rangés tous les manuscrits qu'il doit lire. Certes, il finira par revenir aux bons vieux volumes de papier, mais du moins a-t-il fait, dans l'intervalle, une expérience enrichissante. (J'ai lu le roman de Paul Fournel sur écran, faut-il le préciser?)

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