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Quelques contre-vérités sur les États-Unis

Publié le 12 février 2012 par Copeau @Contrepoints

Concernant les États-Unis, toute une série de canards circulent dans les médias, tous plus faux les uns que les autres. Le but de cet article est de corriger certaines de ces erreurs.

Par Charles Gave

Quelques contre-vérités sur les États-Unis
Comme le disait Joseph Goebbels, un expert en la matière s’il en fut, « si vous répétez un mensonge suffisamment souvent, les gens penseront au bout d’un certain temps qu’il s’agit d’une vérité ». Normalement, ce genre de pratiques ne devrait pas avoir cours dans les marchés financiers puisque les participants sont censés s’appuyer sur des informations chiffrées qui ne devraient pas prêter à la controverse. Et pourtant, surtout quand il s’agit des États-Unis, toute une série de canards circulent dans les médias, tous plus faux les uns que les autres, sans que je réussisse très bien à savoir si nous avons affaire à de la malveillance ou à de l’ignorance, couplées à une paresse certaine. Mon but dans ce nouvel article est donc simplement de corriger certaines de ces erreurs, non pas que je sois férocement pro-américain, mais simplement parce que nul ne peut prendre de bonnes décisions s’il les prend à partir d’informations qui sont fausses.

J’appellerai ces erreurs des bouteillons, célèbre concept créé par Jacques Perret dans « le Caporal Épinglé ».

Premier bouteillon : « Les États-Unis sont le pays le plus endetté du monde ».

Les États-Unis ont un déficit des comptes courants depuis bien longtemps. Les mercantilistes acharnés qui pensent qu’un pays est bien géré quand il a un excédent de ses comptes courants additionnent tous ces déficits depuis la nuit des temps, les transformant en une dette vis-à-vis de l’étranger et c’est cette « dette » formidable qui ferait des USA le pays le plus endetté du monde. Bien entendu, il s’agit la d’une stupidité totale. Dans la balance des paiements américaine, publiée tous les trimestres, il existe une ligne qui donne la différence entre ce que les Américains payent aux étrangers qui ont investi chez eux et ce qu’ils touchent sur les investissements fort nombreux que leurs sociétés ont fait en dehors des USA. Si les États-Unis étaient le pays le plus endetté du monde, ce solde devrait être négatif. Or il est positif de 270 milliards de dollars par an et est en progression constante. Ainsi le pays soi-disant le plus endetté du monde a un cash flow positif vis-à-vis de l’étranger. Derrière ce grand mystère, une réalité toute simple : les États-Unis empruntent à 2% en émettant de la dette et placent cet argent à l’extérieur à 15% dans des actifs productifs. Les USA sont donc un peu comme un immense « hedge fund » empruntant à bas coût et investissant là où la rentabilité est la plus forte.

Deuxième bouteillon : « Les États-Unis verraient leur poids dans l’économie mondiale baisser sans cesse et seraient engagés dans une décadence inexorable ».

Il y a trente ans, en 1981, le PNB des USA représentait environ 23% du PNB mondial. Il en est aujourd’hui à peu près au même niveau (21% officiellement, mais sans doute plus s’il était calculé convenablement), mais une chose extraordinaire s’est produite dans l’intervalle : les USA se sont mis à dominer de façon absolument écrasante toutes les industries du futur, c’est-à-dire toutes celles qui touchent à l’économie de la connaissance.

D’après le classement dit de Shanghai, sur les 100 meilleures universités du monde, une grande majorité serait aux USA.
Tous les grands succès Schumpetériens (inventions de rupture) ont eu lieu aux USA : Apple, YouTube (600 millions de clients !), Google, Microsoft, IBM, Amazon et j’en passe. Jamais un pays dans l’histoire n’a dominé à ce point le monde de l’invention, jamais. Assurer que ce pays est en décadence ce qui a toujours été le leitmotiv des gens de gauche en France (voir le livre de J.-F. Revel, L’obsession anti-américaine (2002), qui n’a pas pris une ride), c’est vraiment faire une analyse de la réalité qui n’a rien à voir avec les faits et tout à voir avec la haine que la gauche porte à tous ceux qui réussissent parce qu’ils aiment avant tout la Liberté individuelle et leur pays.

De Gaulle disait qu’un patriote aimait son pays, un nationaliste détestait les autres pays. Les Américains sont patriotes comme peu de peuples au monde. Pour le lecteur, rappelons que le déclin Américain s’est traduit par une surperformance de plus de 40% de New-York vis-à-vis de Paris, en monnaie unique, dividendes compris, depuis quatre ans, ce qui est beaucoup, mais n’est sans doute pas près de s’arrêter.

Troisième bouteillon : « Les États-Unis seraient en train de connaître une désindustrialisation rapide ».

En fait le système industriel américain est de loin le plus important du monde et son poids n’a pas baissé dans l’économie US. C’est celui où la productivité du travail est la plus forte, et de beaucoup. Quasiment la moitié des brevets industriels au monde sont déposés aux USA où s’effectuent 40% des dépenses mondiales de recherche et de développement dans ce domaine (industriel). Qui plus est, ce système, compte tenu des progrès dus à la logistique et à la robotique, est en développement très rapide en ce moment, au point que des signes d’un boom industriel sont en train d’apparaitre aux USA.

Quatrième bouteillon : « Le Dollar serait à la veille soit de s’écrouler soit d’être remplacé comme monnaie de réserve ».

Le plus rigolo des quatre, parce qu’il montre à quel point ceux qui poussent cette idée ne comprennent rien à la notion de monnaie de réserve. Pour être LA monnaie de réserve, il faut être dominant militairement, financièrement, agriculturellement, scientifiquement, culturellement et offrir une sécurité juridique totale à ceux qui placent leur argent dans le pays qui l’émet. Quelqu’un peut-il me suggérer un autre candidat ?

Le dollar a été la monnaie de réserve des 65 dernières années et le restera dans le futur prévisible et la preuve en est que la BCE doit demander des dollars à la Banque centrale américaine la sébile à la main (accords de swaps), que cette dernière, dans sa grande bonté, veut bien lui accorder. Encore un grand succès de l’Euro.

Mais si tout si va bien aux États-Unis, pourquoi ce déluge de commentaires négatifs, en particulier chez nous ?

Il me vient à l’esprit deux raisons :

Comme le disait Sacha Guitry : « Je ne sais pas pourquoi ce jeune homme m’en veut. Je ne lui ai jamais rendu service. » Les USA ont vaincu d’abord le nazisme puis le communisme, qui chez nous avait été supporté par toute la classe intellectuelle (encore une fois voir J.-F. Revel). Les succès américains renvoient tous ces esprits médiocres à leurs éternelles erreurs d’analyses, ce qui est bien difficile pour des gens aussi vaniteux. Ils continuent donc d’attendre l’écroulement final du capitalisme et donc des US – que leur prophète, qui s’est trompé sur tout leur a annoncé il y a 150 ans. Ils risquent d’attendre longtemps.

Les USA, depuis 10 ans ou plus, ont été gouvernés tant au niveau de la banque centrale qu’au niveau politique par une remarquable série d’incompétents. Ces incompétents ont amené l’économie américaine dans une situation difficile dont elle est en train de sortir – malgré eux. Comme les commentateurs sont obsédés par la politique politicienne, ils jugent les USA à l’aune de sa classe politique, ce qui est une grave erreur.

Donc, et malgré les déclarations incompréhensibles de monsieur Bernanke, je ne change pas mon conseil : restez investis aux USA en valeurs Schumpetériennes et si vous n’en avez pas, achetez-en.

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